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néceffairement avec fes écoliers; le refte, il l'employoit à une lecture affidue des meilleurs Auteurs Grecs & Latins, & la rapidité de fes progrès en tout genre, alloit jusqu'à étonner ces deux illuftres amis, qui par le charme ou la profondeur. de leur érudition, étoient eux-mêmes l'ornement de leur fiécle.

Dans la lecture d'Homére, qu'il avoit bien recommencée cinq ou fix fois, en moins de quatre ans, il lui arriva une chose, qui quoique probablement arrivée à la plûpart de ceux qui en ont fait de même leur principale étude, ne laiffera pas aujourd'hui de paroître fort singuliére. Pour mieux retenir, ou pour reconnoître plus facilement les beaux endroits de ce Poëte, il les foulignoit d'un coup de crayon dans fon exemplaire à mefure qu'il le lifoit. A la fe

conde lecture, il fut furpris de retrouver des beautés qu'il n'avoit pas apperçues dans la premiére, & qui plus vives encore, fembloient lui reprocher une injufte préférence. Ce fpectacle fe renouvella à la troifiéme, à la quatriéme lecture; & de furprise en surprise, de remarques en remarques, l'Ouvrage fe trouvą prefque fouligné d'un bout à l'autre. Ce n'étoit, felon lui, qu'après avoir éprouvé quelque chofe de femblable, qu'on pouvoit parler dignement du Prince des Poëtes; on ne voit pas ce qu'il auroit exigé, pour être en droit d'en faire la cri tique.

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La douceur de ces occupations finit avec le tems destiné à régenter en Province, & dés le com‐ mencement de la cinquiéme année, il fut rappellé à Paris pour y

étudier en Théologie. Son efprit, naturellement vif & brillant, fe trouva tout-à-coup comme tranfporté dans un pays inconnu, à l'air duquel il ne s'accoûtumoit point, & dont la langue lui paroiffoit toujours étrangére. L'amour du devoir, qui feul le foutenoit, n'empêchoit pas qu'en fon particulier ik n'y mêlât quelques études moins auftères; & c'eft à cette forte de délaffement que nous devons entre autres, plufieurs Epigrammes Latines dans le goût de Catulle, dont M. Defpréaux fit grand ufage dans la difpute qui s'éleva de fon tems fur la préférence des anciens & des: modernes: dispute, que nous avons vûe depuis fe renouveller avec une ardeur prefque égale, & qu'il eft à fouhaiter que nos defcendans voyent de même renaître fouvent,.

fans qu'ils puiffent, ou qu'ils ofent jamais la terminer.

On compte encore entre les Poëfies, qui de tems à autre échapoient au nouveau Théologien, une Ode magnifique fur l'exaltation d'Innocent XII. quelques Fables allégoriques adreffées à un fameux Journaliste, qu'il croyoit n'avoir pas affez ménagé le P. Bouhours, & un ingénieux Apologue écrit en Vers Grecs & Latins de diférentes mefures, ой pour venger ce même ami d'un autre genre de critique, il le représente fous la forme d'un Cygne, dont mille oifeaux jaloux ef fayent de ternir la blancheur, en le couvrant de toute la fange & de toute l'ordure qu'ils ont ramaffée avec leurs propres aîles, mais, qui fans jamais rien perdre de fon chant mélodieux, ne fait que se plonger un

inftant dans l'onde pure du Cayftre ou du Méandre, pour reprendre à leurs yeux le premier éclat de fon plumage.

Sa veine étoit une efpéce de Protée, qui prenoit fur le champ toutes les formes convenables aux fujets qu'elle avoit à traiter; qui fe paroit des beautés antiques, non en imitant fervilement les anciens, en copiant leurs expressions, en leur arrachant des Vers entiers, mais en se revêtant, pour ainsi dire, du caractére de perfection propre à chaque efpéce de Poëfie, dans laquelle quelqu'un de ces anciens avoit excellé.

L'applaudiffement que ces productions recevoient dans le monde,

n'étoit pas un titre

trouver grace

pour leur faire

devant des Supérieurs

attentifs à régler les occupations &

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