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cet avantage? & parmi ceux mêmes à qui leurs facultés ont permis de fe donner un grand nombre de livres, combien ne s'en trouve-t-il point à qui les autres occupations indifpenfables du faint ministere ne permettent pas de prendre tout le loifir qu'il faudroit pour feuilleter les gros volumes où les preuves de la Religion font entaffées..

Au lieu que par le moyen de celui-ci, ils

pourront, après avoir lu deux ou trois fois, tout au plus, une Conférence, se mettre en état d'inftruire folidement leurs peuples. Je dis, après avoir lu deux ou trois fois; car je ne leur confeillerois pas de les apprendre de mémoire; ce travail feroit trop fatigant; mais je fuis perfuadé qu'après une ou deux lectures réfléchies, ils pourront parler fur le fujet d'une maniere très-solide, & l'expérience leur montrera qu'en fe livrant, comme nous le devons tous faire, à l'esprit de Dieu, au nom duquel nous parlons, ce divin efprit leur donnera dans la chaire même des idées fortes, des expreffions vives qui ne leur fuffent jamais venues dans le froid de la compofition.

D'ailleurs, comme quelques-unes de ces Conférences font trop longues pour un prône, on pourra les divifer en deux ou trois parties, dont chacune fuffira pour remplir le

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tems que l'usage a fixé à ces pieux exercices. Et par-là un Curé aura dequoi inftruire fes paroiffiens pendant plus d'une année..

Il s'agit maintenant de répondre à une objection qui fe présente aflez naturellement. C'est, dira-t-on, à l'instruction du peuple que vous deftinez cet Ouvrage contre les Incrédules; mais l'incrédulité n'eft point le partage du peuple. Il n'y a que les grands & les prétendus beaux efprits qui donnent dans ce travers.

Sur cela j'en appelle à l'expérience. Combien ne trouve-t-on pas, dans les provinces les plus éloignées de la capitale, dans de petites villes, & jufques dans le fond des campagnes, d'Incrédules qui plaifantent froidement fur les plus terribles vérités de notre Religion, qui difent que l'enfer n'eft qu'un épouvantail de l'invention des prêtres? Combien n'entend-on pas d'artifans, dans leurs atteliers, & de payfans, dans leurs villages, traiter de momeries ce que nous avons de plus refpectable dans nos mysteres (a)? Il eft

(a) Tout ceci eft confirmé par M. de Pompignant, ancien évêque du Puy, dans fa Religion vengée par l'incrédulité méme, page 268. Avouons, en gémiffant, que l'impiété n'a pas feulement féduit des grands & des riches; mais qu'elle a étendu fes

vrai que ce n'est pas, graces à Dieu, le plus grand nombre qui en eft là. Mais faut-il attendre que le mal foit irrémédiable pour y apporter le remede?

Autre difficulté. Les fideles entendront-ils volontiers traiter un fujet fi métaphysique, & par-là même fi au-deffus de leur portée? N'est-il pas à craindre qu'ils ne viennent pas à des Difcours de cette efpece?

Je réponds à cela, premiérement, qu'on ne confulte pas le goût d'un malade, pour favoir s'il aime, ou s'il n'aime pas le remede qu'on lui préfente. C'eft au médecin feul à en juger. Quand le malade aura pris ce remede, & qu'il en aura été guéri, il faura gré au médecin de l'avoir prefque forcé de s'en fervir; fecondement, les fideles, même les plus fimples, entendent plus volontiers qu'on ne croiroit, parler des preuves de leur religion.Il eft fi confolant pour un Chrétien de pouvoir fe dire à foi-même : Je fuis sûr d'être dans la voie qui peut me conduire à Dieu; qu'il

ravages dans des états mitoyens, & jufques dans les derniers rangs de la fociété. De-là des blafphêmes raisonnés dans des bouches qui ne fembloient pas faites pour être les échos des livres impies. De-là le fpectacle de vils malfaiteurs fe confolant du fupplice qu'ils alloient fubir, par l'affreuse espérance du néant.

n'est point surprenant qu'ils prennent plaifir à en entendre parler. L'expérience montre que dans plufieurs villes, dans plusieurs diocèses, dans plufieurs provinces, ces fortes de Difcours les attirent en foule, & qu'ils les écoutent avec la plus grande fatisfaction. Six évêques ont eu la joie de voir que dans leurs cathédrales, où, les jours fur femaine, il y avoit à peine au fermon foixante auditeurs, il s'y en trouvoit plus de huit cents dès qu'on commençoit à traiter ces fortes de matieres.

On a donc tort de craindre que ces fortes de Conférences ne rebutent les auditeurs. Au contraire, ils les écouteront avec d'autant plus de plaifir, qu'on y employera la preuve par les faits; parce que les faits font plus à leur portée, que ce qui n'eft que du reffort de l'entendement. Il eft vrai qu'il faut être judicieux dans le choix qu'on en fait. Apporter des faits faux pour foutenir la Religion, ce feroit un crime. La vérité n'a pas befoin que le menfonge vienne à fon fecours. Alléguer des faits apocryphes, & dont les fources font, au moins, douteuses, c'eft encore un mal. Ce feroit faire méprifer la Religion par la foibleffe des preuves qu'on employeroit pour la défendre. Mais quand les faits font tirés ou de l'Ecriture, ou des Saints Peres, ou de l'Hiftoire Ecclé

fiaftique, ou d'auteurs qui paffent conftamment pour vrais dans leur narration; ils ne peuvent être que d'un grand fecours pour la défense d'une Religion principalement appuyée fur des faits. Mais ceci fe développera davantage dans le Difcours préliminaire. Paffons à une autre difficulté qui regarde la briéveté ou l'étendue de cet Ouvrage. Quelques-uns le trouveront trop abrégé pour une matiere û importante. Quelques autres le trouveront trop diffus, & penferont qu'on auroit pu, peut-être même, qu'on auroit dû en retrancher bien des choses.

Les premiers font les favants. Si quelquesuns d'entr'eux daignent jetter les yeux fur ce petit Ouvrage, ils ne manqueront pas de dire qu'un si grand objet ne devoit pas être traité fi en raccourci. Mais je les prie de se souvenir que ce n'est pas pour eux qu'il a été fait. Nous convenons que les preuves de la Religion quiy font alléguées demanderoient plus de développement, & il n'eût pas été difficile de leur en donner davantage. Mais par-là, nous aurions manqué notre but. Le célebre Dom Mabillon dit, quelque part, qu'un écrivain doit à chaque page jetter les yeux fur fon titre ; c'est-àdire, qu'il ne doit rien mettre dans fon livre qui n'ait du rapport avec le deffein qu'il a eu en le compofant. Le nôtre ayant été d'inf

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