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mon affliction a été grande, & l'eft encore. C'est une chofe fort touchante de voir mourir un homme dans la fleur de fon âge, à plus forte raifon un ami. Je l'ai fort pleuré, moi qui ne pleure jamais. Helas, Monfieur, que l'on vit peu, & que l'on eft mort longtems! Ces objets-là font faire de cruelles réflexions. Le moien de mêler des nouvelles indifferentes à celles de la mort d'un ami? Adieu mon cher Monfieur, ayez foin de vôtre fanté. Ces exemples-là doivent faire redoubler d'attention.

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CCCXIII. LETTRE.

Réponse du Comte de Buffy à Madame de Sc...

A Chafeu, ce 11. Novembre 1679.

Vo

OTRE lettre m'a extrémement furpris & fort affligé, Madame. La peur que vous m'aviez faite de la maladie de nôtre ami ne m'avoit point du tout prépa ré à fa mort. J'efperois en fa jeuneffe, & au fecours qu'une perfonne qui a du bien, trouve d'ordinaire à Paris: cependant j'y ai été trompé. Je l'aimerois fort, &'je penfe avoir perdu un bon ami en lui. Je ne fçai

fi je me flatte, Madame. Mais vous me parlez du foin qu'il a eu de vous faire oublier les chagrins qu'il vous avoit donnez, d'une manicre à me faire croire qu'il vous a fait quelque prefent en mourant. Je vous affure que je le voudrois de tout mon cœur pour votre interêt, & pour l'honneur de la memoire. Mandez-moi ce qui en est, & ne vous affligez point; car cela ne lui ferviroit de rien, & vous pourroit nuire. Pour moi qui fuis vivement touché de la perte de mes amis, j'effaye à m'en confoler bien vîte ; & la longue experience que j'ai des afflictions, & l'inutilité des regrets m'en fait venir à bout affez aifément.

CCCXIV. LETTRE.

Du Comte de Buffy à Monfieur de J..

A Paris, ce 23. Fevrier 1680.

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OUR répondre à vôtre lettre, Monfieur, je vous dirai que j'aimerois, je croi, mieux être un bon bourgeois de Paris vivant de mes rentes, que d'être Roi d'Angleterre. Ce rang-là lui coute de grandes peines. Une marque bien fûre de la grandeur du Roi, c'eft tout ce qu'il fairde

tous côtez, & entr'autres chofes le respect que les Suiffes ont pour la fortification d'Hunninghen. Leurs peres n'auroient pas été fi tranquilles en pareilles rencontres. L'Empereur a raifon pour fon propre irterêt d'affifter la Pologne; le Turc eft un dangereux voifin. Le Roi de Dannemark a envoyé un beau prefent au Roi : ce font des oifeaux de leurre, qu'il envoyoit d'ordinaire à l'Empereur. Tous les hommages viennent maintenant à nôtre Maître de tous les endroits du monde ; & dans les refpects qu'on a pour lui, on ne diftingueroit pas les étrangers de fes fujets. Le Roi aura contentement fur l'article du traité qui regarde Charlemont. Sa demande eft jufte, & en l'état où font les affaires, les Efpagnols font bien heureux, que le Roi ne veuille que la justice.

CCCXV. LETTRE.

Du Comte de Buffy à Monfieur le Duc de Noailles.

A Paris, ce 17. Février 1680.

E ne sçaurois vous dire affez, Monfieur, combien la maniere honnête dont vous venez de me faire l'honneur de m'écrire,

m'a touché. J'y ai reconnu le cœur de M. vôtre Pere pour moi; & cela me fait prendre la liberté de vous fupplier très-humblement de préfenter au Roi la lettre que vous trouverez dans ce paquet pour Sa Majefté. C'eft Monfieur vôtre Pere qui a commencé de m'attirer des graces, je ne l'oublierai jamais ; & je puis vous affurer que depuis cinq ou fix ans j'en ai reçu beaucoup du Roi. Vous le connoîtrez, Monfieur, par la lettre que je me donne l'honneur d'écrire à Sa Majefté, que je vous conjure encore une fois de lui vouloir préfenter hors de l'embarras des affaires, & de me croire à vous plus qu'homme du monde, & vôtre, &c.

CCCXVI. LETTRE.

Du Comte de Buffy au Duc de

J

M....

A Paris, ce 3. Mars 1680.

E ne vous ai point encore entretenu, Monfieur, du détail de ma mauvaise fortune, quoique vous me faffiez l'honneur d'y prendre part; parce que quand cela eft inutile, on importune fon ami; & je ne yous dirois encore rien de l'état de mes

affaires

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affaires, fi le Roi ne m'avoit fait des graces depuis quelques années, qui m'ont marqué le radouciffement de Sa Majefté fur mon fujet. Depuis douze ans il m'a permis plufieurs fois de venir à Paris travailler à mes affaires, ne faifant cette grace à pas un éxilé qu'à moi. Il me donna une Compagnie de Cavalerie pour mon fils aîné, que je lui demandai en 1677. Et lui ayant demandé trois ou quatre Benefices depuis trois ans pour un fils que j'ai dans l'Eglife, Sa Majefté ne m'a point refusé en maniere d'exclufion, mais comme ceux de qui le rang n'eft point encore venu de recevoir quelque grace. Je croi même avoir trouvé dans le Pere de la Chaife un appui que je ne dois qu'à la pitié qu'il a des malheureux; car je ne le connoiffois point avant ma difgrace. Je vous dirai de plus que le Roi a eu la bonté de me faire dire depuis peu par Monfieur de Louvois qu'il étoit content de moi ; & par Monfieur de Saint-Aignan, qu'il auroit foin de mes enfans aux occafions. Voilà l'état de mes affaires à la Cour, Monfieur, que le tems, la bonté du Roi, & peutêtre ma conduite. ont rendu un peu meilleur, & qui affurément le deviendra encore davantage. Dans Fette confiance je me donne aujourd'hui Tome IV. Nn

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