ART POE TIQUE DES Ces éclaircissemens dont parle M. du Tremblay, font les longues remarques dans lesquelles M. Dacier a comme ANCIENS noyé chaque chapitre du petit traité d'Ariftote. Il y en a beaucoup d'utiles, qui montrent un homme bien inftruit de ce qu'il écrit. On peut dire même que beaucoup paroiffoient nécessaires pour éclaircir le texte de l'ancien philosophe. Mais outre que la morale ne s'y accor de pas toujours avec celle de l'Evangile, ce qui me paroît un grand mal, M. Dacier auroit pû, ce semble, abréger quelques-unes de ces remarques, & en retrancher plusieurs, fans nuire à l'intelligence du texte d'Ariftote. Je ne puis approuver ce qu'il dit pour en juftifier le nombre & la prolixité, qu'elles paroîtront courtes, eû égard aux gros volumes qui ont été compofés fur ce petit traité: qui l'obligeoit à fe conduire par imitation? J'ajoute, que malgré même l'étenduë de fon commentaire, il a encore laiffé dans fon Auteur plusieurs endroits obfcurs qui ont eu besoin des lumieres d'autres critiques, comme vous vous en convaincrés aisément, fi vous voulés lire P'explication & la correction d'un passage du septiéme chapitre de la poëtique d'A ART POE TIQUE DES fuiv. riftote, données par M. l'abbé Vatry, & imprimées dans le tome 7. des Mémoires de l'Académie des infcriptions Pag. 182. & & belles lettres; l'explication de plufieurs passages du fixiéme chapitre, qui fe trouve au tome 3. des réflexions de Edit. de 1733. M. l'abbé du Bos, fur la poëfie & la peinture; quelques endroits de la differtation de M. l'abbé Terrasson sur l'Iliade; & peut-être d'autres encore qu'il me semble avoir lûs dans différens écrits dont je ne me rappelle pas le souvenir. L'art poëtique d'Horace, autre chefd'œuvre de l'antiquité, renferme dans moins de 500 vers, les regles principales de l'art de bien écrire. Ces regles y font fi générales, qu'elles inftruisent nonseulement ceux qui composent des livres, ou qui parlent en public, mais encore ceux qui veulent apprendre à bien juger des ouvrages d'autrui. Quelque matiere que l'on veuille traiter, on trouve à profiter des avis d'Horace, & à mettre en œuvre quelques-uns de fes préceptes. Voici en deux mots l'œconomie de ce poëme: je la tire de l'avertissement que M. Brueys a mis audevant de sa paraphrafe du même poёте. Horace se propose d'y traiter trois ART POETIQUE DES choses, qu'un ouvrage doit plaire à l'efprit, toucher le cœur, chatoüiller l'oreille. Il donne au commencement les ANCIENS. préceptes qu'il faut garder pour rendre un ouvrage agréable, afin de plaire à l'esprit: il enseigne ensuite ce qu'il faut observer pour le rendre pathétique, afin de toucher le cœur; il instruit enfin de ce que l'on doit pratiquer, afin qu'étant harmonieux, il charme l'oreille. Après qu'il a traité ces trois choses, non en rhéteur, mais en poëte; pour délasser le lecteur, & mêler l'agréable à l'utile, il fait l'éloge de la poësie, mais d'une maniere si admirable, qu'il porte les Ecrivains à aimer fes regles, les les engage à les observer, & leur inspire l'ardeur de s'élever à la perfection d'un fi bel art. Il donne ensuite des avis très-utiles, comme de prendre pour modéle les Auteurs qui ont le mieux écrit, d'employer beaucoup de tems & d'applica tion à ce que l'on veut produire; de consulter les gens éclairés, finceres, dé finterressés; & de se soumettre à leur critique sans prévention & fans opiniatreté. Il finit ce poëme par une raillerie contre les méchans Poëtes: & fait voir le destin fâcheux & d'eux & de leurs ouvrages, afin de perfuader davantage L ART POE combien il est important de garder tou TIQUE DES tes les regles qu'il a données. ANCIENS. Cet ordre, dont j'ai abrégé le plan, n'est pas divisé par sections, ni par cha pitres: Horace ne prend pas même la peine d'en avertir le lecteur : il regne néanmoins dans tout le corps du роёme; il fe fait remarquer à ceux qui le lisent avec quelque application. Je vous en préviens, parce que plusieurs Savans, dont je refpecte d'ailleurs l'autorité, ont cru que les préceptes contenus dans cet ouvrage, avoient coulé de la plume du Poëte fans ordre & fans liaison : jugement faux, contredit par beaucoup d'auJugem. des tres Savans, dont vous pouvés lire les Sçav. t. 3. in4. p. 281. & fentimens recueillis par M. Baillet. Le pere Rapin prétend que cet art l'art poëtiq, poëtique d' Horace n'est qu'une interprépréf. & dans tation de celui d'Ariftote, & que le le corps. fuiv. Réflex, fur Poëte Latin fut le premier qui proposa aux Romains ce grand modéle des Grecs. Je le crois comme lui. Mais l'ouvrage d'Horace eft beaucoup plus lû, & peutêtre eft-il aussi plus utile. C'est par cette derniere raison, sans doute, plus encore que parce que la langue dans laquelle il est écrit, a toujours été plus cultivée en France que le Grec, que cet ouvrage a trouvé chés nous un si grand nom bre de traducteurs. ART POÉTIQUE DES Charles Fontaine, Parifien, qui vivoit fous Henri II. fut le premier. Il le dit lui-même au commencement de ANCIENS. fon Quintil-Horatian, ou Quintil Cen- P. 155, 1566 feur, contre Joachim du Bellay, de l'édition de 1576. in-18. ce que je vous fais remarquer, parce qu'il n'en parle point dans quelques autres éditions de cette critique. Sa traduction libre & paraphrafée étoit en vers François. Il étoit fort jeune quand il la fit; il voulut fuivre un des plus judicieux préceptes de fon Auteur, de ne rien produire avec précipitation; il oublia presque son ouvrage; & ayant été prévenu par Jacques Peletier du Mans, il lui laissa la gloire d'être le premier, & pendant quelque tems le seul traducteur de l'art poëtique d'Horace. Cette traduction de Peletier est en vers François. J'en ai vû une édition de 1545. à Paris chez Michel de Vafcofan in-12. La Croix du Maine, dans sa Bibliotheque Françoi se, page 192. en cite une de 1544. & en effet le titre de celle de 1545. en suppose une antérieure. Ce titre eft : l'Art poëtique d'Horace traduit en vers par Jacques Peletier du Mans, recongnu par l'auteur depuis la premiere impreffion. MOINS ET MEILLEUR |