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tale; mais les autres n'y convenoient nullement. Il y a donc grande apparence qu'elles avoient un autre objet que celui de la Religion. On a inventé une infinité de fyftêmes pour expliquer & les hieroglyphes & les fables; M. Peluche (a), en fuivant les idées de quelques autres, a prétendu qu'ils n'avoient d'autres rapports qu'avec les faifons, & qu'ils n'étoient que des inftructions que l'on donnoit au peuple pour la culture des terres mais quelle connexion peut avoir cela avec tous ces fuperbes monumens, ces richeffes immenfes dont nous avons parlé, ces Pyramides où les Auteurs nous affurent que les anciens Philofophes Grecs puiferent leur Philofophie? Ces fages y voyoient donc ce que les inventeurs de ces hiéroglyphes n'avoient pas eu deffein d'y mettre; ditons plutôt que les fabricateurs du fyltême de M. Peluche n'y voyoient eux-mêmes goutte. Un peuple qui n'eût été occupé que de la culture des terres, & qui n'exerçoit aucun commerce avec les autres Nations, auroit-il trouvé, en labourant, ces tréfors qui fourniffoient à tant de dépenses? Comment M. Peluche adaptera-t-il ce fecret fi recommandé à fon fyftême? y auroit il eu du myftere à repréfenter hiéroglyphiquement, ce que l'on auroit enfuite expliqué ouvertement à tout le monde ? Peut-on en même temps cacher & découvrir une même chofe? C'eût été le fecret de la comédie. Il n'eft pas vraifemblable que l'on eût non feulement fait un myftere de ce que tout le monde favoit, mais

(a) Hift. du Ciel.

qu'on eût défendu fous peine de la vie de le divulguer. Voyons quelques -uns de ces hiéroglyphes, & par les explications que nous en donnerons, tirées de la Philofophie Hermétique, on aura lieu de fe convaincre de l'illufion de M. Peluche & de tant d'autres.

SECTION TROISIEME. DES ANIMAUX RÉVÉRÉS EN ÉGYPTE,

ET DES

PLANTES HIEROGLYPHIQUES.

CHAPITRE PREMIER.

Du Bœuf Apis.

Tous les Hiftoriens qui parlent de l'Egypte,

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font mention du Bœuf facré. « Nous ajouterons » à ce que nous avons rapporté du culte rendu » aux animaux, les attentions & le foin que »les Egyptiens ont pour le Taureau facré qu'ils appellent Apis. Lorfque ce Bœuf eft » mort (a), & qu'il a été magnifiquement inhumé, des Prêtres commis pour cela en cher» chent un femblable, & le deuil du peuple

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(a) Diodor. L. 1, 0, 4.

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» ceffe lorfque ce Taureau eft trouvé. Les Prê>>tres à qui l'on confie ce foin, conduifent le » jeune animal à la ville du Nil, où ils le nour» riffent pendant quarante jours. Ils l'introdui, fent enfuite dans un vaiffeau couvert, dans lequel on lui a préparé un logement d'or, & l'ayant conduit à Memphis avec tous les hon»neurs dûs à un Dieu, ils le logent dans le temple de Vulcain. Pendant tout ce temps-là » les femmes feules ont permiffion de voir le Boeuf; elles fe tiennent debout devant lui d'une maniere très-indécente. C'eft le feul » temps où elles puiffent le voir. » Strabon (a) dit que ce Boeuf doit être noir, avec une feule marque blanche formée en croiffant de lune, au front ou fur l'un des côtés. Pline eft du même fentiment (b). Hérodote (c), en parlant d'Apis, que les Grecs nomment Epaphus, dit qu'il doit avoit été conçu par le tonnerre; qu'il doit être tout noir, ayant une marque quarrée au front, la figure d'une aigle fur le dos, celle d'un efcarbot au palais, & le poil double à la queue (d).

(a) Geogr. liv. dernier. (b) Bos ab Egyptiis numinis vice cultus Apis vo catur, ac candicanti maculâ in dextro latere, ac cornibus lunæ crefcentis infignibus, nodum fub lingua habet quem cantharum appellant. Hunc Bovem certis visæ annis tranfactis, merfum in facerdotum fonte enecant; interim lu&tu alium

quem fubftituant quæfituri
donec inveniant derafis ca-
pitibus lugent, inventus de-
ducitur à facerdotibus
Memphim. L. 8. c. 46.
(c) L 111. c. 28.

(d) Eft autem hic Apis, idemque Epaphus, è vacca genitus quæ nullum dum alium poteft concipere fœtum: quam Ægyptii aiunt fulgure iftam concipere ex

Pomponius

"

Pomponius Mela eft d'accord avec Hérodote quant à la conception d'Apis, de même qu'Elien. « Les Grecs, dir ce dernier, le nomment Epaphus, & prétendent qu'il tire fon origine d'lo l'Argienne, fille d'inaque; mais les Egyptiens » le nient, & en prouvent le faux, en assurant » que l'Epaphus des Grecs eft venu bien des » fiecles après Apis. Les Egyptiens le regardent » comme un grand Dieu, conçu d'une Vache » par l'impreffion de la foudre. » On nourriffoit ce Taureau pendant quatre ans, au bout defquels on le conduifoit en grande folemnité à la fontaine des Prêtres, dans laquelle on le faifoit noyer, pour l'enterrer enfuite dans un magnifique tombeau.

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Plufieurs Auteurs font mention des Palais fuperbes, & des appartemens magnifiques que les Egyptiens bâtiffoient à Memphis pour loger le Taureau facré. On fait les foins que les Prêtres se donnoient pour fon entretien, & la vénération que le peuple avoit pour lui. Diodore nous apprend que de fon temps le culte de ce Bœuf étoit encore en vigueur, & ajoute qu'il étoit fort ancien, Nous en avons une preuve dans le Veau d'or que les Ifraélites fabriquerent dans le défert. Ce peuple fortoit de l'Egypte, & avoit emporté avec lui fon penchant pour l'idolatrie Egyptienne. Il s'étoit écoulé bien des fiecles depuis Moyfe

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jufqu'à Diodore, qui vivoit, fuivant fon propte témoignage, du temps de Jules Céfar, & fut en Egypte fous le regne de Ptolomée Aulete, environ 55 avant la naillance de J. C.

Les Egyptiens, du temps du voyage de cet Auteur, ignoroient probablement la véritable origine du culte qu'ils rendoient à Apis, puifque leurs fentimens varioient fur cet article. Les uns, ditil, penfent qu'ils adorent ce Bœuf, parce que l'ame d'Ofiris, après fa mort, paffa dans le corps de cet animal, & de celui-ci dans fes fucceffeurs. D'autres racontent qu'un certain Apis ramaffa les meinbres épars d'Ofiris tué par Typhon, les mit dans un Boeuf de bois, couvert de la peau blanche d'un Boeuf, & que pour cette raifon on donne à la ville le nom de Bufiris. Cet Hiftorien rapporte les fentimens du peuple; mais il avoue lui-même (a) que les Prêtres avoient une autre tradition fecrete, confervée même par écrit. Les raifons que Diodore déduit, d'après les Egyptiens, du culte qu'ils rendoient aux animaux, lui ont paru fabuleufes à luimême, & font en effet fi peu vraisemblables, que j'ai cru devoir les paffer fous filence. Il n'eft pas furprenant que le Peuple & Diodore n'en (a) Multa alia de Api fabulantur, quæ longum effet fingulatim referre. Omnia verò miranda & fide majora de hujufmodi animalium honore differentes Ægyptii, dubitationem haud parvam quærentibus caufas injecerunt, Sacerdo

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tes fecretiora quædam fcrip
ta, ut jam diximus habent.
Multi Ægyptiorum tres
caufas reddunt
, quarum
prima præfertim, omninò
fabulofa eft, & antiquo-
rum fimplicitate digna. L.
I. rerum Antiq. c. 4.

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