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Nous avons deux traductions Fran

çoises de la differtation de M. Nicole; ECRITS
mais aucune n'est complette: chacun SUR L'EPI-

des deux traducteurs s'est donné la li-
berté d'ajouter à l'original, ou d'en re-
trancher quelque chose.

Le nom de Costar qu'on lit dans la
premiére préface du recueil des plus
beaux endroits de Martial, imprimé
avec cette traduction, a fait donner
celle-ci à Coftar lui-même. Mais l'a-
vertissement qui est au-devant de cette
traduction annonce un autre Auteur qui
n'est désigné que par ces lettres L. S.
G. L.A. C. On ajoute que cette tra-
duction n'avoit pas été faite pour être
mife au jour, & que celui qui en est c
l'Auteur, ne l'entreprit que pour im- c
primer plus fortement dans sa mémoi- «
re les excellentes remarques dont la c
dissertation Latine (de M. Nicole)
est toute remplie. » Le traducteur vi-
voit en 1689. puisque le Libraire dit,
qu'il l'honoroit de son amitié, & que
c'étoit par cette raison qu'il lui avoit
permis de faire imprimer sa traduction.
Or Coftar étoit mort dès le 13. de Mai
1660. L'Auteur, quel qu'il foit, avoit
pouffé trop loin la complaifance pour
Lon Libraire. Il devoit se contenter

GRAMME.

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de l'usage qu'il avoit fait de fa traducECRITS tion, ou s'il vouloit la rendre publique, il falloit la revoir, & la corriger avec

SUR L'EPI-
GRAMME.

exactitude.

La seconde traduction fut donnée avec un Recueil des plus belles épigrammes des Poëtes François depuis Marot jusqu'à présent, c'est-à-dire, jusqu'en 1698. que ce recueil parut. Le traducteur prend le nom de Claude-Ignace Breugiere de Barante, & fur la foi de plusieurs personnes, j'avois cru que c'étoit un nom supposé, sous lequel Pierre Richelet avoit voulu se cacher. C'étoit une erreur dont j'ai été détrompé par M. de Barante lui-même, qui exerce encore avec beaucoup de diftinction la profession d'Avocat à Riom fa patrie. C'est donc à lui, & non à Richelet, que l'on doit le Recueil des plus belles épigrammes des Poëtes François depuis Marot, imprimé en 1698. de même que la traduction de la Differtation de M. Nicole, qui fait partie de ce recueil. M. de Barante entreprit cet ou vrage par le conseil de M. du Bois de l'hôtel de Guise, dont il étoit connu & ami. L'Auteur le présenta à Madame la Présidente de Crevecoeur, fille de M. le Chancelier Boucherat, pour obtenir

ECRITS SUR L'EPI

un privilége, & il y mit son nom tel qu'il est rapporté. La Dame qui honoroit l'Auteur de fa protection, se char- GRAMME. gea d'obtenir le privilége, à condition que dans le recueil d'Epigrammes qui suivoit la differtation traduite, il ne s'en trouveroit point qui offensassent les bonnes mœurs. Peu de tems après, M. de Barante fut obligé de revenir en Auvergne, & durant ce voyage, le privilége fut expédié, & l'ouvrage fut imprimé à l'insçu de l'Auteur. Voilà au vrai l'histoire de ce recueil.

La traduction de M. de Barante est plus exacte que celle de 1689. & moins défectueuse pour le style. Mais, comme je l'ai dit, elle n'est pas en tout conforme à l'original. Il faut s'en contenter, puisque nous n'en avons point de meilleure, ni de plus complette. Elle a été réimprimée en 1700. & depuis encore en 1720. dans le second volume du nouveau Recueil des Epigrammatistes François anciens & modernes, &c. publié en Hollande par M. Bruzen de la Martiniere.

Le pere Vavasseur, Jésuite habile, mais trop prévenu pour fon mérite épi grammatique, employa cinq chapitres fort longs de fon traité Latin sur l'épi

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ECRITS SUR L'EPIGRAMME.

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gramme, à cenfurer la differtation de M. Nicole, sans réüssir à en diminuer le mérite, ni l'estime que les personnes de goût ont toujours eu pour cet écrit. Peu content d'en reprendre avec amertume les sentimens, fur quoi il a quelquefois raifon, il en critique aussi avec chaleur la Latinité qui vaut bien la sienne. Comme on n'a point fait l'honneur à ce traité du pere Vavasseur de le mettre en notre langue, je suis difpensé de vous en dire davantage. Pour connoître plus particulierement ses opimions, lifés le Traité sur la composition de l'épigramme, que feu M. Bauderon de Senecé, premier Valet de Chambre de la feuë Reine, a joint à fon recueil d'épigrammes imprimé en 1717. L'ordre, l'économie, & les principales regles qu'on lit dans ce traité, sont tirées en effet de celui du pere Vavafseur. Ce que M. de Senecé paroît y avoir ajouté, interreffe peu, ou avoit déja été dit par Colletet, dont le pere Vavasseur avoit profiré lui-même.

En parlant des épigrammes de Ca tulle, M. de Senecé embrasse un sentiment qu'on pourroit lui contester. Il yeut que fi Ennius on Pacuvius euffent. composé de leur tems des épigrammes dans

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ECRITS

SUR L'EPI

Mém. de

1718. art. 46.

dans le goût de Catulle, elles euffent paru ridicules au tems où celui-ci vivoit. Oüi, fans doute, lui a-t'on ré- GRAMME. pondu; s'il est vrai que tout le mérite de Catulle consiste dans la beauté de fon élocution & dans la cadence de fes vers. Mais si des pensées ingénieuses & naïves font le caractere propre de ses Trév. O&ob. épigrammes, leur mérite est de tous les tems; il n'est point sujet aux changemens de la langue dans laquelle il a écrit. Il en est ainsi de Marot & de faint Gelais. Celles de leurs épigrammes qui font véritablement du style Catullien, c'est-à-dire, qui destituées de pointes, renferment une pensée agréable & naturelle, ne dégoûtent point les lecteurs d'aujourd'hui par la vieillesse de leurs expreffions. Il y a encore quelques autres endroits sur lefquels on pourroit former des difficultés dans le traité de M. de Senecé, qui d'ailleurs est un peu diffus, & trop chargé de digreffions & d'expressions métaphoriques.

Celui de M. le Brun, qui fert de préface au recueil de fes Epigrammes, Madrigaux & Chansons, imprimé en 1714. est plus ferré & plus méthodique. L'Auteur, de même que le pere

Tome III.

A

*P

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