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Judaïques : & on ofe mettre ces avanturiers en balance avec Moyfe même, & pouffer l'outrage jufqu'à la préférence de ceux-là fur lui.

On fent bien, fi on n'a perdu avec la raifon tour fentiment de religion, que c'eft faire tomber Dieu en contradiction avec lui-même, de croire qu'il ait formé la loy & réglé les cérémo nies prefcrites à fon peuple fur le modéle du culte & des mœurs des Egyptiens. Cependant la Critique enchan tée de cette belle invention, n'obmet rien pour la mettre dans tout fon jour, afin qu'il foit dit que Dieu, malgré fa défenfe expreffe [18], ait affervi fon peuple aux loix d'Egypte ;

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braham & Jacob étoient Rois de Damas en Syrie, que Moyfe étoit fils de Jofeph, que les Juifs jeûnent le feptième jour parce qu'ils avoient traverfé durant fept jours les deferts de 'Arabie, for preffez de la faim, &c. Tacite au Liv. 5. de fes Annales dit, que les Juifs viennent de Crete, & qu'ils adoroient une tête d'Af ne en memoire de l'eau que leur avoit indiquée au befoin une troupe d'Afnes fauvages. Jofeph au Liv. 1. contre Appion, expofe le mauvais conte de Manethon qui prenoit Moyfe pour un facrificateur d'Egypte frapé de la lépre, & chaffé du pays avec quantité d'autres lépreux.

(18) Levit. Cap. 18. v. 3.

de cette nation plongée dans le fein de l'idolâtrie jufqu'à adorer des ferpens, des chiens, des crocodilles, les herbes même de fes jardins: afin que Moyfe foit convaincu d'avoit tout pris jufqu'à la feconde table de la loy; & de qui? de gens qui avoient porté l'impudicité, l'incefte, le larcin, & d'autres crimes aux plus honteux ex cés, en fe les croyant permis. Malheureufe critique, que rien n'arrête, & qui s'eft licentiée jufqu'à pofer en fait (19) qu'avant la Loy de Moyfe, il étoit permis à toute perfonne libre de s'a bandonner à un autre! Mais c'eft qu'il fuffit que la nouveauté des paradoxes les moins foûtenables foit applaudie, & femble marquer un efprit qui s'éleve an deffus des préjugez, pour qu'on en préfere les travers à toute la droiture du bon fens & de la révélation. N'eft-ce pas encore une glose bien édifiante de ce docte Anglois, qui à propos d'Abraham prêt à facrifier fon fils Ifaac, felon l'ordre de Dieu, vient nous ramener à une coûtume plus anciennement établie chez les nations,

(19) Chronicus Canon Egypt. pag. 166; Edit. Londin. Ante legem Hebræis innuptis li citum fuit corporis copiam pro libitu facere

d'immoler leurs enfans aux idoles (20), afin que Dieu n'ait pas fur le démon les prémices de nos offrandes?

Il feroit étonnant que M. le Clerc, & fes amis de Hollande, n'euffent pas adopté une partie au moins de ces fentimens fi hardis. Ils l'ont fait (21), & ils nous renvoyent aux preuves de M. Marsham, pour nous en convaincre avec eux. Ils lui affocient le Docteur Spencer (22), qui, fans aller fi loin, ne s'égare que trop: car quoi qu'il reftreigne aux cérémonies tout ce qu'il a crû que les Hebreux ont emprunté des Egyptiens, il y ajoûte de fon fond tant d'autres nouveautez habillées à l'antique, qu'il femble difputer au

(20) Marsh. Chron. Can. Egypt. pag.77

(21) Sentimens de quelques Theologiens de Hollande, Lettre 1. pag. 13. Edit. de 1685. & dans l'Art Critique, Part.2. Sect. 2. Chap. 7. M. le Clerc en parle plus fortement en ces termes: Poffumus inftitutores primos ejufmodi rituum videre & oftendere eos inanibus verbis plebi impofuiffe. Il renvoye à fes Notes fur le Chap. 43. v. 31. de la Gencfe.

(22) Sentimens des Theolog. de Holl. pag. 14. où il eft dit du Docteur Spencer, qu'il montre fort nettement dans fon Traité de Urim • Thummim, qu'une grande partie des ordonnances Mofaiques doivent leur naissance aux Geremonies Egyptiennes, &C.

Fauffes idées de Spencer,

toient que

Chevalier Marsham l'honneur du pa→ radoxe. Voici en deux traits dequoi caractériser tout l'ouvrage du Doc

teur.

Premierement, les facrifices de la loi qui confiftoient à immoler à Dieu qui avance des victimes en reconnoiffance de fon que les facrifices des fouverain domaine, ne font à son aJuifs n'é- vis (23), que de vieilles inventions des imita Egyptiennes & des cultes fuperftitieux tions du des Gentils, que Dieu par condefcenpaganisme, dance a tolere ou permis aux Juifs; mais été or mais qu'il n'a, dit-il, ordonné nulle Dieu, mais part; qu'il a même defapprouvé par feulement l'organe de fes Prophetes: en forte que,

& n'ont ja

donnez de

Xolerez.

fi quelques textes de l'Ecriture pris à la lettre expriment un commandement de facrifice des animaux, comme il est forcé d'en convenir, c'eft, pourfuitil, que la patience de Dieu s'accommodant à la groffiereté des Ifraëlites,

(23) F. Spencerus de Legib. Hebrarrum Ritualibus. L. 3. Diff.. Cap.r. Sect.x. ubi docet, Sacrificia è gentium ruditate dimanaffe. Expli cans verò locum Isaia Cap (1. v. 11. ita loquitur: Non enim dicit Deus fe non probaffe Judæorum facrificia, fed ne exegiffe quidem. Addit eos, Sacra sua non tantum fine corde, fed & abfque lege verè & propriè fic dicta peregiffe. Quod deinceps tote Cap. 1. Sect. 1. 2. 34

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leur laiffoit l'ufage de ces cérémonies qui tiennent fi fort du paganifme, pour éviter un plus grand mal. Sentiment dont il a pû prendre l'idée dans Epifcopius (24).

Voilà le faux rafinement que le docte Spencer a préféré à la fainte fimplicité de l'Ecriture. En vain il y a lû que dès les premiers temps les hommes preffez de fe tourner à Dieu comme à leur premier principe & à leur derniere fin, fe font accordez à lui marquer leur dépendance, tant par l'offrande des fruits de la terre,que par l'effufion du fang des animaux : offrandes acceptées de Dieu même avec un agrément qu'il a fait éclater en cent occafions, comme il paroît par les exemples d'Abel (25) & des Patriarches. En vain il a remarqué

(24) Epifcop. L. z. Inftit. Theol. Cap. s Non inquiro hic jam, inquit, an facrificio, rum Deo mactandorum ritus ex naturæ lege ortum habuerit, an ex inftitutione divina.... neutrum folide ex Scriptura demonftrari poteft. Subjungit poftea, Credibile non effe Deum fanguine & cæde innocentium animalium defectari; quae ratio fortè etiam fufficit, ut credamus ritum hunc ab ipfo, Deo imperatum non fuiffe.

(25) Gen. cap. 4. V. 4. & ad Hebr. 12. v.4 g

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