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,, que ce foit qui ait un plus libre accés que lui dans ,, cette maison. Elle y confentit d'autant plus volontiers, qu'elle ne douta point que l'Abbé ne fe fift un plaifir de contenter fa curiofité là-deffus, parce que n'aimant pas Gonin, il y trouveroit fa propre fatisfaction. Elle dit donc à fon amant qu'elle lui en parleroit: elle lui en parla en effet le même jour, fans pourtant qu'elle marquât qu'il s'agiffoit de fon interêt en particulier; mais elle montra feulement un ardent defir de s'éclaircir de ce qu'elle foupçonnoit de Gonin & de fa Maîtreffe, afin d'en faire ufage dans la fuite pour l'honneur de fon Maitre. Dorifton ne fit point du tout difficulté de lui donner ce contentement. Ils prirent donc jour pour cela, & Malnette & avertit Gonin. Celui-ci voyant que tout étoit prêt du côté de Malnet-. te, ou plutot du côté de Doriston, à qui il avoit principalement tendu ce piege, prit Biralle en particulier, &int ce captieux difcours: Mon ami Biralle,dit,, il, il me revient, que l'on interprête à mal les con,, verfations que j'ay avec Prianne, & les vifites fré,, quentes que je lui rends. Parce que je m'attens bien, qu'inceffamment un de ces gens qui font fi mal intentionnez contre moy,ne manquera pas de me ren,, dre odieux à ton Maître par cet endroit, comme fi ,,j'avois deffein de lier quelque commerce criminel avec fa femme, en lui faifant des rapports faux,pour le prévenir & lui donner une mauvaise idée de ma conduite, je te prie inftamment de me rendre un fervice qui m'aide à lui faire connoître mon innocence & la droiture de mes intentions; fans doute tu me connois affez pour me rendre plus de juftice, que tous ces mauvais efprits. Je ne m'adreffe qu'à toy, ,, parce que je fçay, que tu lui es tres-fidele ; & ainfi tu dois bien juger, que je n'exigeray rien de ta com,, plaifance & de ton amitié, qui foit contraire à ton devoir.Biralle à ce difcours, ouvroit de grands yeux, & fembloit n'avoir pas affez d'oreilles, pour écoûter.

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Ce que je te demande donc, continua Gonin, c'eft,, de faire à l'égard de Lucinor, ce que mes ennemis,, ne manqueront pas fans doute, de faire bien-tôt, je,, veux dire, de lui parler de moy, comme fi tu foup-,, çonnois, ainfi qu'eux,que mes entretiens avec Prian-,, ne lui duffent être fufpects, de l'exciter à s'éclaircir,, par lui-même de ce qui en ett, de lui dire qu'il n'aura,, pour cela, qu'à écoûter fans être vû, ce que nous,, dirons. Qu'il y a un recoin à la ruelle du lit de ta,, Maîtreffe, où il fe pourra cacher." Enfin il l'inftruifit parfaitement dele manége qu'il méditoit depuis fi long tems, & qu'il avoit deffein de mettre ce jour-là en execution. Biralle, après quelques petits raifonnemens qu'il fit felon fa portée, confentit à tout. Cela étant ainfi refolu, Gonin parvint parfaitement à fes fins; c'est-à-dire, que Dorafte & Lucinor devoient fe rencontrer, à peu près dans le même tems au même endroit, pour contenter leur curiofité; je dis, à peu près dans le même tems, parce que tout fut concerté avec tant d'adreffe, que Dorifton fe trouva le premier à la ruelle. Gonin, comme on doit croire, avoit pris toutes les mesures, pour ne fe trouver avec Prianne, qu'après que nos deux curieux feroient allez au rendez-vous; mais rendez-vous, ainfi qu'on doit croire encore, auquel ils ne s'attendoient pas de fe trouver enfemble. L'Abbé fut donc introduit par Malnette incognito dans la cachette, pendant que Lucinor & Prianne dinoient. Immediatement aprés le diné, Lucinor laiffa fa femme dans la fale où elle avoit quelque affaire, difant qu'il alloit fortir: mais au lieu de fortir, il fe rend promptement & auffi incognito dans cette fatale ruelle. Il leve la tapifferie, pour fe cacher dans le recoin qu'on lui avoit marqué,& que felon mes memoires, il ne connoiffoit point du tout auparavant. Quelle fut fa furprife, quand après avoir levé la tapifferie, il vit Dorifton plaqué contre le mur, comme s'il avoit pretendu perfuader qu'il étoit une partie du mur

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oujours fur des fujets qui ne tiroient à aucune confequence digne d'être remarquée. Dans le cours de leur entretien, il lui demanda fi Lucinor avoit dîné avec elle, & s'il étoit forti, elle répondit par un oui à lune & à l'autre queftion. Il demanda enfuite fi elle avoit veu Dorifton, elle dit qu'il étoit venu le matin, mais que fa vifite avoit été fort-courte. Puis prenant un livre qui fe trouva fur la table; voulez-vous Madame,„ dit-il, que je vous faffe la lecture de quelqu'une des, pieces qui font dans ce livre elle lui répondit qu'elle,, le vouloit bien, que cela les amuferoit; il en lût deux Comedies entieres. Enfin ils s'entretinrent à peu prés fur le même ton pendant plus de quatre heures; de forte que Lucinor eut le tems de fe bien ennuyer. Gonin prit congé & fe retira. Auffi-tôt que Prianne eut quit té fa chambre, l'ennuyé mary fe retira auffi de fa cachette, mais plein d'indignation contre Dorifton & d'eftime pour Gonin. Celui là fut banni pour toujours de chez lui ; & celui-ci y refta fi abfolu, que le mari & la femme ne faifoient rien fans fon confeil ou plutôt fans fa permiffion : ce qui dura affez long-tems pour bien accommoder fes affaires; car fon interêt étoit toûjours le premier mobile de toutes fes intrigues & de tous fes mauvais tours. Il fit en forte que Prianne fut justifiée, de forte qu'il perfuada que Dorifton étoit feul coupable par fes mauvais deffeins. Quant à Malnette le fourbe trouva bien-tôt moyen de la faire chaffer de

chez Lucinor.

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même! Quelle fut la confufioni de celui-ci, voyant qu'on le trouvoit dans une fituation, dont on ne pou voir donner qu'une interprétation fort mauvaife! Que faites-vous là, Montieur lui dit Lucinor è quel eft vôtre deffein ? à qui en voulez-vous ? ce n'eft pas affurement à moy, car vous ne m'attendiez pas. Non, Monfieur, répondit Dorifton, ce n'est pas à » vous que j'en veux : j'en veux au traître Gonin qui vous trompe, fans que vous vous en aperceviez: je ,, le foupçonne il y a long tems: je voulois connoître aujourd'huy fi j'ay raifon de le foupçonner, & en‐ fuite vous en rendre compte. C'est mon affaire, re,,pliqua Lucinor, d'avoir cette curiofité, c'eft moy feul qui ai droit d'épier la conduite de ma femme. Je ,, n'aime point qu'on prenne fi mal-à-propos mes interêts, je ne les trouverois pas affez bien entre vos ,,mains: retirez-vous promptement, & ayez la bonté de ne revenir ici que quand je vous en feray prier, Dorifton ne fe le fit pas dire deux fois; il fortit fur le champ confus & penetré de chagrin,

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Lucinor refta dans fa cachette, roulant dans fon efprit diverfes pensées, dont pas une n'étoit favorable au pauvre Abbé. La prévention où il étoit déja contre lui, jointe à la rencontre qu'il venoit d'en faire dans cette ruelle, ne devoit produire contre lui autre chofe qu'une tres-mauvaise opinion. Prianne arriva quelques tems après dans fa chambre, où elle refta feule pendant environ une heure, travaillant à un ouvrage de tapifferie qui étoit fon occupation ordinaire après qu'elle avoit rempli fes devoirs domeftiques. Gonin vint en fuite dans la maison, demanda d'abord Lucinor, & fur ce qu'on lui dit qu'il étoit forti, il monta chez Prianne fans fe faire annoncer; car il y étoit fi libre qu'on ne le traitoit point du tout avec cette ceremonie. Elle le reçut auffi fans façons; il prit un fiege & fe mit à parler de chofes fort indifferentes. Il n'y avoit rien d'affecté en cela: car leurs converfations rouloient

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