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leurs Meffes chez eux avant le jour, fur des Autels portatifs qu'ils démontoient & cachoient foigneufement ; mais ayant été furpris plufieurs fois malgré leurs précautions, la Nation se laffa à la fin de payer les avanies auf quelles ces Religieux étoient condam→ nés, de forte que pour les éviter ils venoient dire leurs Meffes à la Chapelle Confulaire, fans qu'aucun d'eux prétendit le pouvoir faire fans une permiffion expreffe du Conful.

Cela a duré jufqu'au Confulat du fieur Dupont, qui fçachant que la Nation écrivoit fans ceffe à la Cour pour le faire revoquer, fe jetta entre les bras des Jefuites, & leur demanda leur protection.

II

Le Pere Jofeph Beflon Jefuite en eut pitié, & foit par un motif de compaffion, foit qu'il efperât que fes Confreres en tireroient quelque avantage confiderable, il voulut bien lui fervir de Secretaire, de confeil & de pere. Il lui faifoit toutes fes lettres, les écrivoit lui-même. Ces lettres venant de la main d'un homme d'efprit, ont long-tems caché l'incapacité du Conful, même à un Miniftre auffi éclairé que M. Colbert.

Les Jefuites ne s'en tinrent pas à ces

1680.

Juin

fervices, ils voulurent le foutenir cont 1680. tre les inftances des Marchands, & ils Juin. y réüffirent pendant un affez long tems. Il crût ne leur pouvoir mieux marquer fa reconnoiffance qu'en les introduifant dans fa Chapelle,& les déclarant fes Chapelains. Ils fe contenterent de cette faveur pour un tems, ils difoient la Meffe du Conful, fans empêcher ni incommoder le Curé dans fes fonctions de Paroiffe; mais ils avoient d'autres vûës, & voici l'oc cafion qui fe prefenta pour en venir à bout,

Il faut fçavoir que de tout tems le Curé de la Paroiffe a été Juge des differends qui naiffoient ou qui pouvoient naître entre le Conful & les Marchands de fa Nation. Le Pere Curé s'oppola à une violence que le fieur Dupont vouloit faire à quelques particuliers de la Nation, & l'affaire ayant été débattue, il donna fon jugement en faveur des Marchands. Le fieur Dupont en fut fi outré qu'il prit des mefures avec les Jefuites pour chaffer entierement les Peres de Terre-Sainte, Ils écrivirent contre eux en Cour, les accuferent d'être Espagnols, ennemis dų Roi & de fon Etat, de ne vouloir pas faire les Prieres accoûtumées pour Sa

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Majefté, & de cent autres chofes dont

le détail feroit auffi ennuyeux qu'il eft 1680. inutile.

Les Marchands foûtinrent leur Curé, & le maintinrent dans la poffeffion de faire fes fonctions dans la Chapelle Confulaire. Cela caufa de grandes altercations,pendant lefquelles le Conful changea beaucoup de fentiment à l'égard des Jefuites; & comme il étoit naturellement inconftant & capricieux, il fe repentit de ce qu'il avoit fait en leur faveur. Il refolut de leur ôter la qualité de fes Chapelains, fans pourtant la rendre aux Cordeliers contre lefquels il étoit toûjours en colere. Il l'offrit aux Carmes & aux Capucins; mais ces Religieux qui étoient fages & pacifiques la refuferent, ne voulant pas faire

tort aux uns ni aux autres.

Les Jefuites ne voulant pas avoir le démenti dans une affaire qui les conduifoit à leur but, qui étoit d'avoir la Chapelle dans leur maison, & enfuite la Paroiffe, eurent recours au Roi, & obrinrent des Lettres Patentes qui les confervoient dans la fonction de Chapelains des Confuls. Ces Lettres cauferent beaucoup de bruit à Alep. Cela paroît par les differentes Ordonnances. de M. de Nointel, alors Ambassadeur

Juin

Roi

à la Porte, qui font enregistrées dans 1680. la Chancellerie d'Alep. [Mais quelque Juin. Favorables qu'elles fuffent aux Jefuites, le Pere Nau alors Superieur de leur Miffion n'en fut pas content. Il déclina la Jurifdiction de l'Ambaffadeur, & ne voulut reconnoître que celle de la Congregation de la Propagande. Il ne fe contenta pas de cela, & pour le précautionner contre l'inconftance du fieur Dupont, & le pouvoir de fes Succeffeurs, & être Chapelain du Conful malgré lui, il paffa en France, & obtint un brevet du portant que Sa Majefté retenoit les Jefuites pour les Chapelains dans la Chapelle Confulaire d'Alep vouloit qu'ils en cufffent, l'adminif ftration & qu'ils y fiffent toutes les fonctions de leur miniftere. Ce brevet fut executé felon fa forme & teneur dès la premiere affemblée que je tins après mon arrivée, le 8. Decembre 1679. Les Peres Jefuites furent reconnus par la Nation en corps, pour Chapelains du Roi dans la Chapelle Confulaire, & le brevet & toutes les pieces qui y avoient rapport furent enregistrées dans la Chancellerie, auffi bien que mon Ordonnance de mife en poffeffion, qui

et du onze du même mois. C'étoit affurément tout ce qu'on pouvoit faire pour eux; mais il falloit chaffer entierement les Peres de la Terre-Sainte pour les contenter, c'étoit leur but, & c'étoit ce que je ne pouvois pas faire.

Le Pere Nau avoit fuivi M. de Guilleragues à Conftantinople, pour tâcher d'obtenir davantage qu'il n'étoit porté par le brevet. Il travailla beaucoup auprès de M. l'Ambaffadeur pour donner à ce brevet une explication & une étendue conforme à fes deffeins.

Les Jefuites d'Alep écrivirent au P. Nau qu'ils difoient bien la Meffe dans la Chapelle Confulaire, mais qu'ils n'en étoient pas les maîtres comme ils le fouhaitoient.

Le Pere Damien de Rivoli Cordelier, Gardien de l'Hofpice de TerreSainte à Alep,me prefenta les Patentes du Roi en forme de Chartres qui n'ont jamais été revoquées, par lefquelles le Roi vouloit qu'ils puffent faire les fonctions Curiales dans ma Chapelle, & ne voyant point d'autre moyen pour les fatisfaire reciproquement que de regler les heures & la diftribution des Sermons, d'une maniere que les uns n'incommodaffent point les autres ; j'en

1680. Juin

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