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dit que Jupiter apparut à Hercule fous la même forme; & que c'eft pour cela qu'on confacra le Bélier à ce pere des Dieux & des hommes, & qu'on le représente ayant la tête de cet animal. Cette faveur que Jupiter accorda aux inftantes prieres d'Hercule, caractérise précisément le violent defir qu'ont tous les Artiftes Hermétiques de voir le Jupiter Philofophique, qui ne peut fe montrer que dans la Libye, c'eft-à-dire, lorfque la matiere a paffé par la diffolution; parce qu'ils ont alors le mercure après lequel ils ont tant foupiré. Nous prouverons dans le cinquieme Livre, que tant en Egypte que dans la Grece, Hercule fut toujours le fymbole de l'Artifte ou Philofophe Hermétique. L'allégorie de la fontaine a été employée par plufieurs Adeptes, & en particulier par le Trévifan (a), & par Abraham Juif, dans fes figures hiéroglyphiques rapportées par Nicolas Flamel. Nous parlerons encore du Bélier dans le livre 2, lorfque nous expliquerons la fable de la Toifon d'or. Le Bélier étoit une victime que l'on facrifioit prefque à tous les Dieux, parce que le Mercure, dont il étoit le fymbole, les accompagne tous dans les opérations de l'Art facerdotal; mais l'on difoit que Mercure, quoique Meffager des Dieux, l'étoit plus fpécialement de Jupiter, & en particulier pour les meffages gracieux, au lieu qu'Ifis n'étoit gueres envoyée que pour des affaires triftes, pour des guerres, des combats, &c. La raifon en est toute natu

traxerat, induta ibi,ita fefe Herculi oftenderet; & ob id Ægyptios inftituiffe

Jovis fimulacrum facere arietino capite. L. 2. c. 42.

(a) Philof. des Métaux,

relle pour un Philofophe, qui fait qu'on ne dois entendre par lfis que les couleurs variées de l'arcen-ciel, qui ne fe manifeftent fur la matiere que pendant la diffolution de la matiere, temps auquel fe donne le combat du fixe & du volatil.

CHAPITRE I X.

De l'Aigle & de l'Epervier. Ces deux oifeaux ont affez de rapport par

leur nature; l'un & l'autre font forts, hardis, entreprenans, d'un tempérament chaud, igné, bouillant; & les raifons qui, felon Horus avoient déterminé les Egyptiens à inférer l'Epervier dans leurs hiéroglyphes, conviennent trèsbien avec celles qui ont engagé les Philofophes à emprunter le nom de cet oifeau, pour le donner à leur matiere parvenue à un certain degré de perfection, où elle acquiert une ignéité qui la caractérise particulierement; je veux dire, lorfqu'elle eft devenue foufre Philofophique; c'est dans cet état que Raymond Lulle (a) l'appelle notre Epervier, ou la premiere matiere fixe des deux grands luminaires.

L'Aigle eft le Roi des oifeaux, & confacré à Jupiter, parce qu'elle fut d'un heureux préfage pour ce Dieu, lorfqu'il fut combattre fon pere Saturne, & qu'elle fournit des armes au même

(a) Lib. Experim. 13.

Jupiter, lorfqu'il vainquit les Titans, &c. Son char eft attelé de deux Aigles, & l'on ne repréfente prefque jamais ce Dieu fans mettre cet oifeau auprès de lui. Si peu qu'on ait lu les ouvragès des Philofophes Hermétiques, on eft au fait de l'idée de ceux qui ont inventé ces fictions. Tous appellent Aigle leur mercure, ou la partie volatile de leur matiere. C'eft le nom le plus commun qu'ils lui aient donné dans tous les temps. Les Adeptes de toutes les Nations font d'accord là-deffus. Chez eux le Lion eft la partie fixe, & l'Aigle la partie volatile. Ils ne parlent que des combats de ces deux animaux. Il est donc inutile d'en rapporter les textes : je suppose parler à des perfonnes qui les ont au moins feuilletés.

On a feint avec raifon que l'Aigle fut d'un bon augure à Jupiter, puifque la matiere fe volatilise dans le temps que Jupiter remporte la victoire fur Saturne, c'est-à-dire, lorfque la couleur grife prend la place de la noire. Elle fournit par la même raifon des armes à ce Dieu contre les Titans, comme nous le prouverons dans le troifieme livre au chapitre de Jupiter, où nous renvoyons l'explication de ce fait. Le même motif a fait dire que le char de ce Dieu étoit attelé de deux Aigles.

Mais pourquoi repréfentoit-on Ofiris avec une tête d'Epervier? Ceux qui ont fait attention à ce que nous avons dit de ce Dieu, le devineront aifément. L'Epervier eft un oifeau qui attaque tous les autres, qui les dévore, & les transforme en fa nature en les changeant en fa propre fubftance, puifqu'ils lui fervent d'alimens. Òfiris eft

un principe igné & fixe, qui fixe les parties volatiles de la matiere défignées par les oifeaux. Le texte que j'ai cité de Raymond Lulle prouve la vérité de mon interprétation. J'ai dit auffi qu'Ofiris étoit l'or, le foleil, le foufre des Philofophes, & l'Epervier eft un fymbole du Soleil. Homere (a) l'appelle, le Mellager d'Apollon, lorfqu'il raconte que Télémaque étant prêt de retourner à Ithaque, en apperçut un qui dévoroit une colombe; d'où il conjectura qu'il auroit le deffus fur fes rivaux. Les Egyptiens donnoient pour raifon du culte rendu à cet oiseau, qu'il étoit venu des pays inconnus à Thebes, où il avoit apporté aux Prêtres un livre écrit en lettres rouges, dans lequel étoient toutes les cérémonies de leur culte religieux.

Il n'eft perfonne qui ne voie combien un tel fait est fabuleux; mais on doit bien fentir qu'on ne l'a pas inventé fans raifons. On dira fans doute que les Prêtres débitoient une telle fable, pour donner plus de refpect au peuple, en lui faifant croire que quelque Dieu avoit envoyé cet oifeau chargé de cette commiffion. Mais ils n'auroient pas été d'accord avec eux-mêmes, puifqu'ils publioient en même temps qu'Hermès avec Ifis étoient les inventeurs & les inftituteurs de ce culte, & des cérémonies qu'on y observoir. Il y auroit eu une contradiction, au moins apparente; car dans le fond tout s'accordoit parfaitement. Le livre prétendu étoit écrit en lettres rouges, parce que le magiftere Philofophique,

[(a) Odyff.

l'élixir parfait de l'Art facerdotal, Ofiris, dont l'Epervier étoit le fymbole, ou l'Apollon des Philofophes, eft rouge, & d'un rouge de pavot des champs. Les cérémonies de leur culte y étoient écrites, puifqu'elles étoient une allégorie des opérations, & de tout ce qui fe paffe depuis le commencement de l'œuvre jufqu'à fa perfection, temps auquel fe montre l'Epervier; c'est pourquoi l'on difoit que cet oiseau avoit apporté ce livre: voilà la fiction. Hermès d'un autre eôté avoit inftitué ces cérémonies, & avoit établi des Prêtres, auxquels il avoit confié fon fecret, pour les obferver; voilà le vrai. Ifis étoit mêlée dans cette inftitution, parce qu'elle y avoit eu en effet bonne part, en étant l'objet, & comme matiere elle y avoit donné lieu. Ceux qui chez les Egyptiens étoient chargés d'écrire ce qui regardoit ce culte, portoient, au rapport de Diodore (a), un chapeau rouge avec une aile d'Epervier, pour les raisons ci-dessus.

Il femble qu'il y a une autre contradiction dans ce que je viens de dire, de conforme cepen dant à ce que difoient les Egyptiens. Ofiris & Horus n'étoient pas le même, puifque l'un étoit le pere, l'autre le fils. On convient cependant que l'un & l'autre étoient le fymbole du Soleil, ou d'Apollon. Je demande aux Mythologues comment, fuivant leurs différens fyftêmes, ils pourront réfoudre cette difficulté. Deux perfonnes différentes, deux Rois qui ont régné fucceffivement, de maniere qu'il y a même eu le regne d'ifis intermédiaire, peuvent-ils être cenfès une (a) L. 1. c. 4.

même

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