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attirerent la haine de Matthieu Caryophylle & d'Allatius, des vers inju- Liv. VIII. rieux que le premier fit contre lui & des invectives outrées du fecond, CH. IV. qui marquoit même que le Patriarche de Conftantinople l'avait excommunié, ce qui ne paroît pas vrai, puifque les Grecs n'ont parlé de lui qu'avec de grands éloges. Mais Cyrille fe gardoit bien de dire que Coreffius avoit été appellé de Chio par une délibération fynodale du Clergé de Constanstinople, pour disputer contre Leger; qu'il agiffoit comme Théologien avoué par l'Eglife Grecque; ce qui ne pouvoit avoir été fait fans que Cyrille y eût confenti. Il lui a dit beaucoup d'injures en particulier; mais quand Coreffius rendoit compte publiquement de fa doctrine, qu'il combattoit celle des Calviniftes par fes Ecrits, qu'il fourniffoit de la matiere à Grégoire Protofyncelle fon difciple, & qu'il approuvoit publiquement fon ouvrage oppofé directement à la Confeffion de Cyrille celui-ci ne difoit mot, le laiffoit faire, & le louoit vraisemblablement devant fon Eglife. Trouvera-t-on en cette conduite de la fincérité & de la probité ?

Sur les

études fai

Cyrille ne pouvoit pas ignorer, que pour avoir été aux Ecoles que les Jéfuites avoient établies à Galata, & y avoir fait des études de Gram- tes dans maire & de Philofophie, on ne renonçoit pas à l'Eglife Grecque; puifque les Ecoles les Schifmatiques les plus emportés n'ont jamais empêché qu'on ne fré- des Jésuit. quentât ces Ecoles, où la Nation trouvoit un fecours dont elle manquoit. Il favoit bien que pour avoir étudié à Padoue, comme avoient fait plufieurs autres Grecs de fon temps, ils n'en avoient pas été moins attachés au fchifme; & il y long-temps que les Miffionnaires ont mandé à Rome qu'ils ne trouvoient pas de plus grands ennemis de l'Eglife Catholique, que ceux qui avoient été élevés dans les Colleges des Grecs, & autres dépendants de la Congrégation de Propaganda fide; jufques-là qu'on a Rel. MS. quelquefois délibéré s'il ne feroit pas plus avantageux de les fupprimer. Cerri On peut juger encore fur cela de la mauvaise foi de Cyrille, en décriant ainfi Coreflius fur un auffi faux prétexte : mais il avoit affaire à des gens bien crédules, & il abufoit de leur crédulité pour les éloigner d'un homme hardi & plus habile que le commun des Grecs; & qui pouvoit faire connoître les fourbes de Cyrille, fi la fatisfaction qu'ils avoient d'avoir beries converti un Patriarche de Conftantinople à leur Religion, ne les eût telle- pour éviment prévenus, qu'il leur fit croire tout ce qu'il voulut.

d'Urbano

Ses four.

ter de don

ner une

de fa Con

Dans une lettre au Miniftre Diodati, qui n'est qu'une réponse dont copie auon auroit mieux développé le myftere, fi ceux qui l'ont imprimée avoient thentique donné en même temps celle à laquelle répondoit Cyrille, on reconnoît feffion. que l'autre lui avoit représenté, qu'il feroit à fouhaiter que la Confeffion Déf. de la Perpét. de foi donnée à M. Haga fût légalifée, en quoi Diodati ne fe trompoit p. 26. Perpétuité de la Foi. Tome IV. Aaaa

LIV. VIII. pas. Cyrille, qui n'en vouloit rien faire, & il ne l'a jamais fait, le fatisfit, CH. IV. ou pour mieux dire, fe moqua de lui, en écrivant que fa Confeffion, après la publication qu'il en avoit faite, n'avoit pas befoin de légalisation,' fur-tout parce qu'il l'avoit avouée comme fienne, avec fermeté & intrépidité, devant l'Ambassadeur de France, ceux de Ragufe & plufieurs Evëques. Nous prouverons en fon lieu que ce fait étoit abfolument faux : & du vivant de Cyrille, peu de temps après fa mort & toujours depuis, les Grecs ont nié qu'il l'eût reconnue. Au contraire ils ont affuré, ce que ceux qui pouvoient en avoir été témoins affuroient encore durant l'Ambaffade de M. de Nointel, que Cyrille avoit toujours défavoué avec ferment que la Confeffion fût de lui. Il n'étoit pas croyable dans fa propre caufe; & même en toute autre chofe, lorfqu'il s'agit d'un fait public, il n'y a point de particulier qui puiffe être cru au préjudice de toute une Nation.

Il diffimule toutes

Voici une feconde imposture dans la même lettre: c'est qu'il affure les forma que fa Confeffion ayant été reconnue par lui, comme il le fuppofoit fauffelités né- ment, n'avoit pas befoin d'aucune autre légalifation. H falloit bien que ceffaires, Diodati, qui n'en favoit pas davantage, fe contentât de cette réponse : pour la légalifation. mais Cyrille favoit bien en fa confcience toutes les formalités qui étoient

requifes, afin que de pareils Actes euffent autorité, & fuffent regardés comme émanés du Patriarche; car les loix eccléfiaftiques & la pratique de l'Eglife de Conftantinople, auffi-bien que des autres Patriarchales, fur l'authenticité de ces Actes, étoit établie long-temps avant lui, & pratiquée fans aucune innovation. Si donc il eût été fincere, il auroit écrit de bonne foi à Diodati, que fon Ecrit qui contenoit fa Confeffion, n'étoit pas revêtu des formalités néceffaires ; & il lui auroit marqué, qu'il y auroit de grandes difficultés à en venir à bout, difant en même temps en quoi elles confiftoient. Il auroit pu ajouter qu'il fuffifoit aux Calviniftes d'avoir fa Confeffion écrite de fa main, qu'il reconnoîtroit toujours en cas qu'elle fût contestée. Tout au contraire, il dit fauffement qu'elle n'a pas besoin 'd'être légalifée, & que la reconnoiffance publique qu'il en a faite (ce qui n'étoit pas moins faux ) fuppléoit à la légalisation, ce qui étoit faux pareiltement. Mais il n'ignoroit pas que s'il eût voulu tenter de proposer fa Confeffion en plein Synode, ou engager les Officiers de la grande Eglife de la mettre par écrit, de la contre-figner & de l'enregistrer dans les Archives, il n'en feroit pas venu à bout: que non feulement fes ennemis particuliers, mais tous les Grecs bien intentionnés fe feroient foulevés, & l'auroient fait dépofer comme hérétique; outre que ceux qu'il trompoit, auroient reconnu que le nombre de ceux qu'il leur avoit convertis n'étoit pas tel qu'il leur faifoit croire.

atroce at

feffion à

P. 127.

Cette continuation d'impoftures, pour foutenir la principale, qui étoit LIV. VIII. celle de fa Confeffion, eft fi odieufe, fi indigne d'un Chrétien & d'un CH. IV. Impofture homme de probité médiocre, qu'il eft étonnant que ceux qui y prenoient intérêt n'ouvriffent pas les yeux, fur tout lorfqu'ils voyoient tous les tribuant jours ce Profélyte vivant comme à l'ordinaire dans la profeflion & dans cette Con l'exercice public de la Religion qu'il avoit abjurée entre leurs mains. Car l'Eglife ainsi qu'il paroît par la lettre qu'a donnée Hottinger, écrite de Rhodes, Grecque. il n'avoit pas moins renoncé aux erreurs de l'Eglife Romaine qu'aux fuperftitions de l'Eglife Grecque, qu'il a néanmoins pratiquées jufqu'à sa mort. Cependant cet enchaînement de crimes devient encore plus affreux par l'impofture la plus groffiere dont on ait jamais qui parler. Ce fut de donner cette fauffe Confeffion comme un expofé fincere de la créance de toute l'Eglife d'Orient. Il favoit affez que non feulement elle n'avoit jamais rien cru de femblable, mais que s'il eût publié ce qu'il avoit donné par écrit, elle fe feroit toute foulevée contre lui: fes propres panégyriftes avouent qu'elle lui fufcita de grandes perfécutions, & il avoit l'effronterie de la donner comme la créance commune de tous les Grecs. Syrigus s'éleve fortement en cet endroit, comparant cette impudence à Déf. de la celle d'une prostituée, & foutenant que jamais les Patriarches, les Mé- Perpét. tropolitains, ni les Synodes n'en avoient oui parler: qu'ainfi c'étoit la plus impudente calomnie d'attribuer à toute l'Eglife Grecque ce qu'elle n'avoit jamais connu fans le condamner. En effet, il n'y eut peut-être jamais d'impudence pareille; puifque ce n'étoit pas fur fon témoignage qu'on devoit apprendre la foi de l'Eglife Grecque, & qu'il n'étoit pas moins facile de reconnoître qu'elle croyoit tout le contraire, que de favoir qu'à Paris dans l'Eglife Métropolitaine on célebre la Meffe felon P'ufage des Catholiques, & non pas la Cene de Geneve. Voilà un des beaux endroits de la vie de ce Confeffeur du Calvinifme, fur lequel d eft étonnant que fes admirateurs ne difent rien car s'ils citent fur les autres articles l'autorité de M. Haga, ils ne le peuvent faire fur cet article ; puisqu'il a eu affez de foin de fa propre réputation, pour ne pas s'expofer à la dérifion publique, en certifiant que les Grecs croyoient tout ce qui eft exposé dans cette Confeffion. C'eft-là encore un point de morale où les Calvinistes auroient befoin de juftifier ceux de leur Communion. d'avoir reçu & approuvé un faux témoignage comme celui-là; puifque toutes les plaintes qui fe faifoient contre Cyrille à caufe de fa Confession, fignifioient affez l'horreur qu'en avoient tous les Grecs, & par conféquent qu'il étoit notoirement faux qu'ils euffent une femblable créance. Fauffeté Auf l'Auteur des Monuments a traité ce reproche d'une horrible calomnie du Synode de Jerufalem, quoique le titre feul & la premiere jet. A a a a 2

du Sr. A. fur ce fu

LIV. VIII période, marquent affez que Cyrille ne parle pas feulement en fon nom, CH. IV. mais au nom de toute l'Eglife Orientale. Le voilà donc encore coupable

Ses lettres

menteries

Letés.

d'une imposture groffiere; & d'autant moins excufable, que quand il auroit expofé fincérement ce que croyoient les Grecs répandus dans tout l'Orient, il ne pouvoit pas, comme il fit, parler en leur nom, fans avoir confulté les Synodes, les Patriarches & les autres Eccléfiaftiques, ce qu'il n'a jamais fait. S'il leur avoit jamais présenté cette Confeffion, auroit-il pu la défavouer avec ferment comme il fit toujours ?

Ses lettres, fi on les examine en détail, font pleines de menteries: pleines de car par exemple dans celle qu'il écrit aux Genevois, il dit que Leger & de fauf- a converti plufieurs perfonnes par fes Ecrits & par fes Prédications à la lumiere, & qu'il a couvert fes adverfaires de confufion. On ne peut néanmoins nommer un feul de ces Grecs convertis, qui ait foutenu sa Confeffion; ni de fon vivant, ni après fa mort. Aucun Prêtre ou Evêque n'a été cité, ni dépofé, ni excommunié pour ce fujet. Il falloit donc que tous fiffent comme lui, qu'ils fuffent zélés Calviniftes en particulier, & qu'ils exerçaffent publiquement comme lui la Religion Grecque. Leger confondit fi peu les adverfaires de Cyrille, que Coreffius lui tint tête, & le réfuta très-solidement, fuivant le témoignage des Grecs. L'affectation avec laquelle ceux qui ayant produit tant de lettres inutiles, ont fupprimé tout ce qui avoit rapport à cette difpute, jufqu'à n'en pas faire la moindre mention, peut donner à penser qu'elle ne fut pas fort à leur avantage. Il faudroit être bien crédule, pour s'imaginer que Leger fût un Controverfifte plus redoutable que les autres. Ainfi on n'a pas de peine à juger de ce qu'il pouvoit dire pour foutenir les opinions de fa fecte, & les Grecs en favent affez pour ne pas craindre de pareilles objections.

fion en

public.

Sur tout Puifque ce qu'il mande à Diodati touchant la reconnoiffance qu'il fit qu'il a reconnu fa de fa Confeffion devant M. le Comte de Marcheville, que le Sieur A. Confef- appelle ridiculement le Comte de Marfeille, n'est établi que fur fon témoignage propre, nous mettrons ce fait au nombre de toutes fes autres fauffetés. Il eft vrai que cet Ambaffadeur le preffa de fe déclarer, ce qu'on ne voit pas que Cyrille ait fait jamais. Les Grecs qui étoient fous la protection de ce Miniftre, pour fe mettre à couvert de la tyrannie de ce malheureux, auroient eu de quoi le convaincre, non feulement d'héréfie, mais de faux ferment, s'il avoit fait cette déclaration : & ce ne fut que par le défaut de pareilles preuves, qu'il rompit le deffein que les Grecs avoient formé de le dépofer juridiquement, comme hérétique. Ils favoient affez qu'il l'étoit ; mais ils ne pouvoient pas le prouver. Quand ils auroient eu un original de fa Confeffion fignée de fa main, comme il dit qu'il en avoit figné plusieurs copies, il le pouvoit défavouer, ayant une raison

très-spécieuse, qui étoit que les Ecrits des Patriarches devoient être don- Liv. VIII. nés en une autre forme, contre-fignés & enregistrés, afin qu'on y pût Cн. IV. ajouter foi.

On ne

fier fon

Enfin quand Cyrille auroit été fincere, & fi les mauvaises réponses de fes Apologistes pouvoient le juftifier, que peuvent-ils dire de fa conduite peut jufti. pour parvenir au Patriarchat de Conftantinople, pour s'y maintenir, & ambition. pour faire chaffer fes compétiteurs? Ils ofent le comparer aux anciens Peres trouvent-ils qu'il ait imité S. Grégoire de Nazianze, qui pouvant se maintenir dans la même dignité, aima mieux y renoncer, que de troubler la paix de l'Eglife? Pourquoi Cyrille n'en faifoit-il pas autant ? 11 avoit encore une raison plus preffante de le faire, puifqu'indépendamment de la violence qu'on lui faifoit, il auroit dû fe retirer de lui-même d'une Eglife toute corrompue, comme il l'a dépeinte, & dans laquelle on adoroit les Idoles, ce qu'il avoit l'effronterie de dire & d'écrire, mais à des Hollandois, à des Genevois & à des Anglois, fans faire réflexion qu'il attribuoit dans fa Confeffion, une doctrine toute différente à cette même Eglife, en forte que fi ce qu'il y a mis fur le culte des Images eft la créance des Grecs, il étoit un calomniateur de leur reprocher l'adoration des Idoles: finon il étoit un impofteur.

Calvinift.

On dira peut-être qu'il l'auroit affez fouhaité, mais que les vœux Vaine ré publics de tous les véritables Grecs le forcerent à ne pas abandonner fon pofe des Eglife à des fcélérats, qui ne fongeoient qu'à la déchirer & à la réunir avec Rome. C'est ainfi qu'en parlent Hottinger & M. Smith, fans autre fondement, finon qu'il le difoit & qu'il l'écrivoit. Nos Auteurs affurent au contraire qu'il employa tous les artifices, toutes les violences & toutes les mauvaises voies pour fe maintenir & fe rétablir. Si les Calviniftes rejettent leur témoignage, nous fommes encore plus en droit de rejetter celui de Cyrille en fa propre caufe, de Leger & même de M. Haga, dont toutes les relations ne font fondées que fur des récits. Ce font donc les Grecs qui doivent en être les juges ; & fur cela ils femblent être partagés. Car il y en a quelques-uns, qui exagerent les cruautés & les Phil. Cypr. mauvaises pratiques de ceux qui le dépofféderent, en quoi ils ont eu peut- Nathanael être raison. Car nous ne prétendons pas que Grégoire d'Amafie, Anthime d'Andrinople, Cyrille de Berroée, Athanafe Patellarus, & Néophyte d'Héraclée, qui lui difputerent le Patriarchat, fuffent des Saints, quoiqu'ils puffent paffer pour tels en comparaifon de Cyrille Lucar. Ils étoient concuffionnaires & fimoniaques, ils avoient donné de l'argent pour obtenir le Patriarchat: il n'avoit rien fur cet article à leur reprocher, puifqu'il en fit autant & même plus qu'aucun n'avoit jamais fait, felon le témoignage des Grecs. Mais au moins ils n'avoient pas deux Religions comme lui.

Con. Hott.

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