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y ont une maniere d'être paffagere, quant à la détermination de leur forme individuelle & fpécifiée.

Quelqu'oppofées que femblent être la lumiere & les tenebres, depuis qu'elles ont concouru, l'une comme agent, l'autre comme patient, à la formation de l'Univers, elles ont fait dans ce concours de leurs qualités contraires, un traité de paix prefqu'inaltérable, qui a paffé dans ia famille homogene des élémens, d'où s'en eft fuivi la génération paifible de tous les individus. La Nature fe plaît dans la combinaison, & fait tout par proportion, poids & mesure, & non par contrariété.

Eft modus in rebus, funt certè denique fines,
Quos ultra citraque nequit confiftere rectum.

Hor. Art. Poët.

Chaque élément a en propre une des qualités dont nous parlons. Le chaud, le fec, le froid & l'humide font les quatre roues que la Natute emploie pour produire le mouvement lent, gradué & circulaire qu'elle femble affecter dans la formation de tous fes ouvrages.

gras

Le feu, fon agent univerfel, eft le principe du feu élémentaire. Celui-ci fe nourrit de toutes les chofes graffes, parce que tout ce qui eft eft de la nature humide & aérienne. Quoiqu'à l'extérieur il nous paroiffe fec, tel que le foufre, la poudre à canon, &c. l'expérience nous apprend que cet extérieur cache un humide gras, onctueux, huileux, qui fe réfout à la chaleur.

Ceux qui ont imaginé qu'il fe formoit dans l'air des corps durs, tels que les pierres de foudre, fe font trompés, s'ils les ont regardés comme des corps proprement terreftres. C'eft une matiere qui appartient à l'élément groffier de l'eau: une humeur graffe, vifqueufe, renfermée dans les nuages comme dans un fourneau, où elle fe condense en fe mêlant avec des exhalaisons fulfureuses, par conféquent chaudes & très-aifées à s'enflammer. L'air qui s'y trouve renfermé & trop refferré par la condenfation, s'y raréfie par la chaleur, & y fait le même effet que la poudre à canon dans une bombe: le vaiffeau éclate, le feu répandu dans l'air, débarraffé de fes liens par le mouvement, produit cette lumiere & ce bruit qui étonne fouvent les plus intrépides.

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Notre feu artificiel & commun a des propriétés tout-à-fait contraires au feu de la Nature quoiqu'il l'ait pour pere. Il eft ennemi de toute génération; il ne s'entretient que de la ruine des corps; il ne fe nourrit que de rapine; il réduir tout en cendres, & détruit tout ce que l'autre compose. C'est un parricide, le plus grand ennemi de la Nature; & fi l'on ne favoit oppofer des digues à fa fureur, il ravageroit tout. Eft-il furprenant que les fouffleurs voient périr tour entre fes mains, leurs biens & leur fanté s'évanouir en fumée, & une cendre inutile pour toute ressource?

M. Stahl n'eft pas le premier, comme le veut M. Pott, qui ait donné des idées raisonnables & liées fur la fubftance du feu qui fe trouve dans les corps; mais il est le premier qui en a rai

onné fous le nom de Phlogistique. On a vu cidevant le fentiment des Philofophes Hermétiques

ce fujet. Il ne faut qu'ouvrir leurs livres pour être onvaincu qu'ils connoiffoient parfaitement cet gent de la Nature; & que M. Pott avance mal à de propos que les Auteurs antérieurs à M. Stahl fe perdoient dans des obfcurités continuelles & des contradictions innombrables. Peut-être ne parle-t-il que des Chymiftes & des Phyficiens vulgaires; mais dans ce cas il auroit dû faire une exception des Chymiftes Hermétiques, qu'il a fans doute lus, & avec lefquels il s'eft du moins fi heureusement rencontré, dans fon Traité du feu & de la lumiere, imprimé avec la Traduction Françoise de fa Lithogéognofie. M. Stahl les avoit étudiés avec beaucoup d'attention. Il en fournit une grande preuve, non feulement pour avoir raifonné comme eux fur cette matiere mais par le grand nombre de citations qu'il en fait dans fon Traité qui a pour titre : Fundamenta Chemis dogmatica & experimentalis. Il y donne au mercure le nom d'eau feche, nom que les Philofophes Hermétiques donnent au leur. Bafile Valentin, Philalethe & plufieurs autres font cités à cet égard. Il diftingue même les Chymiftes vulgaires des Chymiftes Hermétiques, (part. 1. p. 124) en nommant les premiers Phyfici communes & les feconds Chymici alii. Dans la même partie du même ouvrage, pag. 2. il dit qu'Ifaac Hollandois, Arnaud de Villeneuve, Raymond Lulle, Bafile Valentin, Trithême, Paracelfe, &c. fe font rendus recommandables dans l'Art Chymique.

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Loin de méprifer, comme tant d'autres, & de rejeter comme faux ce que ces Auteurs difent cet habile homme fe contente de parler comme eux, & dit, p. 183. qu'ils fe font exprimés par énigmes, allégories, &c. pour cacher leur fecret au Peuple, & femblent n'avoir affecté des contradictions, que pour donner le change aux Lecteurs ignorans. Il s'étend encore davantage fur cette matiere, pag. 219. & fuiv. où il appelle les Chymiftes Hermétiques du nom de Philofophes. On peut après un fi grand homme employer cette dénomination. Nous aurons occafion de parler encore de M. Pott, en traitant de la lumiere & de fes effers.

La proximité de l'eau & de la terre fait qu'ils font prefque toujours mêlés. L'eau délaye la terre ; celle-ci épaiffit l'eau ; il s'en forme du limon. Si l'on expofe ce mélange à une chaleur vive chaque élément vifible retourne à fa sphere, & la forme du corps fe détruit.

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Placée entre la terre & l'air, l'eau eft proprement la caufe des révolutions, du défordre, du trouble, de l'agitation, & du renversement que l'on remarque dans l'air & la terre. Elle obfcurcit l'air de noires & dangereufes vapeurs, elle inonde la terre: elle porte la corruption dans l'un & dans l'autre, & par fon abondance ou fa difette, elle trouble l'ordre des faifons & de la Nature. Elle fait enfin autant de maux que de biens.

Quelques Anciens difoient que le Soleil préfidoit particulierement au feu, & la Lune à l'eau, parce qu'ils regardoient le Soleil comme

la fource du feu de la Nature, & la Lune comme le principe de l'humide. Ce qui a fait dire à Hippocrate (a) que les élémens du feu & de l'eau pouvoient tout, parce qu'ils renfermoient

tout.

Des opérations de la Nature.

La fublimation, la defcenfion & la coction font trois inftrumens ou manieres d'opérer que la Nature emploie pour parfaire fes ouvrages. Par la premiere, elle évacue l'humidité fuperflue, qui fuffoqueroit le feu, & empêcheroit fon action dans la terre fa matrice.

Par la defcenfion, elle rend à la terre l'humidité dont les végétaux ou la chaleur l'ont privée. La fublimation fe fait par l'élévation des vapeurs dans l'air, où elles fe condenfent en nuages. La feconde fe fait par la pluie & la rofée. Le beau temps fuccede à la pluie, & la pluie au beau temps à l'alternative; une pluie continuelle inonderoit tout; un beau temps perpétué dessécheroit tout. La pluie tombe gouttes à gouttes, parce que verfée trop abondamment, elle perdroit tout comme un Jardinier qui arroferoit fes graines à pleins feaux. C'eft ainfi que la Nature diftribue fes bienfaits avec poids, mefure & proportion.

La coction eft une digeftion de l'humeur crue inftillée dans le fein de la terre, une maturation, & une converfion de cer humeur en aliment, au moyen de fon feu fecret.

Ces trois opérations font tellement liées enfemble, que la fin de l'une eft le commence(a) Lib. 1o, de Diœtâ.

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