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Il avoit aufli beaucoup d'affection pour la Faculté de Medecine de Paris, dont il étoit membre, elle trouvoit en lui dans toutes les occafions un Agent fort zelé auprès du Roi, il maintenoit én vigueur les privileges qui lui ont été accordés, & que des ufages contraires, fi on les toleroit, aboliroient aifément, même fous quelque apparence du bien public. Peut-être dans des cas particuliers n'a-t-il été que trop ferme en faveur de fa Faculté contre ceux qui n'en étoient pas, mais tous les cas particuliers feroient d'une difculfion infinie, & les exceptions d'une dangercufe confequence. Si la Loi eft juste en general, il faut lui paffer quelques applications malheureuses.

On peut juger par-là que M. Fagon n'aura pas fait beaucoup de grace aux Empiriques. Ces fortes de Medecins d'autant plus accredités qu'ils font moins Medecins, & qui ordinairement fe font un titre ou d'un fçavoir incomprehenfible & vifionnaire, ou même de leur ignorance, ont trop fouvent puni la crédulité de leurs Malades, & malgré l'amour des hommes pour l'extraordinaire, malgré quelques fuccèss

de cet extraordinaire, un fage préjugé eft toujours pour la Regle.

Ce n'eft pas que M. Fagon rejettât tout ce qui s'appelle Secrets, au contraire il en a fait acheter plufieurs au Roi, mais il vouloit qu'il fuffent veritablement Secrets, c'eft-à-dire inconnus. jufque-là, & d'une utilité conftante. Souvent il a fait voir à des gens qui croyoient poffeder un trefor, que leur trefor étoit déja public, il leur montroit le Livre où il étoit renfermé; cár il avoit une vafte lecture, & une memoire qui la mettoit toute entiere à profit.

Auffi pour être parvenu à la premiere dignité de fa Profeffion, ne s'étoit-il nullement relâché du travail qui l'y avoit élevé. Il vouloit la meriter encore de plus en plus après l'avoir obtenuë. Les Fêtes, les Spectacles, les Divertiffemens de la Cour, quoique fouvent dignes de curiofité, ne lui caufoient aucune distraction; tout le tems où fon devoir ne l'attachoit pas auprès la perfonne du Roi, il l'employoit ou à voir des Malades, ou à répondre à des Confultations, ou à étudier. Toutes les maladies de Verfailles lui paffoient par

les mains, & fa Maifon reffembloit à ces Temples de l'Antiquité où étoient en dépôt les Ordonnances & les Recettes qui convenoient aux maux differens. Il eft vrai que les fuffrages des Courtifans en faveur de ceux qui font en place font affés équivoques, qu'on croyoit faire fa cour de s'adreffer au premier Medecin, qu'on s'en faifoit même une efpece de loi, mais heureufement pour les Courtifans ce premier Medecin étoit auffi un grand Medecin.

Il avoit befoin de l'être pour luimême, il étoit né d'une très-foible constitution, sujet à de grandes incommodités, fur-tout à un Asthme violent. Sa fanté ou plutôt fa vie ne fe foutenoit que par une extrême fobrieté, par un regime prefque fuperftitieux, & il pouvoit donner pour preuve de fon habileté qu'il vivoit.

Après la mort du Roi il fe retira au Jardin Royal, dont il avoit confervé la Surintendance. Son Art ceda enfin à une neceffité inévitable, il mourut le 11 Mars 1718 âgé de près de 80 ans.

L'Academie des Sciences l'avoit choifi en 1699 pour être un de fes Honoraires

Outre un profond fçavoir dans fa Profeffion, il avoit une érudition trèsvariée, le tout paré & embelli par une facilité agréable de bien parler. La raifon même ne doit pas dédaigner de plaire, quand elle le peut. Il étoit attaché à fes devoirs jufqu'au fcrupule, & quelquefois au milieu de douleurs affés vives, il ne laiffoit pas d'être auprès du Roi dans les tems où il y devoit être; l'affiduité d'un homme auffi defintereffe, & qui au lieu de demander refufoit, n'étoit pas celle d'un Courtifan. Quelquefois il ne fe défioit pas affés des inftructions qu'il recevoit dans les chofes de fon miniftere, car il étoit

dans un pofte trop élevé pour avoir la verité de la premiere main, & l'amour qu'il fe fentoit pour la juftice, le témoignage qu'il s'en rendoit, l'attachoit beaucoup aux idées qu'il avoit prifes. Il a toujours fouffert fes longues& cruelles infirmités avec tout le courage d'un fage Phificien, qui fçait à quoi la machine du Corps humain eft fujette, & qui pardonne à la Nature.

Il avoit épousé Marie Nozereau, dont il a laiffé deux Fils, l'aîné wêque de Lombez, & le fecond Confeiller d'Etat..

EL OG E

DE M. L'ABBÉ

DE LOUVOIS

CA

AMILLE LB TELLIER nâquit le 11 Avril 1675 de Michel le Tellier, Marquis de Louvois, Miniftre d'Etat, & de Dame Anne de Souvré. Il étoit leur quatrième Fils, & fut deftiné de bonne heure à l'Eglife. Des Benefices confiderables fuivirent promtement cette deftination. De plus dèsl'âge de 9 ans il fut pourvû de la Charge de Maître de la Librairie, à laquelle M. de Louvois en fit unir deux autresen fa faveur, celle de Garde de la Bibliotheque du Roi, & celle d'Inten➡ dant & de Garde du Cabinet des Medailles. Tout le tournoit du côté des Sciences, & heureusement fes inclinations & fes difpofitions naturelles s'y accordoient.

On alla chercher pour lui les Maîtres que la voix de la Renommée in

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