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font appuyées comme fur leur bafe, & ne forment qu'un même globe avec elle. Les fupérieures occupent la baffe région de l'air où elles fe font élevées en forme de vapeurs & de nuages, & où elles errent au gré des vents. L'air en eft rempli en tout temps; mais elles ne se manifestent à notre vue qu'en partie, lorfqu'elles fe condenfent en nuées. C'eft une fuite de la création. Dieu fépara les eaux du firmament, de celles qui étoient au deffous. Il ne doit pas être furprenant que toutes ces eaux raffemblées aient pu couvrir toute la furface de la terre, & former un déluge univerfel, puifqu'elles la couvroient avant que Dieu les en eût féparées (a). Ces maffes humides qui volent fur nos têtes, font comme des voyageurs qui vont recueillir les richeffes de tous les pays, & reviennent en gratifier leur patrie.

Du Feu.

Quelques Anciens plaçoient le feu comme quatrieme élément, dans la plus haute région de l'air, parce qu'ils le regardoient comme le plus léger & le plus fubtil. Mais le feu de la Nature ne differe point du feu célefte; c'est pourquoi Moyfe n'en fait aucune mention dans la Genefe, parce qu'il avoit dit que la lumiere fut créée le premier jour.,

Le feu dont on ufe communément eft en partie naturel, & artificiel en partie. Le Créateur a ramaffé dans le Soleil un efprit igné, principe

(a) Gen. c. 5.

de mouvement & d'une chaleur douce, telle qu'il la faut à la Nature pour fes opérations. Il la communique à tous les corps, & en excitant & développant le feu qui leur eft inné, il conferve le principe de la génération & de la vie. Chaque individu y participe plus ou moins. Qui cherche dans la Nature un autre élément du feu, ignore ce que c'eft que le Soleil & la lumiere.

Il eft logé dans l'humide radical, comme dans le fiége qui lui eft propre. Chez les animaux, il femble avoit établi fon domicile principal dans le cœur, qui le communique à toutes les parties, comme le Soleil le fait à tout l'Univers.

Le feu de la nature eft fon premier agent. Il réduit les femences de puiffance en acte. Si-tôt qu'il n'agit plus, tout mouvement apparent ceffe, & toute action vitale. Le mouvement a la lumiere pour principe, & le mouvement eft la caufe de la chaleur. C'eft pourquoi fabfence du Soleil & de la lumiere font de fi grands effets fur les corps. La chaleur pénetre dans l'intérieur des plus opaques & des plus durs, & y anime la nature cachée & engourdie. La lumiere ne pénetre que les corps diaphanes, & fon propre eft de manifefter les accidens fenfibles des mixtes. Le Soleil eft donc le premier agent naturel & univerfel.

En partant du Soleil, la lumiere frappe les corps denfes, tant céleftes que terreftres; elle met leurs facultés en mouvement, les emporte, les réfléchit avec elle, & les répand tant dans l'air fupérieur que dans l'inférieur. L'air ayant une difpofition à fe mêler avec l'eau & la terre

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devient le véhicule de ces facultés, & les communique aux corps qui en font formés, ou qui en font fufceptibles par l'analogie qu'ils ont avec elles. Ce font ces facultés que l'on appelle influences. Nombre de Phyficiens en nient l'exiftence, parce qu'ils ne les connoiffent pas.

On divife le feu en trois, le céleste, le terreftre ou central, & l'artificiel. Le premier eft le principe des deux autres, & fe diftingue en feu univerfel, & feu particulier. L'univerfel répandu par-tout excite & met en mouvement les vertus des corps; il échauffe & conferve les femences des chofes infufées dans notre globe, destiné à leur fervir de matrice. Il développe le feu particulier; il mêle les élémens, & donne la forme à la matiere.

Le feu particulier eft inné, & implanté dans chaque mixte avec fa femence. Il n'agit gueres que lorfqu'il eft excité; il fait alors dans la partie de l'Univers, ce que le Soleil fon pere fait dans le tout.

Par-tout où il y a génération, il y a nécessairement du feu, comme caufe efficiente. Les Anciens le penfoient comme nous (a). Mais il eft furprenant qu'ils aient admis une contrariété & une oppofition entre le feu & l'eau, puifqu'il n'y a point d'eau fans feu, & qu'ils agilent tou

(a) Inde hominum pecudumque genus, vitæque vo¬ lantum,

Et

quæ marmoreo fert monftra fub æquore pontus, Igneus eftillis vigor, & cœleftis origo

Seminibus.

Virg. Æneid. 1. 6.

jours de concert dans les générations des individus.

Tout ail un peu clairvoyant doit au contraire remarquer un amour, une fympathie qui fait la confervation de l'Univers, le cube de la Nature, & le lien le plus folide pour unir les élémens, & les chofes fupérieures avec les inférieures. Cet amour même eft, pour ainfi dire, ce que l'on devroit appeler la Nature, le miniftre du Créateur, qui emploie les élémens pour exécuter fes volontés, felon les loix qu'il luy a impofées. Tout fe fait dans le monde en paix & en union, ce qui ne peut être un effet de la haine & de la contrariété. La Nature ne feroit pas fi femblable à elle-même dans la formation des individus de même efpece, fi tout chez elle ne fe faifoit pas de concert. Nous ne verrions. que des monftres fortir de la femence hétérogene de peres perpétuellement ennemis & qui fe combatroient fans ceffe. Voyons-nous les animaux travailler haine & par par contrariété à la propagation de leurs efpeces? Jugeons des autres opérations de la Nature par celle-là: ses loix font fimples & uniformes.

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Que la Philofophie ceffe donc d'attribuer l'altération, la corruption, la caducité, la décadence des mixtes à la contrariété prétendue entre les élémens: elle fe trouve dans la pénurie & la foibleffe propre à la matiere première; car dans le chaos, Frigida non pugnabant calidis, humentia ficcis. Tout y étoit froid & humide, qualités qui conviennent à la matiere, comme femelle

Le chaud & le fec, qualités mafculines & for

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melles, lui font venus de la lumiere, dont elle a reçu la forme. Auffi n'eft-ce qu'après la retraite des eaux que la terre fut appelée aride ou feche.

Nous voyons fans ceffe que le chaud & le fec donnent la forme à tout. Un Potier ne réuffiroit jamais à faire un vafe, fi la féchereffe ne donne à fa terre un certain degré de liaison & de folidité. La terre eft-elle trop mouillée, trop molle. c'eft de la boue, c'eft un limon qui n'a aucune forme déterminée.

Tel étoit le chaos, avant que la chaleur de la lumiere l'eût raréfié, & fait évaporer une partie de l'humidité. Les parties fe rapprocherent, le limon du chaos devint terre, & une terre d'une confiftance propre à fervir de matiere à la forma tion de tous les mixtes de la Nature.

Le chaud & le fec ne font donc que des qualités accidentelles à la premiere matiere; elle n'en a été douée qu'en recevant fa forme (a). Aufli n'eft-il point dit dans la Genefe, que Dieu trouva le chaos très-bon, comme il l'affute de la lumiere & des autres chofes. L'abyme femble n'avoir acquis un degré de perfection, que lorfqu'il commença à produire. La confufion, la difformité, une denfité opaque, une froideur, une humidité indigefte, & une impuiffance étoient fon apanage; qualités qui indiquent un corps languiffant, malade, difpofé à la corruption. Il a confervé quelque chofe de cette tache originelle & primitive, & en a infecté tous les corps qui en font fortis, pour être placé dans cette baffle région. C'est pourquoi tous les mixtes (a) Genef. ch. 1.

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