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noble, & toutes les maniéres d'un grand Seigneur.

L'on ne doute point de la guerre, c'est une nouvelle qui vous doit plaire.

En verité j'ai une grande envie de vous revoir, il me femble qu'un peu de converfation nous rendroit encore meilleurs amis.

Vous me deviez bien venir voir quand yous amenâtes Madame B**. Je ne prétens pas que vous me veniez vifiter malgré les defenfes du Roy. Il ne pardonneroit pas un voyage qu'on ne feroit que par amitié, mais je croi qu'il vous pardonneroit celui que vous avez fait pour Madame B ** s'il le fçavoit; car le Tyran qui vous a fait marcher, eft de fa connoiffance.

XV. LETTRE.

Réponse du Comte de Buffy à Madame de Sc...

A Chafeu, ce 25. Février 1673.

Ous m'avez fait rire quand j'ai lû

V dans votre lettre que vous avez paffé

un mois à la campagne à médite du genre humain. J'ai eu peur d'abord pour vôtre confcience: mais après y avoir fongé, j'ai

trouvé qu'on fe fauvoit à déchirer le monde en general, comme on fe damnoit à déchirer les particuliers. Mais enfin, dites Vous, vous êtes revenue à Paris auffi peu devote que vous en étiez partie, & vous croyez que c'est parce qu'il faut que la grace victorieufe nous entraîne: je le croi auffi, & que tout ce que nous avons à faire, c'eft de ne nous laiffer pas trop tirailler quand elle nous veut avoir.

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Monfieur de C** a raifon de vous louer la beauté & l'efprit de Madame B**, mais fur tout fon efprit; perfonne ne l'a plus agréable qu'elle. Pour fa conduite ce n'eft pas la même chofe; elle ne plaît à perfon ne, pas même à fes amans, en faveur de qui elle eft fi mauvaise; & ce n'eft pas feu. lement comme beaufrere, que Monfieur de C**y trouve à redire, il en a cu d'autres raifons: je ne fçai fi elles durent encore. Où avez-vous pris encore cette belle nouvelle, que j'ai amené Madame B** à trois ou quatre lieues de Paris? Ib n'y a rien de fi faux.

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Pour conduire un objet charmant,
Au hazard de déplaire au Maître ;
Il faudroit être fon amant ;

Et je n'ai pas l'honneur de l'être.

XVI. LETTRE

Du Comte de Buffy à Madame de M...

A Chafeu, cc 23. Février 1673.

'A 1 appris avec le chagrin que vous

J'A

pouvez vous imaginer, Madame, étant vôtre ferviteur comme je le fuis, la douleur que vous avez reçûe de l'éxil de laM*. Ce font de ces évenemens où l'efprit humain a de la peine à retenir les mouvemens du cœur. Cepandant, Madame, ne vous laiffez point aller à ces mouvemens. J'efpere, moi, qui connois la force de vôtre efprit en de certaines rencontres, que vous foûtiendrez ce coup conftamment ; répondez à mon attente. Vous avez un fi bel exemple de fermeté devant les yeux dans toutes mes difgraces. Auroit-on dit, à voir Madame de M **, que , que c'étoit fon amant qui étoit perfecuté? Au contraire n'auroit on pas juré que cette belle ne m'aimoit plus, tant elle fçavoit maîtriser fes paffions? Je ne doute pas, Madame, que cet exemple ne vous donne de l'émulation. Vous avez de la gloire ; & je suis affuré que les plus clairvoyans ne pour

ront jamais découvrir que l'éxil de la M* vous afflige.

XVII. LETTRE.

Du Comte de Buffy au Duc de Saint-Aignan.

JA

A Chafeu, ce 25. Février 1673.

le

Ar appris avec grande joye vôtre retour auprès du Roy, Monfieur,tant parce que les gens au pofte où vous êtes font mal quand ils en font éloignez, que parce que je fçai le plaifir que vous avez d'être auprès d'un Maître auffi aimable que nôtre, & que vous aimez autant que vous faites. Je vous avouerai auffi avec ma fincerité ordinaire, qu'il y entre un peu de mon interêt, & que j'efpere que vous pourrez quelquefois faire fouvenir SaMajefté de moi

Avec la plupart des Princes, je desespererois du changement de ma fortune. Quand ils ont commencé à faire du mal, justement ou non, ils continuent feulement parce qu'ils ont commencé. Pour nôtre maître, il récompenfe la même perfonne pour fon mérite & pour les fervices, qu'il avoit punie pour la conduite;ou bien

il la punit après l'avoir récompensée. Les exemples que nous avons de tout cela me donnent une entiere confiance en lui. Il a châtié les fautes que j'ay faites: mais cela ne lui a pas fait oublier mes fervices paffez, ni ôter la confideration de ceux que je lui puis rendre à l'avenir. Je fuis même affuré qu'il a remarqué avec quel refpect j'ay reçû fes châtimens, & qu'il a observé la juftice que je me fuis faite. Je n'ay pas feulement perdu ma fortune fans murmurer; mais depuis fix ans que je fuis exilé, j'ay perdu trois procès par mon abfence. Cependant le Roy fçait bien que je ne lui demandé de le fervir. C'est ce que je fais encore aujourd'hui, Monfieur, & dont je vous conjure de fupplier très-humblement S.M. de ma part, & en attendant la campagne, de me permettre d'aller folliciter moi-même à Paris deux affaires qui me font de très-grande conféquence. Et afin que le Roi fçache la verité de ceci, prenez la peine, Monfieur, de fupplier trèshumblement S. M. de commettre un Maî

ay

que

tre des Requêtes pour l'en informer. J'efpere qu'elle aura la bonté de m'accorder cette grace; car elle n'a voulu faire qu'un exemple de moi, & point du tout ruiner ma maifon. Je fuis même perfuadé qu'elle

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