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tres l'amitié d'Elizabeth, & tous lui propoferent des alliances.

Dès que Philippe Roi d'Efpagne eut apris la mort de la Reine Marie fon épouse & le couronnement d'Elizabeth, il se flatta de rentrer dans la poffeffion de l'Angleterre en faifant demander à la nouvelle Reine de s'unir à lui par ·les nœuds du mariage, & fe chargea d'obtenir la difpenfe du Pape pour cette union, qui n'étoit plus licite après avoir époufé la fœur. Elizabeth, avoit de fortes raifons pour ménager l'amitié de ce Prince. Elle lui étoit redevable de la vie; elle favoit que la France

follicitoit fortement le Pape de la déclarer bâtarde, Apne de Boulen fa mere n'aïant jamais été que la maîtreffe de Henri; elle n'ignoroit pas que les François vouloient faire passer la couronne d'Angleterre fur la tête de Marie Reine d'Ecoffe mariée au Dauphin; elle n'avoit d'autre reffource contre ces deux Puif-. fances que Philippe, qui feul pouvoit l'aider à deffendre fon Roïaume, acablé de dettes &

affoibli par la perte de plufieurs places importantes. Toutes ces confidérations demandoient qu'elle donnât sa main au Roi d'Espagne. Mais Elizabeth apréhendoit d'avoir un

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maître ou un égal en prenant un époux. Elle reçut obligeamment les propofitions de l'Ambaffadeur; elle demanda du tems pour se déterminer, & infenfiblement, fans avoir aucun mauvais procédé avec le Prince, elle le fit changer de réfolution en fe déclarant pour le Proteftantifme.

Ce n'eft pas que cette jeune Princeffe fût infenfible aux paffions naturelles de l'humanité. Son cœur décéla plus d'une fois ce que la politique, la fierté & la Philofophie cherchoient à déguifer. Elizabeth étoit fort grande, & la nature lui avoit donné les traits & les graces de fa mere, dont la tare

beauté avoit fait la fortune. Ses yeux fans ceffe agités marquoient tout au moins autant de feu dans le tempéramment que de vivacité & de pénétration dans l'efprit. Les dons qu'une jeune perfonne a reçus de la nature, font la premiere chose qu'elle connoît, celle qu'elle fait mieux faire valoir, qu'elle étale avec plus de complaifance, & pour laquelle elle ne manque jamais d'éxiger des hommages. L'efprit fort d'Elizabeth ne le fut point affez pour la mettre à couvert de ce foible. Elle étoit convaincue de fa beauté, & le moïen de la flater étoit d'y paroître fenfible. Les Etats Généraux

des Pais-bas aïant envoié à Londres une grande Ambassade des principaux de la République, un jeune Hollandois, qui étoit à la fuite des Ambasfadeurs, le trouva à leur premiere audience vis-à-vis de la Reine, & dit à un Seigneur Anglois qu'il n'avoit point vû de femme plus digne de faire naître des feux dans le cœur d'un galant homme, & la conversation se soutint long-tems fur le même fujet. La Reine qui avoit eu les yeux attachés fur ces deux jeunes gens plus que fur les Ambaffadeurs, parce qu'elle les voïoit ocupés d'elle, fit venir l'Anglois après l'audience, & lui ordonna fous

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