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vant tous. Au lieu donc de vous montrer comme eux en public (1) avec un vifage pâle & défait, pour faire voir que vous jeûnez faites, s'il fe peut, en forte que tout le mon de juge à vous voir que vous ne jeûnez pas (2). Gardez-vous de ces faux Prophétes: ils femblent des brebis à les voir, & ce font en effet des loups dévorans (3). Ils prient dans les carrefours, ou debout dans les Affemblées , pour être remarqués de plus de gens: auffi je vous affure, que c'eft toute la récom penfe qu'ils en auront (4). Mais pour vous, quand vous voudrez prier, vous vous retirerez dans lieu le plus caché de votre Maison, & vous fermerez la porte fur vous, pour n'être vus que de celui que vous prierez (s). Demandez & il vous donnera; cherchez & vous trouverez; frapez, & il vous ouvrira. Qui de vous donne une pierre à fon fils, quand il lui demande du pain? Et fi, tout méchans que vous êtes (6), vous fçavez donner de bonnes chofes à vos enfans, quelle

CITATIONS.

(1) In propatulo. Matth. VI. 5.

(2) Unge capur tuum, & faciem tuam lava, ne videaris hominibus jejunans. ibid. 17.

(3) Inveftimentis ovium lupi rapaces. Matth. VII. 15. (4) In angulis platearum ftantes, Amen dico vobis, &c. Matth. VI. S.

(5) Qui vider in abfcondito. ibid. 4.
(6) Cum fitis mali. Matth, VII. 11.

apparence que votre Pere célefte vous refuse les vrais biens, fi vous les demandez ? Il fçait tout ce qui vous eft néceffaire avant que vous ouvriez la bouche (1) ; & vous n'avez pas befoin de lui faire de grands Difcours, comme ces Païens, qui croient qu'à force de paroles (2) ils obtiendront ce qu'ils defirent. Vous lui demanderez donc feulement (XLVII), que fon nom foit glo

CITATIONS.

(1) Scit quid opus fit vobis antequam petaris eum. Matth. VI. 8.

(2) In multiloquio fuo. ibid. 7.

REMARQUE.

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(XLVII.) Le Texte porte, Vous prierez donc ainfi ; mais il eft certain que le mot, dont le Traducteur Grec de S. Matthieu s'eft fervi, & qui répond au fic de la Vulgate fignifie plûtôt en ce fens dans cet endroit, qu'en ces termes; & c'est ce qui m'a donné la hardieffe de rendre ce qui le fuit avec la liberté que j'ai fait. S. Luc rapporte à une autre occafion cette Oraison admirable. Il dit que le Fils de Dieu l'enfeigna à fes Difciples, une fois qu'ils lui demandérent comment il falloit prier. Si j'avois fuivi cet Evangélifte en ce point, je me ferois cru obligé à la traduire plus littéralement; mais la mettant comme j'ai fait après S. Matthieu dans le Sermon fur la montagne, j'ai cru qu'il m'étoit permis de la tourner de la même maniere que le refte de cet excellent Difcours. J'ai feulement obfervé de conferver les fept demandes dans leur ordre. La troifiéme même, que faint Luc a fuprimée comme comprise dans les précédentes, n'eft confondue ici avec la feconde, que quant à la phrafe, & point du tout quant au fens ; & fi j'ai lié comme on voic la derniere, que S. Luc a encore fupprimée, avec la pénultiéme, je n'ai fait en cela que fuivre le fentiment de plufieurs Interprétes célébres, qui

rifié, que fa puiffance & fa volonté foient auffi abfolues fur la Terre qu'elles le font dans le Ciel, qu'il vous donne de jour en jour ce qui vous eft néceffaire, qu'il vous pardonne comme vous pardonnez, & qu'il rende vos forces victorieufes de vos tenta tions, pour vous préferver du plus grand des maux, qui eft le péché. Après cette prie re, ne vous inquieter point de l'avenir, cha que jour a fa peine, & en eft affez occupé fans prévenir celle du lendemain (1). D'ail leurs, nul ne peut fervir deux Maîtres. Si on contente l'un, on néglige l'autre ; & tant que vous fongerez aux richeffes, vous ne pen Jerez guéres à Dieu. Les Oiseaux de l'Air ne fement, ni ne moiffonnent; & il ne laiffe

CITATION.

(1) Craftinus dies follicitus erit fibi ipfi, fufficit diei maș liria fua. Matth. VI. 34.

REMAR QUE.

conviennent que le fed qui eft entre deux eft effentielleanent relatif à la précédente, pour ne point parler de ceux qui ne font qu'une feule des deux. Il paroît même par ce qui nous refte des Ecrits des anciens Hébreux, que cette Priere merveilleufe n'eft qu'un ramas en racourci de ce qu'il y avoit de meilleur dans toutes les leurs. Mais avec tout cela, je ne crois pas que ces libertés, que je me fuis données en la rapportant dans un Sermon, fuffent fupportables en priant, comme S. Auguftin le prétend dans fon Epitre CXXI. à Proba: Liberum quidem eft aliis arque aliis verbis eadem tamen que hac oratio continet in orando dicere, fed non eft liberum alia diversa feu contraria dicere.

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pas de les nourrir. Ne valez-vous pas mieux qu'eux? Voyez croître les lis des champs (1). Ils ne travaillent, ni ne filent. Cependant, Salomon dans fa plus grande Pompe ne fut jamais fi bien vêtu (2). Cherchez donc uniquement à plaire à votre Pere, & tout le refte ne vous manquera pas.

Ce Difcours achevé, il rencontra, en defcendant de la Montagne où il l'avoit fait, un lépreux qu'il guérit en le touchant. Il lui défendit d'en parler à perfonne qu'aux Sacrificateurs (XLVIII), en offrant ce que la Loi ordonnoit en ces occafions, pour fervir de reconnoiffance (XLIX). Ensuite, comme il entroit à Capharnaum, un Centenier, qui

CITATIONS.

(1) Confiderate lilia agri quomodo crefcunt, Matth. VI, 28. (2) Nec Salomon in omni gloria fua coopertus eft ficut A unum ex iftis, ibid. 20.

REMAR QUE S.

( XLVIII.) Parmi les Hébreux, comme parmi les Egyptiens & nos anciens Gaulois, les Sacrificateurs étudioient auffi en Médecine, & celui de tous qui y étoit le plus favane étoit cominis pour examiner les Lépreux, qui fe venoient préfenter, & qui prétendoient être guéris. Il fortoit pour cet effet de l'enceinte du Temple, parce qu'ils n'y pouvoient pas entrer, jufqu'à ce qu'il eût jugé qu'ils l'étoient effectivement.

(XLIX. ) C'étoit d'abord deux Moineaux, entre autres chofes, & huit jours après deux Agneaux ; ou, file Lépreux étoit pauvre, un feul, avec une couple de tourte relles, ou de colombes,

avoit ouï parler de lui, le fit prier par les principaux Juifs de la Ville, de guérir le plus cher de fes Domestiques (1), qui étoit malade à l'extrémité. On lui exagéra fort le mérite de ce Païen, qu'il aimoit beaucoup la Nation, & qu'il leur avoit même fait bâtir une Synagogue (2). Jéfus fe mit en chemin, pour aller chez lui; mais cet homme, l'ayant fçu, envoya de fes Amis au-devant de lui comme il n'étoit plus guéres éloigné, pour lui dire, qu'il ne prît pas la peine d'entrer dans fa Maison (4): que bien loin de se croire digne de cet honneur, il n'avoit pas feulement ofé venir lui-même à fa rencontre; mais que fi lui, qui n'étoit qu'un homme fil ordinaire foumis à d'autres, n'avoit pourtant qu'à commander à ceux qui dépendoient de lui pour être obéi auffi-tôt, à plus forte raifon le Seigneur n'avoit qu'à dire une seule parole, & le malade feroit guéri (4). Ce Discours donna de l'admiration à Jéfus (5);

CITATIONS.

(1) Servusqui illi erat pretiofus. Luc. VII. 2.

(2) Rogabant illum follicitè dicentes, Dignus eft ut hoc illi praftes, diligit enim gentem noftram & Synagogam adificavit nobis. ibid. 5.

(3) Noli vexari, ibid. 6.

(4) Et meipfum non fum dignum arbitratus ut venirem ad te; fed dic tantum verbo, & fanabitur puer meus: nam & homo fum fub poteftate conftitutus habens fub me milites, &dico huic, Vade & vadit, & alii, Veni & venit, & ferve meo, Fac hoc & facit. ibid. 7, 8.

ego

(5) Miratus eft. ibid. 9.

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