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AN. 1432.

des Carmes.

conf. 3.

temps après, voulut récompenser sa piété du chapeau de cardinal.

XXXII. Le quinzième Février de cette année le pape donna une Mitigation bulle, pour permettre aux Carmes de manger de la viande de la règle trois fois la femaine, & plufieurs autres adouciffemens, qui Bullar. tom. ôtèrent beaucoup de la première févérité de leur règle. Ce3. Eugen. IV. pendant Innocent IV l'avoit déjà mitigée en 1245, fept ans après que ces religieux furent venus en Europe avec le roi faint Louis, & fe furent établis en France. Ce pape XXXIII. approuva auffi & confirma, par une bulle du vingt-troiCongrégation de fainte fième de Novembre de la même année, la congrégation de fainte Juftine de Padoue, que Jean XXIII avoit déjà approuvée, & qui avoit reçu plufieurs priviléges de Martin V. Eugene IV les amplifia & en augmenta le nombre par deux autres bulles, la première du trentième Juin 1436, Ibid.conf. 5. & la feconde du vingt-quatrième de Novembre de la même

Juftine.

9. & 10.

XXXIV.

année. Cette congrégation étoit une réforme de l'ordre des Bénédictins en Italie, faite par Louis Barbe Vénitien, chanoine de faint George d'Alga, l'an 1409. Eugene rétractant ce que fon prédéceffeur en avoit ordonné, la rétablit plus fortement, fit beaucoup de lois pour la maintenir plus furement, & l'honora de beaucoup de nouveaux priviléges.

La faculté de théologie de Paris fut auffi confultée alors Centure fur par l'évêque d'Evreux & par l'inquifiteur de fon diocèfe les monitions fur une propofition que quelqu'un avoit avancée, que les des évêques. monitions des évêques font des abus ; & la déclara par fa Dupin, bibl. conclufion du feizième de Mai, injurieuse, présomptueu

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XXXV.

zier, hift. de

fe, téméraire, fcandaleufe, tendante à la fédition & à la rebellion, capable d'affoiblir les cenfures eccléfiaftiques contraire à la doctrine de Jefus-Chrift & des Apôtres, & favorable aux erreurs condamnées par le concile de Conftance.

En France la guerre fe faifoit prefque dans toutes les pro Affaires de vinces avec différens fuccès, mais très-foiblement, enforte France. qu'elle languit durant fept ou huit ans, à caufe de l'impuifJean Char- fance des deux partis qui manquoient d'argent, & qui ne Charles VII. pouvoient pas mettre de grandes armées fur pied. Ajoutons à cela la foibleffe des deux rois, de celui d'Angleterre qui étoit mincur, & de celui de France dont l'efprit étoit gouverné par fes favoris & par fes maîtreffes. Le comte d'A

rondel, général de l'armée Angloife, affiégea Saint-Célérin, & prit cette ville après plus de trois mois de fiége. De-là il AN. 1432. vint affiéger le château de Silé-le-Guillaume dans le Maine, qu'il emporta. Après ces expéditions il fit plufieurs courses dans les pays du Maine & d'Anjou, prit les châteaux de Mellai & de S. Laurent-des-Mortiers, dans lefquels il mit garnifon; enfuite il s'en retourna en Normandie. Mais ayant appris qu'un capitaine Gafcon nommé la Hire, & un autre appelé Ponton de Saintrailles, étoient entrés dans un vieux fort nommé Gerbroi à quatre lieues de Beauvais, le comte d'Arondel vint auffitôt devant cette place. La Hire & Saintrailles, à fon approche, fortirent de la place & vinrent l'attaquer. Quoique les Anglois fuffent trois fois plus forts en nombre que les François, cependant ils furent battus, & perdirent huit cents hommes qui demeurèrent fur la place. Le comte lui-même ayant été dangereufement bleffé, fut fait prifonnier, & mourut peu de temps après de fes bleffures; ce qui affoiblit beaucoup le parti des Anglois.

Dans ce même temps, Sforce qui étoit encore dans Rome pour y maintenir le pape Eugene, fut contraint d'en fortir, & de céder aux embûches & aux armes de Paul des Urfins. Il alla camper à Aldige, où le cardinal de Sainte-Croix de la famille des Colonnes l'alla trouver de la part du pape, pour le raffurer & l'obliger de revenir dans Rome. Hé quoi, lui dit ce cardinal, comment le grand Sforce craindra-t-il un Ours, ayant pour appui une fi ferme Colonne, faifant allu fion au nom des Urfins & à celui de fa famille. Mais Sforce lui répondit, qu'on pourroit avec raison le taxer de folie, fi, pendant qu'il imploroit en vain le fecours d'un marbre animé, il fe laiffoit furprendre par un animal d'une grandeur extraordinaire, qui pouvoit l'attaquer des dents & des ongles, & marcher vers lui à grands pas; défignant par ces paroles le fecours peu affuré des Colonnes, & les forces préfentes de Paul des Urfins. On met auffi fur la fin de cette année le fupplice de François Carmagnole, l'un des grands capitaines de fon temps, à qui les Vénitiens firent trancher la tête pour avoir été fufpect de trahifon auprès du duc de Milan.

XXXVI. Mort du com

te d'Arondel

XXXVII. Sforce fe re

AN. 1433

Arrivée des

Le quatrième de Janvier de l'année 1433, les députés des XXXVIII. Bohémiens arrivèrent à Bâle, & y firent leur entrée avec beaucoup de pompe, ayant trois cents chevaux à leur fuite. Le peuple accourut de tous côtés pour les voir, & ne pou- Bále.

députés des Bohémiens &

cardinal Ju

hémiens.

voit cependant foutenir leurs regards affreux, se souvenant AN. 1432. En. Sylv. des cruautés qu'ils avoient exercées pour défendre opiniâhift. Bohem. trément leur héréfie : fur-tout chacun avoit la vue arrêtée 8. 49. fur Procope, comme fur celui fans lequel Zisca n'avoit rien fait de confidérable, & qui depuis la mort du même Zisca, avoit défait le duc d'Autriche, & mis deux fois en fuite par fa feule présence toutes les forces de l'empire. Le concile les reçut avec toute la civilité due aux ambaffadeurs des têtes couronnées; & lorfqu'il fut question d'entrer en matière dans l'affemblée du neuvième Janvier, où ils furent admis, XXXIX. le cardinal Julien, préfident du concile, les harangua. Il s'éDifcours du tendit fort dans fon discours fur les maux qu'attiroit le schiflien aux Bo- me; & faifant ufage de la connoiffance qu'il avoit de l'écriture fainte, il prouva par un grand nombre d'endroits tirés Lubbe app de ces divins livres, que l'églife, époufe de J. C. étoit la I.cone. Bafil. 1.811. p. 894. mère de tous les fidelles, qu'elle avoit la puiffance de lier & de délier, qu'elle ne pouvoit errer dans les chofes qu'on croit néceffaires au falut; que ceux qui méprifoient fon autorité devoient être regardés comme des païens & comme des publicains; qu'elle n'étoit jamais mieux représentée que dans les conciles généraux, dont les décrets étoient ceux de route l'églife, & exigeoient une entière créance; que le concile de Bâle étant vrai & légitime, les Bohémiens, qui fe difoient enfans de l'églife, devoient écouter la voix de leur mère, hors laquelle on ne pouvoit fe fauver; qu'ils devoient commencer à fe défaire de toute haine, & à dépofer leurs armes ; & que s'ils étoient difpofés à fuivre les avis falutaires du concile, on les écouteroit avec bonté, & avec une entière liberté d'expliquer leurs difficultés, & de dire tout ce qu'ils voudroient pour défendre leur cause. Enfin, il conclut par une exhortation pathétique qu'il adreffe aux Bohémiens, & qui ne tend qu'à les engager à retourner au plutôt dans la communion de l'églife.

XL.

Roquefane, un des députés des Bohémiens, répondit au Réponse de nom de fes collègues, qu'il rendoit grâces à Dieu de ce qu'il Roquefane au les avoit tous confolés en les vifitant dans fa miféricorde, &

cardinal Ju- qu'il remercioit le cardinal Julien, & tout le concile, de la

lien.

Cochle hif, bonté qu'on vouloit bien leur témoigner, en les recevant Huffit. lib. 6. avec tant d'affection & d'une manière si généreuse : il ajouta qu'ils demeuroient tous d'accord des maux où entraînoit le fchifme, & de l'énormité des crimes que l'on commettoit

en

en l'occafionant ou en l'entretenant; mais que l'importance AN. 14:3. étoit de convenir de ceux qui en étoient les auteurs. Que les Bohémiens, bien loin de rejeter l'écriture fainte,prétendoient juftifier par elle tout ce qu'ils avançoient, & que l'autorité des faints pères leur étoit en grande vénération; qu'ils étoient venus au concile pour rendre raifon de leur créance, & qu'ils en demandoient la permiffion pour les laïques auffi-bien que pour les eccléfiaftiques, & fupplioient les pères de les entendre fur les quatre articles qui leur avoient déjà été envoyés. A quoi le concile confentit, & leur affigna le feizième jour du même mois de Janvier pour être entendus.

XLI.

Quatre arti

concile.

Ces quatre articles furent envoyés au concile fous ce titre: Articles préfentés au concile de la part du royaume de Bohé- cles des Bome, du marquifat de Moravie, &c. l'an de Notre-Seigneur hémiens pré1433, le jour de fête de faint Tiburce l'onzième d'Août, fentés au «Nous vous préfentons ces articles, difent les Bohémiens, » afin que, dans la vue de contribuer à la paix & à l'unité » fi défirable à tous les hommes, vous confentiez qu'on les » tienne en toute liberté, fans y rien changer; qu'on les en» feigne & qu'on les obferve irrévocablement, dans la Bo

hême, dans la Moravie & autres lieux qui en dépendent. » 1. Qu'on ait la liberté d'adminiftrer à tous les fidelles le

facrement de l'Euchariftie fous les deux efpèces du pain » & du vin, comme étant une pratique utile & falutaire. » 2. Que tous les péchés mortels, & principalement les » péchés publics, foient réprimés, corrigés & punis fe»lon la loi de Dieu, par ceux à qui cela appartient. 3. Que » la parole de Dieu foit prêchée fidellement & librement » par les prélats & les diacres qui y feront propres. 4. Qu'il »ne foit pas permis au clergé, dans la loi de grâce, » d'exercer aucune autorité féculière fur les biens tem"porels. "

Après avoir propofé ces articles, ils déclarent que tout leur différent avec les catholiques fe réduifoit à ces quatre propofitions; & qu'ils étoient prêts de s'unir à l'églife, de la manière dont tous les fidelles chrétiens font unis felon la loi de Dieu, & d'obéir à tous les fupérieurs légitimes, pourvu qu'on leur permit d'obferver parmi eux ces articles. Ils prient le concile d'expédier des lettres-patentes pour ordon ner à tous les primats, archevêques, évêques, rois, princes, & tous ceux qui leur font foumis, d'adhérer aux décisions Tome XV.

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Append. 1! conc. Bafil. 1.x.

art. 5. p. 8ol

du concile, comme ils promettent d'y adhérer eux-mêmes; AN. 1433. & demandent qu'il foit fait défenfes de les traiter d'hérétiques eux & ceux de leur parti, foit en public, foit en particulier, ou de les diffamer de quelque autre manière que ce foit, & de s'emparer de leurs biens pour tous ou quelqu'un de ces articles, & principalement le premier, qui eft, difentils, de précepte divin, jusqu'à ce qu'on ait pleinement examiné ces articles enfemble & dans un efprit de paix, & qu'il y ait eu un accord mutuel.

XLII.

cles dans une

morum

Orth, Grat.

Ces quatre

quatre articles furent donc examinés dans l'affemblée Examen des du feizième de Février: Roquefane parla fur le premier arquatre arti- ticle pendant trois matinées entières. Venceflas Thaborite congréga- en employa deux autres à parler du fecond article touckant tion. la correction des péchés publics. Uldaric prêtre, parmi les In Fafcic. rerum.De vo- Orphelins, parla auffi pendant deux jours fur le troisième catione Bohe- article, qui regardoit la libre prédication de la parole de per Dieu; & Pierre Payne Anglois difcourut pendant trois jours fur le quatrième article, du domaine civil des clercs. Nous n'avons pas tous ces difcours des députés de Bohême, dans les actes du concile, mais feulement le rapport d'Æneas Syl. vius, qui y étoit préfent, qui a fait un abrégé fort clair de la convocation des Bohémiens, de ce qui s'y paffa en leur faveur, & de ce qui y fut conclu. Ils laifsèrent au concile un précis de leurs disputes, & rendirent grâces aux pères de l'audience favorable qu'ils leur avoient donnée. Cependant le concile n'eut pas lieu d'être content des trois derniers députés, qui louèrent beaucoup Wiclef & Jean Hus fur leur doctrine, jufqu'à les appeler des docteurs évangéliques, que l'églife avoit condamnés il n'y avoit pas long-temps, & dirent plufieurs autres chofes peu agréables; mais le concile ne confultant que le bien de la paix, ne voulut point les interrompre.

XLIII.

Cependant comme ce qu'ils avoient propofé méritoit une Réponse des réponse, Jean de Ragufe, profeffeur en théologie, & propères du concile aux Bo- cureur général des Dominicains, demanda à haute voix en hémiens. pleine affemblée qu'on lui accordât la liberté de répondre en Concil. génér. fon nom au premier article. Le concile y confentit ; & il parla fur ce fujet pendant huit matinées. Avant qu'il commençât, Jean abbé de Citeaux exhorta les Bohémiens à fe foumettre aux décrets de l'église leur mère, que le concile repréfentoit; ce qui les offenfa beaucoup. Jean de Ragufe les ir

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