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férente, très-longue, très-embarraffée, très-difficile à fuivre, dont la feule idée auroit fait horreur à un homme de Lettres, & qui auroit été du moins un grand fardeau pour l'homme le plus exercé, le plus rompu aux manoeuvres du Palais & de la Finance tout enferble? M. Landais Tréforier général de l'Artillerie mourut en 1729, laiffant une fucceffion modique pour un Tréforier, & qui étoit d'ailleurs un Chaos de Contes à rendre, une Hidre de difcuffions renaiffantes les unes des autres. Elle devoit être partagée entre la Mere de M. du Fay & trois Soeurs qu'elle avoit, & il fut lui feul chargé de quatre Procurations, feul à débrouiller le Chaos & à combattre l'Hidre. Malgré toute fon activité naturelle, qui lui fut alors plus néceffaire que jamais, il ne put voir une fin qu'au bout de dix années, les dernieres de fa vie, & on affure que fans lui les quatre Héritieres n'auroient pas eu le quart de ce qui leur appartenoit. Il eft vrai que la réputation d'honneur & de probité que fon Oncle avoit laiffée, & celle qu'il avoit acquife lui-même, durent lui servir dans des occafions où il s'agiffoit de fi

delité & de bonne-foi, mais cela ne va pas à une épargne confidérable des foins ni du tems. Cette grande affaire ne fouffrit point de fon attachement pour l'Académie & pour le Jardin Royal, & ni l'un ni l'autre ne fouffrirent d'une fi violente distraction. Il concilioit tout, & multiplioit le tems par l'induftrie finguliere avec laquelle il fçavoit le diftribuer. Les grands plaifirs changent les heures en momens, mais l'art des Sages peut changer les momens en heures..

Comme on fçavoit que l'on ne pouvoit trop occuper M. du Fay, on l'avoit admis depuis environ deux ans aux Affemblées de la grande Police, compofées des premiers. Magiftrats de Paris, qu'on tient toutes les femaines. chés M. le premier Prefident. Là il étoit confulté fur plufieurs chofes qui intéreffoient le Public, & pouvoient fe trouver comprises dans la variété de fes connoiffances. Il étoit prefque le feul qui quoiqu'étranger à ces refpectables Affemblées, y fût ordinairement appellé.

Son dernier travail pour l'Académie, qui quoiqu'il ne foit pas entierement

fini eft en état d'être annoncé ici, & peut être publié, a été fur le Cristal de Roche & celui d'Iflande. Ces Criftaux, ainfi que plufieurs autres Pierres tranfparentes, ont une double réfraction, qui a été connue de MM. Bartholin, Huguens & Newton, & dont ils ont tâché de trouver la mesure, & d'expliquer la caufe. Mais ni leurs mefures ne font exactes, ni leurs explications exemtes de grandes difficultés. Il étoit arrivé par un grand nombre d'expériences à une mefure jufte & à des faits généraux, qui du moins pouvoient tenir lieu de principes, en attendant la premiere caufe Phifique encore plus générale.

Il avoit découvert, par exemple, que toutes les Pierres tranfparentes, dont les Angles font droits, n'ont qu'une feule réfraction, & que toutes celles dont les Angles ne font pas droits en ont une double, dont la mesure dépend de l'inclinaifon de leurs Angles.

Il tomba malade au mois de Juillet dernier, & dès qu'on s'apperçut que c'étoit la petite Vérole, il ne voulut point attendre qu'on vînt avec des tours préparés lui parler de la mort fans

en prononcer le nom, il s'y condamna lui-même pour plus de fureté, & demanda courageufement fes Sacremens qu'il reçut avec une entiere connoiffance.

Il fit fon Teftament dont c'étoit prefque une partie qu'une Lettre qu'il écrivit à M. de Maurepas, pour lui indiquer celui qu'il croyoit le plus propre à lui fucceder dans l'Intendance du Jardin Royal. Il le prenoit dans l'Académic des Sciences, à laquelle il fouhaitoit que cette place fût toujours unie, & le choix de M. de Buffon qu'il propofoit étoit fi bon que le Roi n'en a pas voulu faire d'autre.

Il mourut le 16 Juillet après 6 ou 7 jours de Maladie.

Par fon Teftament il donne au Jardin Royal une collection de Pierres précieuses, qui fera partie d'un grand Cabinet d'Hiftoire Naturelle, dont il étoit prefque le premier Auteur, tant il lui avoit procuré par fes foins d'augmentation & d'embelliffement. Il obtint même que le Roi y fît tranfporter fes Coquilles.

L'Exécuteur Teftamentaire choifi par M. du Fay eft M. Hellot, Chimiste

de cette Académie. Toujours le Jardin Royal, toujours l'Académie, autant qu'il étoit poffible.

Mais ce qu'il y a de plus remarquable dans fon Teftament, c'eft d'avoir fait Madame fa Mere fa Legataire univerfelle. Jamais fa tendreffe pour elle ne s'étoit démentie. Ils n'avoient point difcuté juridiquement leurs droits réciproques, ni fait de partages; ce qui convenoit à l'un lui appartenoit, & l'autre en étoit fincerement perfuadé. Quoique ce Fils fi occupé eût befoin de divertiffemens, quoiqu'il les aimât, quoique le monde où il étoit fort répandu, lui en offrît de toutes les efpeces, il ne manquoit prefque jamais de finir fes journées par aller tenir compagnie à fa Mere avec le petit nombre de perfonnes qu'elle s'étoit choifies. Il eft vrai, car il ne faut rien outrer, que les gens naturellement doux & gais comme il l'étoit, n'ont pas befoin de plaifirs fi vifs, mais ne court-on pas fouvent à ces plaifirs-là fans en avoir befoin, & par la feule raifon que d'autres y courent La raifon du devoir & de l'amitié, plus puiffante fur lui, le retenoit..

Il étoit extrêmement connu, & per

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