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enfuite envoyé Proconful en Afrique, où il mourut après avoir obtenu les marques d'honneur du triomphe.

On dit qu'à fon retour en Afrique la même perfonne, qui lui avoit prédit fa grandeur future, fe préfenta de nouveau à lui au fortir du vaiffeau. Ces prédictions fi précifes, & fi exactement fuivies de l'effet, faifoient croire à Pline que ces fortes d'apparitions n'étoient pas toujours vaines. Cette hiftoire de, Curtius Rufus avoit été écrite par Tacite affez long-tems avant Pline.

X XI V.

Maifon prétendue infeftée par des Spectres.

I

L rapporte au même endroit une autre hiftoire, qui qui n'eft pas moins merveilleufe. Il y avoit à Athenes une fort belle maifon, mais abandonnée; perfonne n'ofant y demeurer, à caufe d'un Spectre, qui y paroiffoit. Le Philofophe Athenodore étant arrivé dans cette Ville, & ayant vû un écriteau qui marquoit que cette maison étoit à vendre & à vil prix, il l'acheta, & y alla coucher avec fes gens. Comme il étoit occupé à lire & à écrire pendant

comme de chaînes qu'on traînoit, & il apperçût en même tems un Vieillard affreux chargé de chaînes & de fer, qui s'approchoit de lui, il continua d'écrire. Le Spec tre lui fait figne de le fuivre; le Philofophe fans lui répondre, lui dit d'attendre & continue fon travail. Le Spectre s'approche, & fait retentir fes chaînes à fes oreilles. Alors le Philofophe voyant fon importunité, prend la lumiere & le fuit; ils arrivent ensemble à la cour de la maifon, & auffi-tôt le Phantôme difparoît & rentre fous terre. Athenodore fans s'effrayer, arrache fur le lieu des feuilles & de l'herbe pour marquer la place, & retourne fe repofer dans la maifon. Le lendemain il avertit de ce qui lui étoit arrivé. Les Magiftrats viennent & font foüiller en cet endroit. On y trouve les os d'un cadavre chargé de chaînes On les lui ôte & l'on rend publiquement à fes os les honneurs de la fepulture. Depuis ce tems la maison fut tranquille, & le Philofophe profita du bon marché.

:

(a) Lucien raconte une Hiftoire à peu près pareille, & dit qu'elle arriva à Corinthe, qu'on y montroít encore de fon tems la maifon où la chofe étoit arrivée ; que la maifon avoit appartenu à un nom. (a) Lucian. ~in Philepfend. p. 840,

mé Eubatides, dans le quartier Cranaus. Qu'un nommé Arignote y voulu paffer la nuit, fans fe mettre en peine d'un Spectre qu'on disoit qui y revenoit. Arignote se munit de certains Livres Magiques des Fgyptiens, & étant entré dans la maifon avec une lumiere, il fe mit à lire tranquillement dans la cour. Le Spectre parut peu après, dans l'efperance d'effrayer Arignote, en prenant la forme tantôt d'un Chien, tantôt d'un Taureau, tantôt d'un Lion. Mais Arignote fans fe troubler commença à prononcer dans fes Livres certaines invocations magiques, & réduifit le Spectre en un coin de la cour, où il s'enfonça dans la terre & difparut. Le lendemain Arignote fit venir Eubatide. Maître de la maison, & ayant fait creufer au lieu, où le Phantôme avoit difparu, on trouva un corps, ou plûtôt un fquelette, auquel on donna la fepulture, & depuis ce tems l'on ne vit & l'on n'oüit plus rien dans cette maison.

C'eft Lucien, c'est-à-dire, l'homme du monde le moins crédule fur ces fortes de chofes, qui fait raconter cet évenement par Arignote. Mais dans le même endroit il dit que Démocrite, qui ne croyoit ni Anges, ni Démons, ni Efprits, s'étant enfermé dans un tombeau hors de la Ville,où

il étudioit & écrivoit jour & nuit ; quelques jeunes gens voulurent l'effrayer, se couvrirent la nuit d'habits noirs, comme on représente les morts & ayant pris des mafques hideux, ils vinrent crier & fauter autour du lieu où il étoit. Il ne s'en émût point & ne quitta pas fon étude ; mais il leur dit froidement: ceffez de badiner.

Antoine de Torquemade qui a écrit en Efpagnol un Ouvrage intitulé: Jardin de Fleurs curieufes, imprimé à Salamanqne en 1570. traduit en François par Gabriel Chappuy Tourangeau, & imprimé à Lyon en 1582. & à Rouen en 1610. fous le titre d'Hexameron, ou l'Ouvrage de fix jours; Antoine de Torquemade dis-je, raconte que peu avant fon tems, il étoit arrivé à Boulogne une chofe à peu près femblable à celle, que Pline dit être arrivée à Athènes, & Lucien à Corinthe. Il marque donc qu'un jeune homme nommé Vafquez de Ayola, étant allé à Boulogne avec deux de fes Compagnons pour étudier en Droit, & n'ayant pas Trouvé dans la Ville un logement tel qu'ils le fouhaitoient, on leur montra une grande & belle maison, qui étoit abandonnée parce qu'il y revenoit un Spectre qui effrayoit tous ceux qui vouloient y demeurer. Ils fe mocquerent de ces dif

cours & y fixerent leur demeure. Au bout d'un mois Ayola veillant feul dans fa chambre & fes Compagnons dormans tranquillement, il oüit venir comme de loin, plusieurs chaînes qu'on traînoit par terre, & dont le bruit s'avançoit vers lui par l'escalier de la maifon. Il fe recommanda à Dieu, fit le figne de la Croix, prit fon épée & un bouclier, & ayant la chandelle à la main, il vit ouvrir fa porte, par un Spectre épouvantable, n'ayant que les os, mais chargé de chaînes.

Ayola le conjura, lui dit de demander ce dont il avoit befoin, & s'il vouloit qu'il le fuivit. Le Spectre lui fit figne de le fuivre ; il marcha & comme il defcendoit l'efcalier, fa lumiere s'éteignit. Il retournal a fa chambre, la raluma, fuivit l'Esprit,. qui le conduifit à travers une cour, où il y avoit un puit. Ayola craignit que le phantome ne voulut l'y précipiter & s'arrêta. Mais le Phantome lui fit figne de continuer à le fuivre. Ils entrerent dans le jardin où le Spectre difparut. Ayola arracha quelques poignées d'herbes fur le lieu, & retourna raconter à fes compagnons ce qui lui étoit arrivé; le matin il en donna avis aux Principaux de Boulogne.

Le Gouverneur & les principaux de la ville, vinrent reconnoître l'endroit. On y

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