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Une année entière fe paffa en citations contre Eugene, au AN. 1432. grand fcandale de l'églife.

Outre les notaires qu'on avoit choifis dans la première feffion, le concile jugea à propos d'en nommer encore deux autres dans celle-ci : favoir Barthelemi de Lutignia, qui étoit de Sienne, & Thomas Chefnelot, bachelier en droit, chanoine du diocèfe de Reims. Après quoi l'on finit la feffion; mais dans une congrégation qu'on tint le neuvième de Mai, les pères qui n'avoient point encore remercié les prélats de France, de ce qu'ils avoient fait en faveur du concile dans l'affemblée de Bourges, en écrivirent alors au roi Charles VII pour l'en féliciter, & le prièrent écrit au roi que, comme les rois fes prédéceffeurs avoient toujours pade France. ru pleins de zèle pour secourir l'églife, ce qui leur avoit Labbe conc. mérité le nom de rois très-chrétiens, il lui plût de faire exétom. x11. P. cuter la délibération de fes prélats, & d'envoyer les évê

XVI.

Le concile

828.

XVII.

des Bohé

1o5.

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ques de France avec fes ambaffadeurs, afin que le concile étant devenu par-là plus nombreux, il fût en état de pourvoir plus furement au bien de la religion. Le concile exhorta de même les prélats à se rendre à Bâle, auffi-bien que le fieur de la Tremouille, qui étoit plus avant que tout autre dans la faveur du roi, Renault archevêque de Reims, chancelier de France, & l'archevêque de Lyon, qui étoit alors légat du pape. Le concile pria ce dernier de quitter fa légation comme inutile, pour fe rendre promptement à Bâle, afin qu'à fon exemple les autres y vinffent à l'envi. Cependant il paroît par une lettre de ce prélat à l'évêque de Lauzanne, qu'il ne quitta point la France, s'y croyant plus néceffaire pour les affaires du concile.

Les Bohémiens, incertains s'ils devoient répondre favoAflemblée rablement aux invitations du concile & aux lettres que l'emmiens, pour pereur leur avoit écrites pour les engager à y envoyer leurs députer au députés, s'affemblèrent à Egre, pour prendre leur résolution. concile. Les fentimens d'abord furent fort partagés. Les Orphelins, Ci-deffus tom. liv. 10s les Thaborites, & prefque tout le peuple, dirent qu'on ne 189. & 99. devoit point y aller ni y envoyer: apportant pour raison A Sylv. l'exemple de Jean Hus & de Jerôme de Prague, qui s'étoient fiés ainfi au fauf-conduit de Sigifmond, & qui néanmoins avoient été condamnés au fupplice du feu dans le temps du concile de Conftance. Maynard prince de la maison-neuve, & toute la nobleffe, fut d'un autre fentiment, Ils repréfentèrent

hift. Boh. c.

49.

AN. 143.

XVIH. Quatrième feflion du

Labb. concil.

qu'on ne devoit point fouffrir ceux qui introduifoient de nouveaux dogmes, une doctrine étrangère & de nouveaux ufages, avant qu'ils euffent rendu compte à l'églife de leur conduite & de leurs fentimens, & qu'ils euffent foumis à des gens éclairés ce qu'ils avoient appris au peuple. Cet avis l'emporta fur l'autre, & toute l'affemblée conclut qu'il falloit envoyer des députés au concile. Les principaux furent Guillaume Coska & le célèbre Procope pour la nobleffe, Jean de Roquefane & deux autres pour le clergé; mais avant leur départ, ils voulurent être munis d'un fauf-conduit en bonne forme. Il leur fut expédié dans la feffion fuivante, qui étoit la quatrième, & qui fe tint le concile de vendredi vingtième de Juin de la même année 1432. Ce Bâle. XIX. fauf-conduit étoit une fignification qu'on faifoit à tous les Sauf-conduit peuples du royaume de Bohême, du marquifat de Mora- accordé aux vie, de Prague & autres lieux, aux prêtres, barons, no- Bohémiens. bles, eccléfiaftiques & féculiers, qui feroient envoyés au concile général de Bale, de s'y rendre en tel nombre qu'ils 428. voudront, pourvu qu'il foit au-deffous de deux cents; & le concile, par ce fauf-conduit, leur accorde une entière fureté, & leur permet de demeurer à Bâle, d'y traiter des affaires qui leur auront été commifes, de les conclure & de les terminer, de célébrer l'office divin dans les lieux de leur demeure, fans qu'on puiffe les en empècher, de fortir de la ville toutes les fois qu'ils le voudront, pour prendre l'air, ou pour d'autres fujets, de punir eux-mêmes ceux des leurs qui manqueront à leur devoir, fans que d'autres puif fent s'en mêler. Le concile promet auffi de les prendre fous fa protection, durant tout le temps qu'ils feront à Bále; & quand ils auront eu une audience fuffifante, s'ils demandent à fe retirer, ou que le concile juge à propos de les renvoyer, il promet de leur accorder vingt jours pour fe rendre au lieu qu'ils défireront.

to. XII. P.

XX.

Lettres des pères du con

Le concile fit lire dans la même feffion la lettre qu'il écrivoit aux Bohémiens, pour les féliciter de la réfolution qu'ils avoient prife dans la ville d'Egre de députer au concile, & qui faifoit espérer une prochaine réunion. » Nous » louons, difent les pères du concile dans cette lettre, & "nous béniffons le Seigneur, qui nous procure le plus heu- hémiens. » reux jour de notre vie; nous voyons toutes les voies Labb, concil. » difpofées pour la manifeftation de la gloire de Dieu, & t. x11. p. 485.

cile aux Bo

» l'avancement du peuple chrétien. Il n'y avoit aucun de AN. 1432. nous qui ne répandît des larmes de joie, pendant que » nos députés nous rapportoient ce qui s'eft paffé avec vous. Nos entrailles étoient émues de voir un fi heu>> reux commencement, qui fera fans doute fuivi d'un » plus heureux fuccès. Levons donc nos mains vers le ciel, » & rendons gloire à Jesus-Chrift d'avoir rendu fi pro» chaine cette paix que nous lui avons demandée fi fou» vent. Ouï, l'heure approche en laquelle l'églife notre "fainte mère, qui a été long-temps confternée de voir » fes enfans divifés, commence à fe réjouir de la paix & » de l'unité que vous nous faites espérer, & à changer en » joie fon deuil paffé. Il eft temps que ceux qui ont été » marqués du fceau de Jesus-Christ, qui ont été régénérés » par le même baptême, quittent toute diffenfion, fe re» vêtent du même efprit de charité & d'unité, travaillent » de toutes leurs forces à augmenter la gloire du nom chré» tien, & protègent la foi orthodoxe que les infidelles & » les païens déchirent honteufement en beaucoup d'en» droits, & qu'ils voudroient éteindre entièrement. » Le concile envoya cette lettre aux Bohémiens, avec le faufconduit qu'il avoit dreffé; & pour montrer à cette nation qu'il vouloit leur donner toute la furetéqu'il pouvoitleurprocurer, il envoyaà Sigifmond Jean de Mulbrun, un de ceux qui avoient été députés en Bohême, & qui avoient af fifté à l'affemblée d'Egre, pour demander à ce prince un autre fauf-conduit figné de lui: & le concile dit dans fa lettre aux Bohémiens, qu'il le leur enverra dès qu'il l'aura reçu, afin que rien ne manque de fa part de ce qui peut les engager à faire avec l'églife une paix entière & parfaite.

Labbe conc. tom. XII. p. 487. & 488.

Comme le pape étoit alors affez dangereusement malade, le concile ordonna dans la même feffion, que fi le faint fiége venoit à vaquer, les cardinaux n'éliroient point le pape ailleurs que dans le concile même. On publia enfuite quatre décrets : le premier porte, que le pape vivant ne pourra point créer de nouveaux cardinaux durant la tenue du concile, parce que leur grand nombre étoit à charge à l'églife, & que s'il en créoit, la création feroit déclarée nulle. Et parce que le pape Eugene pouvoit en créer, malgré la défense du concile, on ftatua que, s'il en faifoit quelques

uns, il ne pourroit point les préconifer, pour prévenir un abus dangereux au deffein qu'on fe propofoit de réformer AN. 1431. l'églife; qui étoit que plufieurs perfonnes ambitionnoient le chapeau de cardinal, & euffent pu par-là quitter le parti de l'églife, pour s'attacher à la cour de Rome, ce que le concile vouloit empêcher. Le fecond décret porte, que perfonne n'étoit dispensé de venir au concile, fous prétexte de ferment, de promeffe ou d'engagemens faits au pape ou à tout autre; & que ces fermens & ces engagemens font nuls, de même que toutes les procédures qui feroient faites à ce fujet, ou que l'on aura déjà faites. Le troisième, que le fceau des lettres & actes du concile feroit en plomb; que d'un côté le S. Efprit y feroit gravé fous la forme de colombe, & de l'autre côté ces mots : le faint & facré concile général de Bâle.

XXI.

de faint Euf

Labbe

conc.

Le dernier décret de cette feffion contient la commiffion donnée par le concile à Alfonfe Carrigle, Efpagnol, cardi- Le cardinal nal du titre de S. Euftache, pour être gouverneur d'Avignon tache, gou& du comtat Venaiffin, avec une pleine & entière puiffance; verneur d'Afemblable à celle que François, archevêque de Narbonne vignon. & camérier de l'églife Romaine, avoit reçue de Martin V. Ce prélat fe trouve avoir été le premier vice-légar d'Avignon, après le départ des papes de leur cour: Pierre cardinal de Foix, auquel le pape Eugene avoit donné cette légation, ayant été rejeté par ceux d'Avignon, ce qui fut caufe d'une guerre, & de la prise de la ville.

to.x11 p.489.

XXII. Cinquieme

Bâle.

Dans la cinquième feffion qui se tint le famedi neuvième feffion du d'Août, veille de S. Laurent, le concile faifant attention concile de qu'il étoit utile & même néceffaire d'établir des perfonnes Labbe, cone. capables pour examiner & traiter les caufes qui regardoient tom. 11. p. la foi, avant que le concile donnât un jugement définitif, 495. & feq. il établit pour cela trois juges; François évêque de Pavie, Conrad évêque de Ratisbonne, & Jean abbé de Citeaux; & il leur donna pouvoir de citer, entendre, connoître, décider & faire tout ce qui concernoit les caufes de foi, foit dans le lieu du concile, foit hors du concile même. Cependant les députés du concile devoient examiner avant eux ces caufes, & enfuite leur en faire leur rapport & les leur remettre, pour en connoître plus pleinement ; & ces juges avoient le pouvoir de prononcer deffus jufqu'à fentence définitive exclufivement c'eft-à-dire que le concile fe refervoit le pouvoir de décider définitivement ce qui étoit néceffaire,

AN. 1432.

gats du pape

afin la décifion eût force de la loi. On nomma auffi
que
trois autres évêques pour connoître de toutes les caufes qui
étoient dévolues au concile, excepté celles qui regardoient
la foi & quelques autres officiers. Le pouvoir des uns & des
autres fut limité à trois mois. Enfin, l'on ordonna que tous
ceux qui étoient incorporés au concile, ou leurs procureurs,
ne pourroient être ajournés à la cour de Rome, ni ailleurs,
& qu'on ne pourroit les forcer de s'y rendre, fi on les y
avoit ajournés. Ainfi finit la feffion.

quatre:

XXIII. Le vingt-troisième du mois d'Août.il y eut une congré Congréga- gation générale pour entendre les légats du pape Eugene, tion où l'on arrivés depuis peu à Bâle. Ils étoient au nombre de écoute les lé favoir, André de Conftantinople archevêque de Coloffe, Fugene. Jean de Tarente, Bertrand évêque de Maguelone, dont le fiége a été depuis transféré à Montpellier, & Antoine auditeur des caufes du facré palais. Ils parurent tous dans cette aflemblée, & André parla le premier, & fort au long, des malheurs du fchifme, & des avantages d'une paix folide qu'il falloit embraffer avec le chef de l'églife, afin d'y amener les Grecs plus facilement, de travailler plus efficacement à la converfion des Bohémiens, & de réformer les mœurs du clergé. Dans une autre congrégation, le vingtcinquième du même mois, Jean de Tarente parla de l'autorité fouveraine & néceffaire du pape; il dit qu'Eugene avoit eu un jufte fujet de diffoudre le concile de Bâle; que c'étoit à lui feul qu'il appartenoit de difpofer du temps & du lieu de la célébration des conciles; fans pouvoir en cela être foumis à d'autres. Il ajouta, que le pape défirant fur-tout que le concile fût tenu en faveur des Grecs, des Bohémiens & de la réformation des mœurs; & fa maladie, jointe à d'autres affaires importantes, ne lui permettant pas de quitter l'Italie, il offroit tel endroit foumis à l'état eccléfiaftique, qu'on voudroit choifir, qu'il mettroit au plein pouvoir du concile, & qu'il s'y transporteroit auffitôt, pour fe foumettre avant toutes chofes à ce qu'on décideroit fur la réforme, tant par rapport à luimême, que par rapport aux autres prélats & officiers qui en auroient befoin.

XXIV. Reponte des pères du con,

Ce difcours du légat du pape ne fut pas agréable au conile aux lé cile; & comme les pères avoient autant d'ardeur pour conpets du pape, tinuer le concile à Bile, que le pape Eugene en avoit pour

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