même l'éprouve dans les grandes chaleurs. Le corps tranfpire toujours, & les fueurs qui ruifielent fouvent le long du corps le manifestent assez. Ceux qui ont donné dans les idées creufes des 察 Rabbins, ont cru qu'il avoit exifté, avant cette premiere matiere, un certain principe plus ancien qu'elle, auquel ils ont donné fort improprement le nom d'Hylé. C'étoit moins un corps qu'une ombre immenfe, moins une chofe, qu'une image très-obscure de la chofe, que l'on devroit plutôt nommer un fantôme ténébreux de l'Etre, une nuit très-noire, & la retraite ou le centre. des ténebres; enfin une chofe qui n'exifte qu'en puiffance, & telle feulement qu'il feroit poffible à l'efptit humain de fe l'imaginer dans un fonge. Mais l'imagination même ne fauroit nous le repréfenter autrement que comme un aveugle-né fe repréfente la lumiere du Soleil. Ces fectateurs du Rabbinifme ont jugé à propos de dire que Dieu tira de ce premier principe un abyme ténébreux, informe comme la matiere prochaine des élémens & du monde. Mais enfin tout de concert nous annonce l'eau comme premiere matiere des chofes. L'efprit de Dieu qui étoit porté fur les eaux (a), fut l'inftrument dont le fuprême Architecte du monde fe fervit pour donner la forme à l'Univers. Il répandit à l'inftant la lumiere, réduifit de puiffance en acte les femences des chofes auparavant confufes dans le chaos, & par une altération conftante de coagulations & de réfolu (a) Gen. 1. ne F tions, il entretint tous les individus. Répandu uit dans toute la maffe, il en anime chaque partie, & par une continuelle & fecrete opération il donne le mouvement à chaque individu, felon le genre & l'efpece auquel il l'a déterminé. C'est proprement l'ame du monde; & qui l'ignore ou le nie, ignore les loix de l'Univers. 位 TE ce eft De la Nature. A ce premier moteur ou principe de génération & d'altération, s'en joint un fecond corporifié, auquel nous donnons le nom de Nature. L'œil de Dieu, toujours attentif à son ouvrage, ans proprement la Nature même, & les loix qu'il a pofées pour fa confervation, font les caufes de tout ce qui s'opere dans l'Univers. La Nature que nous venons d'appeler un fecond moteur corporifié, eft une Nature fecondaire, un ferviteur fidele qui obéit exactement aux ordres de fon maître (a), ou un inftrument conduit la main par d'un ouvrier incapable de fe tromper. Cette Nature ou caufe feconde eft un efprit univerfel, qui a une propriété vivifiante & fécondante de la lumiere créée dans le commencement, & communiquée à toutes les parties du macrocofme. Zoroaftre avec Héraclite l'ont appelé un efprit igné, un feu invisible, & l'ame du monde. C'est de lui que parle Virgile, lorfqu'il dit (b): .Dès le commencement un certain efprit igné fut en (a) Cefinopol. Tract. 2. (b) Eneid. 1. 6. infufé dans le ciel, la terre & la mer, la lune & les aftres Titaniens ou terreftres (a). Cet efprit leur donne la vie & les conferve. Ame répandue dans tout le corps, elle donne le mouvement à toute la maffe, & à chacune de fes parties. De là font venues toutes les efpeces d'ètres vivans, quadrupedes, oifeaux, poiffons. Cet efprit igné eft le principe de leur vigueur: fon origine eft céleste, & il leur eft communiqué par la femence qui les produit. L'ordre qui regne dans l'Univers n'eft qu'une fuite développée des loix éternelles. Tous les mouvemens des différentes parties de fa masse en dépendent. La Nature forme, altere & corrompt fans ceffe; & fon modérateur, préfent partout, répare continuellement les altérations de l'ouvrage. On peut partager le monde en trois régions, la fupérieure, la moyenne & l'inférieure. Les Philofophes Hermétiques donnent à la premiere le nom d'intelligible, & difent qu'elle eft fpirituelle, immortelle ou inaltérable; c'est la plus parfaite. La moyenne eft appelée céleste. Elle renferme les corps les moins imparfaits & une quantité d'efprits (b). Cette région étant au milieu par (a) C'est-à-dire, les mi- I néraux & les métaux, auxquels on a donné les noms de Planetes. (b) Il faut remarquer que les Philofophes n'entendent pas par ces efprits, des ef prits immatériels ou efprits angéliques, mais feulement des efprits phyfiques, tels que l'efprit igné répandu dans l'Univers. Telle eft auffi la fpiritualité de leur région fupérieure. ticipe de la fupérieure & de l'inférieure. Elle fert comme de milieu pour réunir ces deux extrêmes, & comme de canal par où fe communiquent fans ceffe à l'inférieure les efprits vivifians qui en animent toutes les parties. Elle n'est sujette qu'à des changemens périodiques. L'inférieure ou élémentaire comprend tous les corps fublunaires.. Elle ne reçoit des deux autres les efprits vivifians que pour les leur rendre. C'eft pourquoi tout s'y altere, tout s'y corrompt, tout y meurt; il ne s'y fait point de génération qui ne foit précédée de corruption; & point de naiffance, que la mort ne s'enfuive. Chaque région eft foumife, & dépend de celle qui lui eft fupérieure, mais elles agiffent de concert. Le Créateur feul a le pouvoir d'anéantir les êtres, comme lui feul a eu le pouvoir de les tirer du néant. Les loix de la Nature ne permettent pas que ce qui porte le caractere d'être ou de fubftance, soit affujetti à l'anéantissement. Ce qui a fait dire à Hermès (a) que rien ne meurt dans ce monde, mais que tout paffe d'une maniere d'être à une autre. Tout mixte eft compofé d'élémens, & fe réfout enfin dans ces mêmes élémens, par une rotation continuelle de la Nature, comme l'a dit Lucrece: Huic accedit uti quicque in fua corpora rurfum Il y eut donc dès le commencement deux principes, l'un lumineux, approchant beaucoup (a) Pymand. de la Nature fpirituelle; l'autre tout corporel & ténébreux. Le premier pour être le principe de la lumiere, du mouvement & de la chaleur : le fecond comme principe des ténebres, d'engourdiffement & de froid (a). Celui-là actif & mafculin; celui-ci paffif & féminin. Du premier vienr le mouvement pour la génération dans norre monde élémentaire, & de la part du fecond procéde l'altération, d'où la mort a pris commen cement. Tout mouvement fe fait par raréfaction & condensation (b). La chaleur, effet de la lumiere fenfible ou infenfible, eft la caufe de la raréfaction, & le froid produit le refferrement ou la condenfation. Toutes les générations, végétations & accrétions ne fe font que par ces deux moyens; parce que ce font les deux premieres difpofitions dont les corps aient été affectés. La lumiere ne s'eft répandue que par la raréfaction; & la condenfation, qui produit la densité des corps, a feule arrêté le progrès de la lumiere, & confervé les ténebres. Lorfque Moyfe dit que Dieu créa le ciel & la terre, il femble avoir voulu parler des deux principes formel & matériel, ou actif & paffif que nous avons expliqué, & il ne paroît pas avoir entendu par la terre, cette maffe aride qui parut après que les eaux s'en furent féparées. Celle dont parle Moyfe eft le principe matériel de tout ce qui exifte, & comprend le globe terra-aque-aérien. L'autre n'a pris proprement fon nom que de fa féche(a) Cofmop. Tract. 1. (b) Beccher, Phys, subt. |