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C'est une voie extraordinaire que qui nous tire de la vie commune; & quand on embraffe la vie cénobitique (1), on doit craindre que ce ne foit une illufion, ou un motif dicté par la pareffe ou la pufillanimité.

J'honore les bons Solitaires : mais s'ils peuvent en quelque façon être utiles au bien commun, il n'en faut qu'un très-petit nombre.

Outre qu'il eft fort difficile de trouver beaucoup de Religieux fervens, on doit craindre d'appauvrir l'Etat en fe rendant inutile à la Société. Nous ne naiffons pas Moines (2), & nous naiffons Citoyens.

Le monde a besoin de fujets qui

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(1) Cénobitique. Kowds, communis, commun, Bíos, vita, vie, parce que dans les couvens les Religieux vivent en commun & different en cela des Anachoretes, qui vivent feuls. Avaxapia, recedo, je me retire. Xapia, accedo, j'approche, dva, retrò, en arriere.

(2) Moine. Movaxos, folitarius, folitaire. Moves, folus, feul. Le nom de Moine ne convient proprement qu'aux Anachoretés, qui vivent feuls. Ceux qui vivent dans des couvens, devroient être appelés Cénobites. Voy.la Note précédente.

concourent à fon harmonie, & qui faf fent fleurir les Empires par leurs talens, leurs travaux & par leurs mœurs.

par

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Ces folitudes profondes, où l'on ne donne extérieurement aucun figne de vie, font exactement des tombeaux.

Quand vous ferez dans le couvent le plus auftere, vous prierez Dieu nuit & jour, il eft vrai : mais ne pouvez-vous pas continuellement élever vos cœurs vers lui, quoiqu'au milieu du monde, ou au fein de votre famille?

Ce ne font pas les prieres vocales qui font le mérite de l'oraison, ni la multiplicité des mots qui nous obtiennent les fecours de notre Créateur.

Le relâchement des monafteres eft venu de ce qu'on y a trop multiplié les offices, que les Religieux ont abandonné le travail des mains, & que les couvens font devenus trop riches. L'attention ne peut fuffire à des prieres trop longues : le travail des mains est plus avantageux pour l'efprit & pour le corps, qu'une continuelle pfalmodie; & la richeffe des Moines eft un contrafte fingulier avec la pauvreté dont ils font profeffion."'

Le monde n'auroit pas tant crié contre les Moines, s'il les eût vus. continuer

de s'appliquer à des travaux utiles. On bénit encore la mémoire de ces Solitaires refpectables, qui défricherent les campagnes & enrichirent les villes de favantes productions. Mais ces temps n'exiftent plus; & au lieu de ces hommes laborieux & utiles à la Société, les maifons monaftiques ne préfentent plus qu'une multitude de gens oififs, ennuyés d'eux-mêmes, & prefque inutiles à leurs concitoyens (1).

Du Hafard.

LE hafard eft ce qui femble arriver fans aucune combinaison, ce qui ne paroît point dans l'ordre des chofes. Ce mot vague préfente cette idée à notre efprit, parce que notre imagination & nos fens ne peuvent fouvent faifir la fuite des chofes & leurs combinaisons. Mais tout dérive de principes: tout ce qui arrive eft produit par des causes,

(1) Les objets des pensées précédentes font tirés en partie des premieres Lettres attribuées au Pape Clément XIV, Ganganelli. Mais j'ai cru à propos de les préfenter ici d'une maniere différente.

dont les effets fe combinant d'une infinité de manieres, occafionnent d'autres effets, dont quelques-uns nous paroiffent fortuits, quoiqu'ils ne puiffent l'être. Pour qu'il arrivât un hafard, il faudroit qu'une puiffance étrangere, errant dans l'Univers fans aucun deffein, vînt furnaturellement troubler & faire changer l'ordre des chofes & des événemens : ce qui eft abfurde.

Du ton de la voix.

Le ton de la voix marque prefque toujours le caractere de la perfonne qui parle.

La voix aigre eft un figne de préfémption & d'opiniâtreté.

Une voix rauque ou groffe par excès, montre un efprit épais & ruftique. La voix mâle & argentine, un efprit généreux & magnanime.

L'efféminée, un homme lâche &

mou.

La voix douce, & forte, un homme bon, jufte & droit.

La flexible, un homme fouple & adroit.

La voix brouillée, un efprit qui n'est pas net dans fes conceptions.

Celle qui eft trop lente, un pareffeux.
La précipitée, un étourdi.

Et lorfqu'elle eft prompte & embarraffée, elle dénote un brouillon.

Moyen de fe faire aimer.

Avec de la vertu, de la capacité & une bonne conduite, on peut être infupportable.

Les manieres que l'on néglige comme de petites chofes, font fouvent ce qui fait les hommes décident de nous que en bien ou en mal. Une légere attention à les avoir douces & polies, prévient leurs mauvais jugemens.

Il ne faut prefque rien pour être cru fier, incivil, méprifant, défobligeant. Il faut peut-être encore moins pour être eftimé tout le contraire.

De l'Amitié.

L'AMITIÉ eft une affection réciproque entre des perfonnes qui fe trouvent naturellement unies par une conformité d'inclinations, de caracteres, de goûts, de maniere de penfer & d'agir, ou d'autres chofes femblables. Elle eft foutenue

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