Imágenes de páginas
PDF
EPUB

2. 13.

mettra qu'il en fasse de si extraordinaires, qu'elles féduiroient les élus mêmes, fi les élus pouvoient être féduits. Son pouvoir ira, par la permiffion de Dieu, jufqu'à faire defcendre le feu du ciel. Apoc. 13 Mais il ne tiendra qu'aux fideles de fe précautionner contre la feduction, en se souvenant que Jefus-Chrift les en a prévenus, & les a avertis de ne s'y pas méprendre. Il ne tiendra qu'à eux de faire, au fujet de l'Ante-Chrift, le raifonnement fuivant. Cet homme enfeigne une doctrine directement contraire à celle de Jefus-Christ. Or, la doctrine de Jefus-Chrift a été confirmée par de vrais miracles. Donc les œuvres de celui-ci ne font

que de purs preftiges.

C'est équivalemment de la même maniere que faint Auguftin raifonnoit autrefois contre les Donatistes. Vous ne faites point de miracles, leur difoit-il, & quand vous en feriez, nous ne vous croirions pas : Miracula non facitis: quæ fi faceretis, vobis tamen non crederemus. Pourquoi le faint docteur parloit-il ainfi ? C'est que les Donatistes étoient oppofés à l'églife, & que l'églife ayant été établie par de vrais miracles, tous ceux qu'ils auroient effayé de faire, auroient eu néceffairement le caractere du menfonge.

Ce que faint Auguftin difoit aux hérétiques de fon tems, on peur le dire à ceux de tous les fiecles: Vous ne faites point de miracles, & quand vous en feriez, nous ne vous croirions pas. Pour.

juftifier dans mon efprit la révolte où vous vivez contre les décisions de l'églife, vous m'alléguez des miracles. A cela je n'ai qu'un mot à vous dire. La doctrine de l'église a été vérifiée par de vrais miracles; la vôtre y eft contraire. Vos prétendus miracles ne font donc que des fourberies ou des preftiges; vous me citez des guérifons que vous prétendez prodigieufes; mais par rapport à ces guérifons, de trois chofes l'une; ou ceux qui en ont été les objets n'étoient point véritablement malades, ou ils n'ont point été véritablement guéris, ou ils ne l'ont été que par des remedes naturels; & en ces trois cas, vos prétendues guérifons miraculeufes ne font que des fourberies. Si vous me prouvez qu'ils étoient vraiment malades, qu'ils font vraiment guéris, & qu'ils ne l'ont pas été par des remedes, dans ce cas ils ne l'ont été que par les démons, & vos guérisons ne font que des prestiges.

En effet, il n'eft pas impoffible que les démons paroiffent quelquefois opérer des guérifons, quand Dieu le leur permet; ils le peuvent faire, comme dit faint Auguftin, en ceffant de nuire; par exemple, ils aveugleront un homme en lui mettant des taies fur les yeux; & enfuite ils paroîtront le guérir de fon aveuglement en levant les obftacles qu'ils avoient mis eux-mêmes. Ils donneront la fievre à un autre en lui agitant le fang; & ils paroîtront le guérir en ne l'agitant plus. Mais

if eft des guérifons qu'ils n'opéreront point. Ils ne
donneront point la vue à un aveugle-né; ils ne
reftitueront point l'usage d'un membre tombé de-
puis long-tems en putréfaction; ils ne reffuscite-
ront point un mort. Ils peuvent bien foutenir un
corps en l'air, & le transporter rapidement d'un
lieu à un autre. Ce que Notre Seigneur voulut
bien permettre au démon qui le tenta dans le dé-
fert, , en eft une preuve. Mais quand il lui permet
cette forte d'œuvres, il y a toujours quelque cir-
conftance qui fait voir qu'elles n'ont pour auteur
que le
pere du menfonge.

Un fecond caractere, c'est l'obfcénité. Quand Obfcénité. elle fe trouve dans ces fortes d'opérations, il n'en faut pas davantage pour montrer qu'elles ne viennent pas de Dieu. Quand je vois, par exemple, qu'à l'invocation d'un prétendu faint, il fe fait, par ceux qui l'invoquent, des mouvements convulfifs, dont quelques-uns font baiffer les yeux, non-feulement à la pudeur, mais à l'effronterie même; cela feul m'autorife à conclure que les guérifons qu'on y reçoit, (fuppofé qu'on en reçoive quelqu'une) ne peuvent venir que du démon. Un Dieu, qui est la pureté même, ne sauroit être l'auteur d'une œuvre qui eft fi contraire à cette vertu. Quand il n'y auroit donc pas dans les opérations de cette efpece, d'autre défaut que celui de l'indécence & de l'immodeftie, cela fufquelque prodigieufes qu'elles paruffent

fioit,

Foibleffe.

d'ailleurs, pour me donner droit de les attribuer à l'efprit impur, à qui Dieu permet quelquefois, en punition de la criminelle confiance qu'on a en lui, de fe jouer de ceux qui la lui témoignent (a).

Qu'on me vante donc tant qu'on voudra des prodiges de cette nature, je n'aurai garde de m'y méprendre, & je déclarerai qu'ils ne font des prodiges qu'en ce qu'ils montrent un prodigieux tifice dans ceux qui en font les auteurs, une prodigieufe opiniâtreté dans ceux qui en font les objets, & un prodigieux aveuglement dans ceux qui en font les dupes. L'aveuglement de ces derniers eft en effet d'autant plus prodigieux qu'il ne tiendroit qu'à eux de découvrir le piége que le malin efprit leur a tendu, puifque la moindre circonftance obfcene qui fe rencontre en une guérifon décele évidemment l'efprit impofteur qui l'a produite. Mais paffons au troifiéme caractere des faux miracles; caractere de foibleffe.

C'est ce que nous voyons en plufieurs endroits de l'Ecriture. Dans l'Exode il eft dit que Moïfe allant trouver Pharaon pour lui ordonner, de la part de Dieu, de laiffer fon peuple aller facrifier

(a) Voyez les mandements de M. de Soiffons fur les prétendus miracles, & les Lettres theologiques de Dom la Taste, Bénédictin, & depuis évêque de Béthléem, fur le même objet.

2.11.

dans le défert, fit divers prodiges en sa présence.
Il commença par changer fa baguette en ferpent.
Les magiciens de Pharaon en firent de même
chacun de la leur; mais la baguette de Moïfe
dévora celle des magiciens. Premier trait de foi-
bleffe, qui devoit montrer à ce roi impie, que
Moïse agiffoit par le fecours de Dieu, & que fes
magiciens n'étoient fecourus que par le démon.
Moïfe changea les eaux de l'Egypte en fang; les
magiciens firent par leurs enchantements le mê-
me changement fur de l'eau : feceruntque fimili-Exodi 7;
ter malefici Egyptiorum incantationibus fuis. Il
en fut à peu près de même de la production des
grenouilles; mais quand Moïfe produifit une mul-
titude innombrable de moucherons, les magiciens Exodi &;
essayerent inutilement de l'imiter, & ils furent
obligés de reconnoître, malgré eux, que le doigt
de Dieu étoit vifible dans ce quatriéme prodige.
Et dixerunt: digitus Dei eft hic. Ils auroient dû
le reconnoître de même dans les trois autres, puif-
dans le premier, la baguette de Moïse dévora
les leurs ; que dans le fecond, ils ne purent pas
rechanger en eaux les eaux que Moïse avoit chan-
gées en fang; que dans le troifiéme, ils ne pu-
rent pas délivrer Pharaon des grenouilles que Moïfe
avoit produites. Il n'y eut que lui feul qui put faire
ceffer ces deux fléaux. Or, tout cela montre qu'il
ne tenoit qu'à Pharaon d'appercevoir dans les trois

que

7. 18.

1

« AnteriorContinuar »