Imágenes de páginas
PDF
EPUB

croyoit qu'Apollon & Diane étoient fes enfans. Il dit ailleurs qu'Apollon & Orus, Diane ou Bubaftis, & Cérès ne font pas différentes d'Ifis; preuve que le fecret des Prêtres avoit un peu tranfpiré dans le public; puifque, malgré cette contradiction apparente, tout cela fe voit en effet dans l'œuvre Hermétique, ou la mere, le fils, le frere & la fœur, l'époux & l'époufe font réunis dans un même fujet. C'eft ainfi que les Prêtres avoient trouvé l'art de voiler leurs myfteres, foit en préfentant Ofiris comme un homme mortel, dont ils racontoient l'hiftoire, foit en difant que c'étoit, non un homme mortel, mais un aftre qui combloit tout l'Univers, & l'Egypte en particulier, de tant de bienfaits, par la fécondité & l'abondance qu'il procure. Ils favoient même donner le change à ceux qui, foupçonnant quel que chofe de mystérieux, cherchoient à s'en inf truire, & à y pénétrer. Comme les principes théoriques & pratiques de l'art Sacerdotal ou Hermétique pouvoient s'appliquer à la connoiffance générale de la Nature & de fes productions, que cet art fe propofe pour modele; ils donnoient à ces gens curieux, des leçons de Phyfique; & bien des Philofophes Grecs puiferent leur Philofophie dans ces fortes d'inftructions.

OSIR

СНАРІT R E III.

Hiftoire d'Ofiris.

SIRIS & Ifis devenus époux, donnerent tous leurs foins à faire le bonheur de leurs fujets. Comme ils vivoient dans une parfaite union, ils y travaillerent de concert; ils s'appliquerent à polir leur peuple, à leur enfeigner l'agricul ture, à leur donner des loix, & à leur apprendre les arts néceffaires à la vie (a). Ils leur apprirent entr'autres l'ufage des inftrumens & la méchanique, la fabrique des armes, la culture de la vigne & de l'olivier, les caracteres de l'écriture dont Mercure, ou Hermès, ou Thaut les avoit inftruit. Ifis bâtit, en l'honneur de fes peres Jupiter & Junon, un Temple célebre par fa grandeur & fa magnificence. Elle en fit conftruire deux autres petits d'or, l'un en l'honneur de Jupiter le célefte, l'autre moindre en l'honneur de Jupiter le terreftre, ou Roi fon pere, que quelques-uns ont appelé Ammon. Vulcain étoit trop recommandable pour être oublié : il eut auffi un Temple fuperbe, & chaque Dieu, continue Diodore, eut fon Temple, fon culte, fes Prêtres, fes facrifices. Ifis & Ofiris inftruifirent auffi leurs fujets de la vénération qu'ils doivent avoir

(a) Diodore de Sicile, 1. 1. c. 1. & Plutarque de Ifide & Ofiride.

pour les Dieux, & l'eftime qu'ils devoient faire de ceux qui avoient inventé les arts, ou qui les avoient perfectionnés. On vit dans la Thébaïde des ouvriers en toutes fortes de métaux. Les uns forgeoient les armes pour la chaffe des bêtes; les inftrumens & les outils propres à la culture des terres & aux autres arts; des Orfevres firent des petits Temples d'or, & y placerent des ftatues des Dieux, compofées de même métal. Les Egyptiens prétendent même, ajoute notre Auteur qu'Ofiris honora & révéra particulierement Hermès, comme l'inventeur de beaucoup de chofes utiles à la vie. C'eft Hermès, difent-ils, qui le premier a montré aux hommes la maniere de coucher par écrit leurs penfées, & de mettre leurs expreffions en ordre, pour qu'il en refultât un difcours fuivi. Il donna des noms convenables à beaucoup de chofes ; il inftitua les cérémonies que l'on devoit obferver dans le culte de chaque Dieu. Il obferva le cours des aftres, inventa la mufique, les différens exercices du corps, l'arithmétique, la médecine, l'art des métaux, la lyre à trois cordes ; il régla les trois tons de la voix, l'aigu pris de l'Eté; le grave pris de l'Hiver, & le moyen du Printemps. Le même apprit aux Grecs la maniere d'interpréter les termes, d'où ils lui donnerent le nom d'Hermès, qui fignifie interprete. Tous ceux enfin qui du temps d'Ofiris firent ufage des lettres facrées, l'apprirent de

Mercure.

Ofiris ayant ainfi difpofé tout avec fageffe, & rendu fes Etats floriffans, conçut le deffein de rendre tout l'Univers participant du même bon

heur. Il allembla pour cet effet une grande atmée, moins pour conquérir le monde par la force des armes, que par la douceur & l'humanité, perfuadé qu'en civilifant les hommes, & leur apprenant la culture des terres, l'éducation des animaux domeftiques, & tant d'autres chofes utiles, il lui en refteroit une gloire éternelle.

Avant que de partir pour fon expédition, il régla tout dans fon Royaume. Il en donna la régence à Ifis, & laiffa près d'elle Mercure pour fon conseil, avec Hercule, qu'il constitua intendant des Provinces. Il partagea enfuite fon Royaume en divers gouvernemens. La Phénicie & les côtes maritimes échurent à Bufiris ; la Lybie, l'Ethiopie, & quelques pays circonvoifins à Anthée. Il partit enfuite, & fut fi heureux dans fon expédition, que tous les pays où il alla fe foumirent à fon empire.

Ofiris emmena avec lui fon fiere que les Grecs appellent Apollon, l'inventeur du laurier. Anubis & Macédon, fils d'Ofiris, mais d'une valeur bien différente, fuivirent leur pere: le premier avoit un chien pour enfeigne; le second un loup. Les Egyptiens prirent de-là occafion de repréfenter l'un avec une tête de chien, l'autre avec une tête de loup ; & d'avoir beaucoup de refpect & de vénération pour ces animaux. Ofiris fe fic aufli accompagner de Pan, en l'honneur duquel les Egyptiens bâtirent dans la fuite une ville dans la Thébaïde, à laquelle ils donnerent le nom de Chemnim, ou Ville du pain. Maron & Triptolême furent encore de la partie; l'un pour

apprendre aux peuples la culture de la vigne; l'autre, celle des grains.

Ofitis partit donc, & l'on a foin de faire remarquer qu'il eut une attention particuliere pour l'entretien de fa chevelure, jufqu'à fon retour. Il prit fon chemin par l'Ethiopie, où il trouva des Satyres, dont les cheveux defcendoient jufqu'à la ceinture. Comme il aimoit beaucoup la mufique & la danfe, il mena avec lui un grand nombre de muficiens; mais on remarquoit particulierement neuf jeunes filles fous la conduite d'Apollon, que les Grecs appelerent les neuf Mufes & difoient qu'Apollon avoit été leur maître; d'où ils lui donnerent le nom de muficien, & d'inventeur de la mufique.

[ocr errors]

Dans ce temps-là, difent les Auteurs, le Nil à la naiffance du Chien Syrius, c'est-à-dire, au commencement de la canicule, inonda la plus grande partie de l'Egypte, & celle en particulier

laquelle Prométhée préfidoit. Ce fage Gouverneur, outré de douleur à la vue de la défolation de fon pays & de fes habitans, vouloit de défefpoir fe donner la mort. Hercule vint heureufement au fecours, & fit tant par fes confeils & fes travaux, qu'il fit rentrer le Nil dans fon lit. La rapidité de ce fleuve, & la profondeur de fes eaux, lui firent donner le nom d'Aigle.

Ofiris étoit alors en Éthiopie, où voyant que le danger d'une telle inondation menaçoit tout ce pays, il fit élever des digues fur les deux rives du fleuve, de maniere qu'en contenant les eaux dans leur lit, ces digues laifoient néanmoins échapper autant d'eau qu'il en falloit pour

« AnteriorContinuar »