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points, que la photographie montre malheureusement d'une façon bien imparfaite, se trouvent de petits pertuis légèrement surélevés, ayant une tendance à bourgeonner et saignant très facilement; j'en ai compté environ vingt-cinq. Sur ce nombre, il n'y en a pas plus de trois qui, par la pression sur les parties voisines, rejettent un peu de pus et quelques grains blancs. Ceux-ci s'accumulent au

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Fig. 6.

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Mycétome à grains blancs, en voie de guérison, datant de sept années. Pied gauche vu par la face interne; le gros orteil est seul atteint.

dessous des petites croûtes qui se forment par la dessiccation du pus. La tumeur a une consistance cartilagineuse; le stylet explorateur éprouve une grande résistance et ne s'enfonce que de deux à trois centimètres, suivant les points. Il n'y a jamais eu d'engorgement ganglionnaire dans l'aine.

Symptômes fonctionnels. A part la gêne due au poids de la tumeur, le malade ne souffre que très légèrement.

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Anatomie pathologique. Après anesthésie à la cocaïne, j'ai enlevé, au niveau du pli de l'orteil, un petit fragment de la tumeur. Au-dessous de la peau se trouvait un peu de tissu adipeux infiltré de travées conjonctives hypertrophiées et très résistantes; je n'ai pas trouvé de tunnels conduisant profondément. Il est probable que cette tumeur était en voie de guérison prochaine, celle-ci se faisant par un processus scléreux, comme dans les cas de mycétome à grains noirs.

Le temps m'a manqué pour faire une étude histologique complète des grains blancs. En les traitant par la potasse, je n'ai pas

trouvé de filaments mycéliens, il y avait surtout des cellules hypertrophiées. Néanmoins l'identité de cette maladie avec la variété pâle de mycétome ne me laisse aucun doute. Robabouta, pays Galla-Aroussi, 6 octobre 1901.

XII.

Note préliminaire sur l'Aïno,

maladie frappant les bestiaux des Somalis de l'Ogaden.

Les Somalis de l'Ogaden désignent sous le nom d'Aïno une maladie causée par une Mouche qui porte également ce même nom. La maladie est causée par un Trypanosome qui pullule dans le sang des animaux malades; quant à la Mouche, elle semble être sinon la Glossina morsitans, tout au moins une espèce très voisine. La maladie sévit avec intensité sur les Chameaux, les Chevaux, les Anes et les Mulets. Dans les régions où elle existe, je n'ai trouvé le parasite ni dans le sang de l'Homme, ni dans celui d'un grand nombre d'animaux sauvages: Éléphants, Zèbres, Antilopes, Damans, Chiens sauvages, Singes (deux espèces). Ce fait ne prouve pas que ces animaux soient réfractaires à la maladie, mais que leur façon de vivre les met peut-être à l'abri des atteintes de la Mouche. Je crois pouvoir appuyer cette hypothèse par les infections que j'ai obtenues chez le Singe et chez un jeune Chien indigène par injection intra-veineuse de sang chargé de parasites.

L'espoir de trouver un moyen d'arrêter l'épidémie qui devait anéantir en quelques semaines tous les Chameaux de la Mission du Bourg m'a conduit à chercher dans la thérapeutique et la sérothérapie un remède efficace contre la maladie.

J'ai essayé sur lame et suivi au microscope l'action de la quinine, de l'antipyrine et du bleu de méthylène. Les deux premières substances agissent faiblement sur le parasite et nécessiteraient des doses de médicaments, toxiques à la dose injectée, le bleu de méthylène au contraire tue les parasites très rapidement. J'ai injecté un jeune Chameau malade pendant plusieurs jours avec un mélange d'antipyrine et de quinine, j'ai suivi d'heure en heure l'action du médicament dans le sang, les parasites se sont toujours montrés aussi actifs qu'au début. Le bleu de méthylène a donné chez un Mulet une amélioration passagère, mais la dose passant dans le sang est trop faible pour tuer les parasites.

Sérothérapie. - J'ai étudié l'action exercée sur les parasites par le sérum du sang d'un grand nombre d'animaux sauvages, ainsi que de l'Homme, habituellement réputés comme réfractaires. Les lames, conservées à une température convenable, ont permis de suivre le parasite, mais je n'ai obtenu aucun résultat : les Trypanosomes vivent très bien dans tous ces sérums. Je poursuis actuellement ces études, en essayant d'immuniser divers animaux qui pourront peut-être fournir un sérum actif après une première injection bénigne.

La contamination des animaux se fait par inoculation naturelle, par les Mouches, ou artificielle, par l'Homme, du sang infecté d'un autre animal. L'inoculation expérimentale par injection intraveineuse m'a réussi chez le Chameau, l'Ane, le Chien, le Singe. Suivant la quantité de sang injectée et le volume de l'animal, les parasites se retrouvent dans le sang deux, trois, quatre jours. après. Le nombre des parasites va en croissant rapidement chez les trois premiers animaux précités et la mort arrive dans un temps variant de quelques jours à quelques mois; chez le Singe, les parasites peuvent vivre, mais ne semblent pas toujours se reproduire le sang, qui au début fourmille de Trypanosomes, n'en renferme plus que quatre ou cinq par préparation après un mois, et les symptômes du début s'amendent rapidement.

L'inoculation sous-cutanée (contrairement à la dourine, je crois) ne m'a donné aucun résultat. J'ai inoculé deux centimètres cubes de sang de Chameau très parasité au Bœuf, au Singe et à moi-même sans retrouver de parasites dans le sang.

La Mouche est-elle le seul animal qui puisse transmettre le Trypanosome par des piqûres successives d'animal malade à animal sain ou bien la transmissiou du parasite peut-elle se faire aussi par l'intermédiaire des Argas, des Anopheles et des Culex? Les Somalis accusent également tous les Tabanides de transmettre la maladie à leurs Chameaux. J'ai étudié plusieurs espèces de Tabanides au point de vue anatomique aucune espèce ne possède le réservoir sanguin que possède l'Aïno en avant des glandes salivaires.

Je n'ai pas eu assez de Mouches Aïno pour juger du temps que les parasites peuvent vivre dans le réservoir ou dans le tube. digestif, mais chez les Tabanides, les Culicides et les Argas, ces parasites meurent en quelques heures.

LE D' GARNAULT ET LA TUBERCULOSE BOVINE

Du 22 au 26 juillet 1201, s'est tenu à Londres un Congrès britannique de la tuberculose. Le professeur R. KocH y a fait une importante communication, par laquelle il tend à démontrer, d'une part, que la tuberculose humaine diffère de la tuberculose bovine et ne peut être transmise au bétail, d'autre part, que la tuberculose du bétail ne peut être transmise à l'espèce humaine ni par le lait ni par la chair des animaux.

Sans préjuger du sort qui est réservé à des assertions aussi nouvelles et en si complet désaccord avec les opinions généralement reçues, nous croyons utile de publier ici une série de documents qui ont paru dans les journaux politiques et qui ont leur place toute marquée dans ces Archives. Nous voulons nous abstenir de tout commentaire; nous dirons pourtant que nous avons le plaisir de connaître personnellement le D' GARNAULT, et que l'abnégation avec laquelle il se propose pour une expérience redoutable entre toutes nous inspire un sentiment de profonde et sincère admiration.

LETTRE DU D' GARNAULT AU PROFESSEUR KOCH
(Le Matin du 17 août 1901)

Très honoré Maître,

14 août 1901

Je viens, dans la plénitude de ma conscience, vous offrir de servir de sujet à des inoculations de tuberculose bovine. Je suis disposé à croire que vous êtes dans l'erreur et suis convaincu que je serai inoculé. J'ai quarante et un ans, je pèse plus de 100 kilos, j'ai 1m81, je suis de parfaite santé (vous pourrez d'ailleurs me soumettre au préalable à des inoculations de tuberculine), je n'ai pas d'enfants.

Dans les combats, des hommes de mentalité inférieure s'offrent par milliers à une mort inévitable. Bien que je ne sois pas de votre avis et que je considère mon inoculation comme probable, j'estime que, sur le champ de bataille de la vie sociale, un être conscient peut bien faire ce que tant d'autres font si facilement sur les vrais champs de bataille. Je me tiens à votre entière disposition, à Paris ou à Berlin, dans les conditions qu'il vous plaira.

PAUL GARNAULT,

Docteur en médecine, docteur ès-sciences naturelles,
ex-chef des travaux d'anatomie comparée

de la Faculté des sciences de Bordeaux.

LA TUBERCULOSE BOVINE

(Le Matin du 18 août 1901)

Jusqu'à ces derniers jours, il était universellement admis que l'Homme peut contracter la tuberculose en consommant la viande d'un Bœuf atteint de ce mal, ou en ingérant du lait, non stérilisé, renfermant des Bacilles tuberculeux, des Vaches atteintes de la pommelière. Or, malgré toutes les précautions, nombreux sont les Bœufs tuberculeux servant à notre alimentation; le lait et le beurre que nous ingérons, sont constamment, peut-on dire, infectés par le Bacille de la tuberculose.

Quels sont les dangers que nous courons de ce fait ? On les croyait très. grands. On prenait de grandes précautions, d'ailleurs souvent illusoires, pour empêcher la viande tuberculeuse d'arriver sur les marchés. On recommandait, surtout pour les enfants, de stériliser le lait de Vache, et, de ce fait, on altérait très sensiblement la valeur nutritive de cet aliment. A la fin de juillet, au Congrès de Londres, le célèbre KосH, celui-là même qui a découvert le microbe de la tuberculose, a affirmé que le danger de cette infection de l'Homme par la viande ou le lait était complètement nul. Il a apporté les résultats de nombreuses expériences à l'appui de sa thèse. M. NOCARD, d'Alfort, a répondu à l'illustre bactériologiste, sans pourtant le réfuter. M. NOCARD croit que l'inoculation de la tuberculose du Bœuf à l'Homme est un fait fréquent; il dit que plusieurs vétérinaires sont morts, s'étant blessés à la suite de nécropsies, et surtout il recommande aux mères de continuer à faire bouillir le lait des enfants.

Qui a raison? La grande autorité scientifique de KосH pèse en ce moment d'un poids énorme dans la balance. Il y a urgence à être fixé au plus tôt, par l'expérience directe d'une inoculation faite du Bœuf à l'Homme.

Voilà pourquoi, pénétré de cette idée, j'ai écrit, par le courrier de mercredi, au professeur KocH, la lettre que le Matin a publiée hier.

J'ai écrit cette lettre sous l'impression d'une conversation avec M. NOCARD, qui considère l'inoculation comme à peu près certaine, et aussi sous l'influence des idées reçues.

Une lecture attentive des communications du Congrès et la réflexion me portent maintenant à croire que KocH a raison et qu'en réalité le danger que je cours est moins grand que je ne l'avais pensé.

J'estime que l'inoculation intradermique suffira pour montrer si KocH a raison ou tort; et, dans ce cas, je puis avoir la ressource de faire enlever chirurgicalement les ganglions infectés, au cas où l'infection se produirait. Je sais fort bien que l'infection générale peut se produire par cette voie, mais cette considération m'arrêterait si peu que je suis prêt à subir l'injection intraveineuse ou l'injection pulmonaire, si KоCH le juge utile, pour ajouter à la valeur démonstrative de son expérience.

J'estime que KоCH ne peut refuser mon offre. En effet, on l'a accusé et on l'accuse encore d'avoir agi à l'instigation de son gouvernement et des agrariens d'Allemagne. Je repousse ces insinuations comme des calomnies

Archives de Parasitologie, V, no 1, 1902.

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