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CHAPITRE III,

Des paroles & des actions qui composent
la Meffe.

Les se lux actions qui viennent d'étre mat

A Melle ne confifte pas feulement aux paro

quées fuccinctement dans le Chapitte précé dent; il y entre encore d'autres actions par rapport à de certaines paroles, & d'autres paroles par rapport à de certaines actions, comme nous verrons plus précisément quand nous viendrons au détail des Cérémonies. Je veux dire, qu'ou. tre les paroles & les actions principales de la Meffe, le Prêtre y fait encore quelquefois des. actions & des mouvemens de la tête, de la bouche, des yeux & des mains, en un mot, des geftes, felon que le demandent certaines paroles qu'il prononce; & que d'autrefois il y employe auffi des paroles, fuivant que l'éxige la nature de certaines actions :conformant ainfi d'un côté des actions aux paroles, & de l'autre des paroles aux actions (1). Et voila en deux mots fur quoy femblent rouler toutes les actions & toutes les paro. les de la Meffe, que j'appelle acceffoires & de bienséance, comme n'étant point du fond, ni, pour ainfi dire, de l'effence de la Meffe, ni même de fon intégrité originaire & primordiale. Il en va de même du refte des Divins- Offices, de l'adminiftration des Sacremens, de l'Ordination des Prêtres, de la Confécration des Evêques, des Vierges, des Rois, de la Dédicace des Eglifes, de la Bénédiction des Abbez & des Abbêffes, des Cloches,

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Cloches, & généralement de tout ce qui compofe le culte fenfible & extérieur de la Religion: où nous pourrons montrer ailleurs, que d'une. part les paroles ont fouvent introduit des actions; comme d'autre part les actions ont auffi à leur tour amené quelquefois des paroles. Et c'eft ce concours & ce perpétuel commerce d'actions & de paroles, cette liaison des unes avec les autres, qui paroît avoir donné lieu à la plupart des Prattiques, des Rits, des Ufages & des Cérémonies de l'Eglife. Origene, en fon Homelie 5. fur le Livre des Nombres, femble en effet réduire-là toutes les Cérémonies de la célébration de l'Eu

caristie & du Baptême: Euchariftia five percipienda, five, eo ritu quo geritur, explicanda; vel eorum que geruntur in Baptifmo, verborum geftorumque & ordinum atque interrogationum & refponfionum, quis facilè explicet rationem? Mais il faut examiner tout cecy en détail par rapport à la Meffe, qui eft quant à préfent le fujet que nous nous fommes propofez de traitter. Nous parlerons d'abord des actions qui accompagnent les paroles; puis nous viendrons aux paroles qui font jointes

aux actions.

SECTION I
I.

Des actions qui accompagnent les paroles.

I.

Ous venons de marquer que felon ce què demandent certaines paroles à la Messe, le Prêtre fait quelquefois des actions & des Tome 1.

K

mouvemens, des poftures, & des geftes (a); qui ont rapport au difcours, qui naiffent des chofes mêmes qu'on récite, & qui font comme une autre espece de langage tres-expreffif, qui vient encore au fecours des paroles & qui en dit autant qu'elles (b). C'eft qu'en effet l'homme aime naturellement à repréfenter ce qu'il dit, & à l'accompagner de fignes extérieurs, d'actions & de mouvemens qui conviennent au fujet dont il parle, qui rendent & expriment le fens même & la fignification des mots & des termes, & qui retouchent & repeignent, pour ainfi dire, les idées & les chofes déja fignifiées par les mots; ce qui donne conftamment plus d'énergie & de force

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(a) C'eft ainfi que le Miffel de Sarisbéry (dans la Province Ecclefiaftique de Cantorbery en Angleterre) appelle la plupart des actions & des mouvemens du Prêtre & du Choeur à la Meffe des geftes. Par exemple, en parlant de l'inclination qui fe fait quelquefois par ceux du Choeur vers l'Autel, comme auffi en marquant en quelques occafions le Signe de-la-Croix, il dit que dans toutes les Fêtes de l'année, le Choeur fera le même gefte, gestum hunc. Et en prescrivant aux Diacres & aux Soudiacres fubalternes, de fe conformer au Diacre & au Soudiacre en chef, il s'exprime encore ainfi : cateris omnibus Diaconis & Subdiaconis, geftum principalis Diaconi & principalis Subdiaconi imitantibus.

Le Miffel de Strasbourg parle auffi en ces termes, des mouvemens qui accompagnent les paroles, & généralement de toutes les actions que fait le Prêtre à la Meffe, Sacerdos geftus valdè compofitos habeat ac devotos.

(b) Le Manuel de Bourdeaux de 1611. marque pofitivement dans l'Exhortation prise du Catechifme du Concile de Trente, fur le Baptême,,, qu'il fe fait plafieurs Cérémonies dans l'adminiftration de ce Sacre

,, ment, afin que ce qui a été dit, ne foit pas feulement déclaré par parole, mais auffi mis par l'action même " devant les yeux, afin que cela s'imprime mieux dans la mémoire.

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8.

aux expreffions de la voix, foutient ces expreffions, & les rend plus animées & plus fenfibles. On ne s'explique pas feulement par des paroles, сс L. 1. du S. dit Scortia Jéfuite, à l'occafion du Signe-de-la- Sacrifice de Croix, mais encore par des fignes & par des « la Meffe. c. geftes. Nous avons vu, par exemple, fur les, Remarques du Chapitre précédent, que du temps de S. Auguftin, lorfqu'on prononçoit dans l'Eglife le mot de confiteor ou celuy de confeffio; les auditeurs croyant qu'il s'agiffoit de confeffion. fe frappoient auffi-tôt la poitrine *, fuivant la coutume de ceux qui confeffoient alors leurs pechez: tant ce frappement de poitrine eft naturel en tout homme repentant (a); & ainfi des nebre de Pulautres geftes & mouvemens du corps. Origene, cherie, pectus parlant des actions qui accompagnent la priere, berare s'explique en ces termes : « Quoique l'on puiffe prier en mille différentes poftures, il ne faut... point douter que d'étendre les mains en éle.. vant les yeux au Ciel, ce ne foit la plus con- « venable de toutes; dautant que cette attitude a exprime en quelque forte fur l'extérieur du

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(a) On fe frappe la poitrine quand on a le cœur contrit. Aug. in Pf. 31.

Se frapper la poitrine, qu'eft-ce autre chofe que découvrir & condamner le mal qui étoit caché dans le cœur, & fe punir extérieurement foi-même, d'un peché fecret : 1d. Sérm, 67.

Nous nous frappons la poitrine, pour montrer que les pechez que nous avons commis, nous déplaifent. Nicol. 1. ad confult. Bulgar. c. 54.

Le frappement de poitrine eft comme le figne naturel de la componction du coeur. Suarez.

Naturellement on fe frappe la poitrine en figne de pé-. nitence. Bellarmin.

Cela fe fait par un mouvement naturel, dit le Cardinal

Bena.

ce que S. Grégoire de Nazianze ap

pelle dans

l'Oraifon-fu

manibus verTM

corps, les difpofitions où doit être l'ame pen dant l'Oraifon Tel eft donc depuis plufieurs fiecles, l'usage conftant & presque uniforme de toutes les Eglifes,d'accompagner & de revêtir, pour ainfi dire, les prieres & les paroles de la Meffe, d'actions & de mouvemens propres,convenables & proportionnez ( a ); ce qui fait même, au fenIn 3. part. timent de Suarez, une forte de grace & de beautom.. difp. té, & donne je ne fcay quel agrément: comme 48. fect. I. »lorfque le Prêtre fe frappe la poitrine au mea 'culpa du Confiteor, ou qu'il joint les mains,en difant in unitate ou per Dominum noftrum J. C. à la »fin d'une Oraifon ; & ainfi de plufieurs autres. Le même Suarez rapporte encore à une des regles de la bienséance, de ne pas tenir une main en l'air, ainfi que le défendent en effet les Rubriques,, tandis que l'autre eft en mouvement & occupée à faire quelque chofe. Quand il eft »marqué, dit cet Auteur, que le Prêtre faifant le Signe-de-la-Croix de la main droite, doit >porter la gauche à la poitrine, il paroît que »c'eft feulement pour une plus grande décence. Et en un autre endroit,» Lorfque le Prêtre benit le pain & le vin, il pose la main gauche »fur l'Autel, parce que de cette maniere, fon » action se fait avec plus de facilité & plus de grace. Car enfin, il ne faut pas croire que toutes les Cérémonies de la Meffe repréfentent des Myfteres. Il y en a quelques-unes qui n'ont été inftituées que pour célébrer le S. Sacrifice. avec décence, avec dignité & avec toute la réverence qui luy eft due «. Et encore, Quand

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(a) On voit communément que ceux qui parlent en public, comme fait le Prêtre à la Meffe, joignent toujours des geftes à leurs difcours.

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