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truire le peuple; nous avons dû mettre ici en petit ce qui fe trouve en grand par-tout ailleurs. Les favants de profeffion dévorent les volumes; le peuple n'en eft pas-là.

Je fuis déja convenu que les personnes qui compofent cet ordre infime de la fociété qu'on nomme le bas peuple ne liront pas cet Ouvrage, & qu'ils n'en pourront profiter que par l'organe de leurs pafteurs. Mais il en eft d'autres qui tiennent le milieu entre les favants & le petit peuple. Ceux-ci pourront le lire, pourvu qu'il ne foit pas trop long. Quand un ouvrage eft fort étendu, on commence par dire: Quis leget hæc ? On lit le titre; on ferme le livre, & on n'y revient plus. Comme l'effentiel d'un fermon, c'eft qu'on l'entende; l'effentiel d'un livre, c'eft qu'on le life. Il falloit donc mettre celui-ci à portée d'être lu. C'est ce qui nous a déterminés à le faire auffi court qu'il étoit poffible. Si la trop grande prolixité dégoute le lecteur, une briéveté exceffive ne l'inftruit pas fuffifamment, & on tombe dans le défaut que le poëte lyrique vouloit qu'on évitât: Brevis effe laboro, obfcurus fio. C'est ce qui nous a portés à donner quelqu'étendue à nos preuves. Et c'eft fur cette étendue que nous avons maintenant à nous justifier visà-vis de quelques perfonnes.

Il est des hommes qui à peine ont com

mencé à lire un livre, qu'ils voudroient être à la fin. Ceux-ci trouveront sûrement le nôtre beaucoup trop long. Ce n'eft pas pour des lecteurs fi fuperficiels que nous l'avons fait. Nous l'avons écrit pour inftruire. Or, on n'inftruit pas, en ne faifant qu'effleurer les matieres, & en glissant, pour ainsi dire, fur la furface des objets. En fait de religion, il vaudroit mieux n'en point traiter du tout que de n'en traiter qu'à demi. On court rifque par-là de laiffer dans l'efprit des lecteurs les difficultés que forment les objections, fi on n'en diffipe les tenebres, en y répandant les lumieres que de folides réponses y apporteroient, & ces réponses ne peuvent être folides qu'en leur donnant une certaine étendue.

Finissons cet avertiffement par rendre compte aux lecteurs des fources où nous avons puifé les preuves de la Religion Chrétienne. Nous leur devons cela pour leur montrer que ce n'est pas de nous-mêmes que nous parlons, & que nous avons appris de nos peres dans la foi ce que nous enfeignons ici aux fideles.

Ces fources font, 1°. les livres de l'ancien & du nouveau Teftament; 2°. les deux apologies de faint Juftin adreffées à l'empereur & au fénat; 3°.le dialogue du même faint avec le juif Tryphon; 4°. l'apologétique de Tertullien ; 5°. les vingt-deux livres de la Cité de Dieu par

faint Auguftin; 6°. enfin plus de quatre-vingtdix volumes fur la Religion que nous avons lus, & quelques-uns plus d'une fois.

Voilà nos garans dans les preuves que nous apportons en faveur du Chriftianifme. Les uns nous ont fourni un fait & une histoire; les autres, une date & une époque; celui-ci un paffage; celui-là un raifonnement: Sic fiunt libri. On n'invente pas un fait, on le trouve; on ne forge pas un passage, on le lit; pour ce qui eft des raifonnements, c'eft autre chofe. On en rencontre quelques-uns dans les livres qui ont traité la même matiere; on en forme d'autres qui y font analogues, ou qui en font le développement. Telle est la marche de tous ceux qui écrivent. Telle a dû être, & telle a été la nôtre. Ceux qui ont lu les ouvrages dont nous venons de parler, s'appercevront bien que, fans en copier aucun, nous les avons prefque tous mis à contribution.

Reste maintenant à prévenir le lecteur fur les notes qu'il trouvera dans la fuite de cet ouvrage. Les notes courtes qui ne demandent qu'un coup d'oeil rapide, je les ai mises au bas de la page; mais celles qui par leur longueur tiennent de la differtation, j'ai cru devoir les renvoyer à la fin de chaque Conférence, par la crainte de trop interrompre le fil du difcours.

CONFÉRENCES,

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Sine fide impoffibile eft placere Deo.
Sans la foi il eft impoffible de plaire à Dieu.

Epift. Sandi Pauli ad Hæbr. c. 11, v. 6.

QU'ELLE eft affoiblie, parmi nous, mes chers

Auditeurs, cette foi qui eft fi néceffaire au falut! & que le fiécle où nous vivons, est en cela différent de celui où vivoient nos peres! Après l'éta

A

blissement du Chriftianifme, il a long-tems fuffi, pour travailler au falut des Chrétiens, de les porter à s'éloigner du vice & à pratiquer la vertu. Mais aujourd'hui il s'en trouve, à l'égard defquels il faudroit commencer par leur faire voir qu'il eft une différence effentielle entre la vertu & le vice. Voilà les triftes extrémités où nous a réduits un déréglement de l'efprit & du cœur qui fait qu'on · voit des hommes qui, méchans par principe, foutiennent que la méchanceté n'eft qu'une idée arbitraire & que toutes les actions font indifférentes. C'eft là comme le caractere diftinctif de notre fiécle.

Les efprits-forts de nos jours fe plaifent à lui donner le faftueux titre de fiécle des lumieres ; mais qu'on l'appelleroit beaucoup mieux, au moins pour ce qui regarde la foi, le fiécle des ténébres! ténébres formées par une efpece de nuage dont la capitale du royaume eft le centre, & dont la circonférence s'étend jufques dans les provinces les plus reculées.

Pour s'en convaincre, il ne faut que jetter un coup d'œil fur la maniere dont la Religion eft traitée aujourd'hui dans les converfations d'un certain monde. Que de froides plaifanteries qui tour nent en ridicule nos cérémonies. les plus auguftes! Que de faux raifonnements qui attaquent nos myfteres les plus inconreftables! Que de livres impies dont on cite avec complaifance ce qu'on en appelle les plus beaux morceaux, & qui font

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