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XI. LETTRE.

Réponse du Comte de Buffy l'Abbé F..

I

Ce 2. Fevrier 1673.

que

Ly a fi longtemps que je connois vôtre mérite, Monfieur, que quoique je n'aye pas l'honneur de connoître vôtre perfonne, je vous ai donné mon eftime avec une très grande envie de vous donner mon amitié. Le compliment que vous me faites, vaut mieux qu'elle mais fi quelque chofe la rend confidérable,c'eft que je ne la donne qu'à peu de gens. Je vous demande auffi la vôtre, en vous affurant je prens une très grande part à la juftice le Roi & Meffieurs de l'Académie vous ont faite,& que je fuis perfuadé qu'ils ne pouvoient choifir un plus digne fujet. Quand je vous parle ainfi, ne croyez pas que ce foit par reconnoiffance. Ce qui doit faire eftimer les louanges que je donne, c'est un peu de connoiffance, & beaucoup de fincerité. Je ne fuis ni flateur ni tout-à fait ignorant, & vous me devez croire, quand je vous affure que vous êtes à mon gré un des hommes de France,dont j'esti,

que

me autant la beauté de l'esprit , & que j'aimerai autant , &c.

XII. LE T T R E.

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Du Pere R.. au Comte de Bussy.

A Paris , ce 13. Feyrier 1673.
Ous donnez un grand éloge à Made-

moiselle de Bufly, en disant qu'elle fçait sans en faire de façon. C'est la plus grande louange qu'on puisse donner à une personne de lon sexe & de la qualité. Il seroit bon qu'elle vîr les Femmes sçavantes de Moliere

, pour la confirmer dans ce caractére. Mandez-moi si vous ne les avez vuës , car je les lui envoyerois. Il y a dans cette Comedie des caractéres rares, & d'une grande instruction pour une jeune personne ; car le ridicule des femmes qui font vanité de ce qu'elles sçavent, y, est bien exprimé.

Vous voulez bien que je vous demande vôtre avis sur le T'u & sur le Toi dont so servent nos Poëtes en vers. Madame la Marquise de Sablé m'a dit quelquefois qu'elle ne le pouvoir souffrir. Le Latin te dit en vers, parce qu'il le dit en prose, mais il n'en est pas de même de notre Langue,

qui ne parle par Tu & par Toi qu'aux va lets, & aux petites gens: ce qui eft si vrai, qu'un amant ne dit jamais à la maîtreffe ni Tu ni Toi; c'eft fans doute par respect; & on prétend qu'on le peut dire au Roy,: & à Dieu même: Si j'étois d'humeur à déçider, je dirois que cela me choque, mais j'attens vôtre fentiment fur cela.

Je vous envoyerai de mes réfléxions ce Carême, car je trouve que je commence à être un peu mieux. Je fuis toûjours à vous avec le plus grand refpect & le plus grand attachement du monde.

XIII. LETTRE.

Réponse du Comte de Buffy au Pere R..

No

A Chafeu, ce 14. Février 1673.

pro

Ous n'avons point vû les Femmes fçavantes de Moliere. Mais à pos de lui, le voilà mort en un moment. J'en fuis faché. De nos jours nous ne verrons perfonne prendre fa place; & peutêtre le fiécle fuivant, n'en viendra-t-il un de fa façon.

pas

Je fuis de votre avis fur le Tu & fur le Toi de notre Poéfie; & la raifon que vous

Tome IV.

C

en dites me paroît très-bonne, qui eft que nôtre prose ne s'en fert pas. Cet abus s'eft introduit ou par la gloire dont la plûpart des Poëtes font affez remplis, & qui aiment à tutoyer de plus grands Seigneurs qu'eux, ou bien fouvent par la necessité du vers. En amour il n'eft pas vrai,mon R.P. qu'on ne tutoye jamais la Maîtrefle : mais vous n'êtes pas obligé de fçavoir cela.

En vers c'est un abus que les honnêtes gens ne fçauroient fouffrir; & pour moi, j'aimerois mieux traiter un valet de vous que de tutoyer un Prince. J'attens de vos réfléxions avec bien de l'impatience, & je fuis à vous du meilleur de mon cœur, XIV. LETTRE

De Madame de S... au Comte de Buffy.

C

A Paris, ce 17. Février 1673.

E qui m'avoit empêché de vous écri re,c'est que j'ai été un mois entier à la campagne avec Mademoiselle de P** à médire du genre humain, à lire, à réver, & à effayer d'oublier le monde, dont fans vous flater, vous faites une des plus agréables parties. Je vous avoue ingenûment

que je me trouve à mon retour prefque comme j étois partie, plus mélancolique, & guéres plus dévote. Le retour de nôtre cœur vers Dieu n'eft pas notre ouvrage, `ni celui de qui que ce foit tout feul. Il faut pour cela la grace victorieufe qui nous entraîne prefque malgré nous. Qui eft-ce qui devineroit que je vous entretiendrois de la grace victorieufe?

On dit que Madame B** eft cachée à Paris, & qu'on la fait chercher pour l'enfermer dans une Religion. Monfieur de C** fon beaufrere me loua l'autre jour fa beauté & fon efprit: mais je voi bien qu'il n'eft pas content de fa conduite. Eft il vrai, ne vous deplaife, que c'est vous qui l'avez amenée à trois ou quatre lieues de Paris Notre ami l'Abbé de C**a, dit-on, de grands foins d'elle. Il y a trois mois que je ne l'ai vû; l'amour démonte extrémement fa cervelle.

Je ne fçai fi vous avez fçû que le Duc de C **a envoyé fous un nom inconnu une garniture de pierreries de mille Louis à Mademoiselle du C**. Il y a longtems que l'on n'avoit rien fait de fi galant. II n'eft pas accommodé quoiqu'il s'eft riche, & l'on a fçu qu'il avoit emprunté cet argent. C'est un homme qui a le cœur fort

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