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il leur dit, que l'affection qu'il avoit pour leur églife, lui avoit fait prendre un fi long terme, AN. 1103afin de faire un bon choix : puis prenant par la main Otton son chapelain, il leur dit : Voilà votre maître & l'évêque de Bamberg. Les deputez furpris le regardoient l'un l'autre, & les affiftans qui avoient efperé cette place pour eux ou pour les leurs, fembloient les exciter par leurs geftes & par leurs murmures à faire quelque remontrance. Ils dirent donc à l'empereur : Nous efperions que vous nous donneriez quelque perfonne de la cour, connuë & bien apparentée : car nous ne connoiffons point celui-ci. Youlez-vous fçavoir qui il eft, dit l'empereur: Je fuis fon pere; & l'églife de Bamberg doit être la mere. Nous ne changerons point: nous ne l'avons pas choifi legerement, mais après avoir connu fon merite par une longue experience, & nous le trouverons bien de manque quand nous ne l'aurons plus.

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Otton fe jetta aux pieds de l'empereur fondant en larmes, & les deputez accoururent pour le relever. Il réfufoit, difant, qu'il étoit un pauvre homme indigne d'une telle place, & priant que l'on choisît entre fes confrères quelque perfonne noble & riche. Voyez-vous, dit l'empereur, quelle eft fon ambition? C'est la troifiéme fois qu'il refuse. J'ai voulu lui donner l'évêché d'Ausbourg & enfuite celui d'Halberftat. Je crois que Dieu le refervoit à l'église de Bamberg. En parlant ainfi il lui mit au doigt l'anneau épifcopal & la croffe à la main ; & lui ayant ainfi donné l'inveftiture, il le mit entre les mains des députez, Otton eut bien de la peine à consentir, à caufe de la difpute touchant les inveftitures; & deflors il promit à Dieu de ne point demeurer évêque, qu'il ne reçût de la main du pape la confecration & l'inveftiture

C. 4.

reur,

du confentement & fur la demande de fon églife. AN. 1103. Il celebra à Maïence la fête de Noël avec l'empe& demeura à la cour environ fix femaines. L'empereur le fit conduire à Bamberg par les évêques d'Ausbourg & de Virsbourg, avec d'autres feigneurs & une nombreuse fuite; & il y arriva la veille de la Purification premier de Février 1103. Dès qu'il vit l'églife cathedrale, il defcendit de cheval, fe déchauffa, & fit le refte du chemin, marchant à pieds nuds fur la neige & fur la glace, au milieu du clergé & du peuple qui l'étoit venu recevoir folemnellement en proceffion. Peu de jours après, & avant toute autre affaire, il envoya à Rome des deputez avec une lettre au pape Pascal, où il lui déclaroit fa c. 5. foûmiffion & lui demandoit confeil. J'ai paffé, difoit-il, quelques années au fervice de l'empereur mon maître, & j'ai gagné les bonnes graces: mais me défiant de l'inveftiture donnée de fa main, j'ai refufé deux fois des évêchez, qu'il me vouloit donner. Il m'a nommé pour la troifiéme fois à celui de Bamberg; mais je ne le garderai point, fi votre fainteté n'a pour agreable de m'inveftir & me confacrer elle-même. Faites moi donc fçavoir votre volonté.

to. x. conc.

p. 688.

67.

Cette lettre fit grand plaifir au pape, parce qu'il y avoit alors peu d'évêques dans le royaume d'Allemagne, qui rendiflent à l'églife Roc. 6. maine la foumiffion convenable. Il fit donc réPafch. ep. ponse à Otton, le reconnoiffant pour évêque élû de Bamberg, lotant fa conduite & l'invic. 7. tant à venir hardiment à Rome. Otton fit telle diligence qu'il y arriva à l'Afcenfion, qui cette année 1103. étoit le feptiéme de Mai. Le pape étoit à Anagnia où il alla le trouver avec les députez de l'églife de Bamberg, qui le demandoient pour évêque. Otton raconta fidellement au pape la maniere de fon élection, & mità fes pieds

la croffe & l'anneau lui demandant pardon de. fa faute ou de fon imprudence. Le pape lui or- AN. 1103. donna de reprendre les marques de l'épifcopat; & comme il proteftoit toujours de fon indignité, le pape ajoûta: La fête du Saint-Efprit approche, il faut lui recommander cette affaire.

Otton étant retourné à fon logis, penfa toute la nuit & le jour fuivant à la difficulté des temps, aux perils des pafteurs, à l'indocilité des peuples; & après avoir mûrement déliberé, il réfolut de tout quitter & vivre en repos.comme perfonne privée. Il déclara fa résolution à ceux qui l'accompagnoient, & aïant pris conge du pape, il fe mit en chemin pour s'en retourner. Mais le pape lui envoïa ordre de revenir, en vertu de la fainte obéiffance: ceux de fa fuite le ramenerent; & il fut ordonné évêque de la main du pape, affifté de plufieurs évêques le jour de la Pentecôte, dixfeptiéme de Mai 1103. Le pape ne lui fit point prêter de ferment, quoiqu'il n'en difpensât alors aucun de ceux qu'il confacroit. Les évê-‹. r. ques de Bamberg avoient déja le privilege de la croix & du pallium comme les archevêques, mais feulement quatre fois l'année: le pape en ajoûta quatre autres en faveur d'Otton. Dans Pafc. epift. fa lettre à l'églife de Bamberg, il marque qu'il 8. l'a facré felon leur defir, & fauf le droit du métropolitain.

Il faut remarquer dans cette lettre & dans tout ce qui fe paffa à la promotion d'Otton, qu'il reconnoiffoit pour feigneur & pour empereur légitime Henri, quoiqu'excommunié & dépofé tant de fois par le pape Gregoire VII. & par fes fucceffeurs; & que fon fcrupule n'étoit point fondé fur le défaut de puiffance de la part de Henri, mais fur la cereinonie de l'inveftiTome XIV.

C

C. 9.

Vita c. 3.

P. 336.

ture, & l'abus qu'il en faifoit

empêchant AN.1103. d'autorité abfoluê les élections légitimes. Otton dans fa lettre au pape, ne lui diffimule pas qu'il a été long-temps au fervice de ce prince; & que c'eft de lui qu'il a reçu l'évêché. Il ne s'en accufa point étant en prefence du pape, & le pape ne lui en fit aucun reproche, ni à l'église de Bamberg qui reconnoiffoit Henri pour empereur. Cet exemple. & plufieurs autres du même temps font voir, qu'on ne laitoit pas d'être catholique & reconnu pour tel par le S. fiege, quoiqu'on n'executât pas à la rigueur les condamnations prononcées contre Henri. En un mot, que le pouvoir du pape fur le temporel des fouverains ne pafloit pas pour article de foi.

XXVI.

Commencement de S. Otton.

V. c. I.

&

Otton qui devint ainfi évêque de Bamberg, nâquit en Suaube de parens nobles, mais dont les biens étoient médiocres. Ils le firent étudier dès fa premiere jeuneffe, mais pendant qu'il étoit abfent fes études ils moururent, pour fon frere deftiné aux armes, lui envoïoit petitement dequoi fubfifter. Otten après les humanitez & la philofophie, n'aïant pas dequoi fournir aux frais des plus hautes études, & ne vou lant pas être à charge à fa famille, paffa en Pologne où il fçavoit que les gens de lettres étoient rares. Là il fe chargea d'une école, où inftruifant les autres & s'inftruifant lui-même, il acquit des richeffes & de l'honneur : il apprit auffi la langue du pais; & comme il menoit en même temps une vie pure & frugale, il fe fit aimer de tout le monde: à quoi fervoit encore fa bonne mine & fon exterieur avantageux. Ainfi il s'infinua dans la familiarité des grands, qui l'emploïerent à porter des paroles & traiter des af faires entre eux; & par fes députations il fe fit connoître au duc de Pologne, qui le goûta

Livre foixante-cinquilme
tellement, qu'il voulut en faire l'ornement de

fa cour.

AN. 1103.

Après qu'Otton s'y fut conduit fagement pendant quelques années, le duc perdit la femme, & on parla de le remarier. Otton propofa la fœur de l'empereur, & fut choifi lui meme pour en aller faire la demande : l'affaire réuffit, le credit d'Otton en augmenta, & il devint le médiateur entre l'empereur & le duc de Pologne. L'empereur aiant ainfi connu fon merite, le voulut garder pour lui-même, & le demanda à fa fœur & au duc, qui le lui accorderent, quoiqu'à regret. D'abord l'empereur l'occupa c.. à de moindre emplois, comme de reciter avec lui des pfeaumes & des prieres: enforte qu'Otton étoit toûjours prét à lui donner ion pleautier. Le chancelier de l'empereur aiant été éievé à l'épifcopat, l'empereur lui donna cette charge; & comme le bâtiment de l'églife de Spire n'avançoit point, il lui en donna le toin, & le chancelier fit notablement avancer l'ouvrage avec une grande diminution de dépenfe. Tel étoit Otton quand il fut promû à l'évêché de Bamberg.

XXVII.

Suite de

En Angleterre, incontinent après le concile de Londres, Roger nommé à l'évéché d'Herfort tomba malade; & fe voiant à l'extrémi- l'affaire té, il envoïa prier Anfelme de le faire facrer par terre. 'Angledeux évêques avant qu'il mourut. Anfeline Edmer, zà fourit de l'impertinence du perfonnage, & ne Novor... répondit rien. Roger étant mort, le roi don

na l'inveftiture de l'évêché à Reinelme chancelier de la reine ; & envoïa prier Anfelme de le facrer avec Roger nommé pour Salisberi, & Guillaume élu depuis long-temps pour Vincheftre. Anfelme répondit: Je facrerai volontiers Guillaume: mais pour les deux autres, je ne changerai point ce dont je fuis convenu avec le

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