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avec beaucoup de violence; que leur infolence ne pouvoit AN. 1433être punie que par un foulèvement général pour prévenir le deffein qu'avoient les Huffites de les exterminer auffitôt qu'ils les auroient dépouillés de leurs biens.

La noblesse & la bourgeoifie n'étoient que trop convaincues de ces raifons; mais la première n'avoit point d'argent, & la feconde ne trouvoit pas affez de fureté à lui en prêter. Les députés du concile fâchés qu'un obftacle fi peu confidérable empêchât le rétabliffement de la religion catholique en Bohême, écrivirent à Bâle des lettres fi preffantes, qu'on y fit une quête pour les néceffités extraordinaires de ce royaume. On ne trouva que dix-huit mille écus; & cette fomme, fi peu proportionnée au befoin, ne laiffa pas de produire tout l'effet que l'on pouvoit attendre d'une plus grande, parce qu'elle fut mife entre les mains du plus habile & du plus zélé gentilhomme de Bohême. C'étoit un nommé Mai- Naucler ila nard de Neuhaux ou de la Maifon-neuve, officier de guerre, p. 451. vaillant & expérimenté, qui fe piqua de devenir le libérateur

de fa patrie.

LXV. Douzième

Bâle.

de

Cependant on tint la feffion douzième le lundi treizième de Juillet. Les pères s'y plaignirent fortement de la mauvai- feftion du fe foi du pape, qui ouvroit, dirent-ils, un chemin affu- concile ré à fes fucceffeurs, de fe déclarer prévaricateurs des dé- Labbe conc. crets des conciles, & d'en rabaiffer l'autorité. Ils lui repro- . xi. p,sos. chèrent les efforts qu'ils avoient fait pendant dix-huit mois entiers, pour le fléchir, & pour l'engager à favorifer le concile de Bâle, mais que fon obftination avoit toujours rendu inutiles.

Ils vouloient prononcer contre lui un arrêt définitif de condamnation, de peur que leur patience ne leur fùt préju diciable,& qu'elle ne lui donnât lieu de s'opiniâtrer davantage dans fes mauvais deffeins: mais à la prière de Sigifmond, ils fe contentèrent de le fommer encore une fois à révoquer, après foixante jours, le deffein qu'il avoit projeté de rompre & de transférer le concile, fous peine d'être regardé comme contumax & pécheur public. Ce décret eft conçu en termes extrêmement forts: on y traite le pape d'in- citation con. corrigible, d'homme qui fcandalife toute l'églife, & on le tre le pape Eugene. déclare fufpens de toute administration du pontificat; on Ibid. p. 509 fait défense de lui obéir, & l'on enjoint aux prélats de venir

au concile.

LXVI.

Décret da

AN. 433.

Dans cette même feffion, le concile fit un autre décret; LXVII. dans lequel on renouvela le droit des élections établi par Décret tou- les Apôtres, & confirmé par le premier concile de Nicée chant les é dans les canons quatrième & cinquième. Ce décret porte: Labbe conc. I. que le pape ne peut fe fervir des réserves faites ou à tom. xII. p. faire au faint fiége, des églifes métropolitaines, cathédra

lections.

513.

les, collégiales, monaftères & dignités électives, excepté celles qui font renfermées dans le droit, & qui font dans les terres dépendantes de l'église de Rome; mais qu'on y procédera par élection, fans pourtant porter aucun préjudice aux priviléges & aux coutumes contenues dans la difpofition du droit. 2. Le concile ordonne que le pape, le jour qu'il fera créé, promettra par ferment d'observer inviolablement ce décret. 3. Il commande à ceux qui ont droit d'élection, de n'élire que des fujets dignes & capables de remplir les dignités eccléfiaftiques, & afin qu'une chofe de cette conféquence ne fe faffe pas légèrement, il veut que le jour de l'élection les électeurs s'affemblent dans l'églife, pour y entendre avec dévotion la meffe du Saint-Efprit, dans laquelle ils communieront après s'être confeffés, afin d'obtenir de Dieu les lumières néceffaires au choix d'un digne fujet. Qu'enfuite étant entrés dans le lieu de l'élection, ils jureront tous entre les mains de celui qui préfide, & celuici entre les mains de celui qui le fuit immédiatement, qu'ils éliront un homme digne & utile à l'églife, foit évêque ou abbé ; qu'ils ne donneront point leur voix à un homme qu'ils foupçonneront raifonnablement d'avoir brigué cette dignité pour lui, ou par follicitation, ou par promeffe d'argent. Le concile prefcrit la formule de ce ferment. 4. Il eft ordonné qu'on élira des perfonnes d'un âge avancé, de bonne mœurs, Conc. Labbe, qui foient dans les ordres facrés; & l'on défend les élections t. xII. fel.12. fimoniaques, on les déclare nulles, & l'on prive du droit Conc. Bafil. d'élire ceux qui les auront faites. 5. Enfin les pères exhortent les princes, les communautés, & autres de quelques conditions qu'ils foient, de ne point interpofer leur crédit dans les élections, foit par lettres, foit autrement, pour ne point porter préjudice, ni faire aucune violence à leur liberté.

decr. de elect.

Eugene fut fort mécontent des décrets que l'on fit dans cette feffion, & fur-tout du premier; & comme le refus que le concile avoit fait depuis peu de recevoir & d'en

Lettre d'Es

tendre les légats qu'il avoit envoyés pour traiter avec ledit concile touchant la translation qu'il vouloit en faire à Bou- AN. 1433logne, l'avoit déjà fort irrité: il donna une déclaration le 29e. de Juillet, par laquelle il caffa toutes les citations, procédures & décrets qu'on avoit faits contre lui à Bâle, contre le faint fiége & les cardinaux, & tout ce qu'ils entreprendroient de faire à l'avenir, excepté ce qu'il leur avoit promis de traiter. Il parut fe radoucir peu de temps après; & en effet, il écrivit une lettre datée du premier Août, dans lagene aux pèquelle il marque qu'ayant fula raison pour laquelle on avoit res du concirefulé les légats qu'il avoit envoyés, il déclare à l'instance le. de l'empereur, & par le confeil de trois cardinaux, les feuls qui étoient demeurés auprès de lui, que pour ôter toute occafion de fchifme, il approuve le concile depuis fon commencement, de même que fa continuation, afin qu'on pût travailler tranquillement à extirper les héréfies, les guerres, les déréglemens des mœurs, & les autres abus; promettant de fe comporter à l'avenir comme s'il n'y avoit eu de fa part aucune tranflation, ni rupture, qu'il révoquoit abfolument & entièrement; & de favorifer en tout & par-tout le concile, pourvu toutefois qu'on reçût fes légats, & qu'on abolît tous les décrets portés contre fa perfonne, fon autorité & fa liberté, contre le faint fiége, les cardinaux, prélats & d'autres qui lui demeuroient attachés. Par une autre lettre datée du treizième d'Août, il commet les mêmes archevêques & évêques, l'abbé Nicolas, pour demander au pape. concile la révocation des mêmes décrets, leur donnant auffi pouvoir de caffer & annuler tout ce qui avoit été fait de fa part contre l'autorité du même concile, & contre ceux qui le compofoient.

LXIX. Seconde lettre du même

LXX.

Mais comme ces deux lettres ne contentèrent point les pères du concile, qui prétendoient ne devoir, ni même ne pouvoir révoquer aucune des procédures qu'ils avoient faites, & que le pape étoit obligé de s'y foumettre purement & fimplement, comme étant inférieur au concile; Eugene fit éclater fon indignation contre les pères, & caffa de fa Le pape caffe pleine puiffance le décret de la douzième feffion fait contre la douzième lui, fes cardinaux & autres, par une bulle datée du treizième feflion. de Septembre. Il la rendit publique pour faire valoir fon autorité, & réprimer celle du concile autant qu'il étoit en lui : auffi déclara-t-il dans cette bulle qu'il caffoit le décret de la

le décret de

douzième feffion en vertu de la pleine puiffance & de l'au AN. 1433. torité dont il étoit revêtu comme pape; & qu'à l'égard des caufes qui l'avoient porté à diffoudre le concile, il n'y en avoit aucune qui ne fût très - raifonnable. On publia auffi plufieurs lettres en fon nom, où l'on prenoit vivement fa défense; mais il les défavoua dans la fuite. Ces lettres étoient adreffées à tous les fidelles, & l'on y racontoit tout ce qui s'étoit paffé dans cette affaire; l'auteur, quel qu'il fût, y expofoit les raifons pour lefquelles Eugene avoit transféré le concile à Boulogne, & réfutoit les objections qu'on avoit faites contre cette démarche, & les accufations intentées contre le pape. Il blâmoit ouvertement la fermeté que les pères du concile avoient témoignée en cette occafion, & la faifoit paffer pour une obftination condamnable, qui attaquoit l'autorité du faint fiége & de l'églife catholique ; que c'étoit un crime énorme d'approuver leur conduite. Pour lui, il protestoit que jamais il n'y consentiroit ; & ajoutoit que, quand un pape & un concile n'étoient pas d'accord, c'étoit au pape à imposer la loi : qu'il falloit fuivre fes volontés, parce qu'il avoit puiffance fur les conciles; à moins qu'il ne s'agît de déterminer quelque point de foi, ou que tout l'état de l'églife courût rifque d'être troublé, faute de faire tout ce qui feroit ordonné, auquel cas l'on devoit plutôt fuivre l'avis du concile. Il difoit encore, que les pères du concile étoient dans l'erreur, de croire qu'ils fuffent en toutes choses fupérieurs au pape, que cette opinion étoit une héréfie ; & il exhortoit les princes & tous les catholiques de leur perfuader de fe défifter de leurs entreprifes, & de recevoir fes légats, afin que compofant tous enfemble un concile canonique, ils puffent légitimement remplir les fins du concile. Mais,s'ils veulent, continue-t-il, s'obftiner à divifer l'églife, comme ils ont entrepris de le faire jufqu'à préfent: je vous invite (il parle aux princes & à tous les fidelles) à réfifter de tout votre pouvoir aux pernicieux deffeins de ce faux concile, afin d'empêcher un fchifme dans l'églife, puifque c'eft à vous à maintenir la paix, & à ne point permettre qu'on tienne des conciliabules fans l'autorité du pape. On regarde Lettres de ces lettres comme fuppofées.

LXXI.

l'empereur L'empereur Sigifmond voyant que les deux partis s'échauf au pape pour foient beaucoup, & que les fuites pourroient être funeftes concile, au bien de l'églife, s'intéreffa fort en faveur du concile. Il

continuer le

écrivit

AN. 1433.

écrivit plufieurs lettres au pape Eugene, dans lefquelles il lui représentoit le fcandale que la diffolution d'un concile Conc. tom. auffi refpectable que celui de Bâle produiroit dans l'églife & x11. p. 953. le tort qu'elle feroit à fa réputation. » Nous prions, dit-il, & feq. » dans la première lettre, & nous conjurons votre fainte»té, qui, par le fouverain apoftolat dont elle fait les fonc» tions, doit s'intéreffer dans cette affaire autant que nous, » de protéger le concile, & de pourvoir à fa continuation; » parce qu'en le troublant, elle ne feroit que travailler à » la deftruction de la république chrétienne & à l'accroif» fement des héréfies: au contraire, en le fortifiant & lui » accordant fa protection, elle procurera les remèdes né» ceffaires à la foi & à la religion. Nous vous fupplions

"

"

» donc, dit-il dans une autre lettre, & nous vous requérons Ibid. p. 955. » en Jesus-Chrift avec toute l'affection dont nous fommes » capables, que vous faffiez attention à la ruine entière qui » menace la religion chrétienne, & que vous daigniez y » apporter le remède mandez & écrivez au président du » concile & à tous les pères, d'achever heureusement ce » qu'ils ont commencé, au nom du Saint-Esprit dans lequel » ils font affemblés; que votre fainteté révoque, après avoir » bien examiné les chofes, tout ce qu'elle a dit, fait, écrit » & ordonné de contraire, & qu'elle accorde fa faveur au » concile, comme la néceffité le demande. Si cela ne se fait "promptement, l'églife va tomber dans des embarras terri»bles qui la conduiront à fa ruine, principalement en Alle» magne, qui, je le dis avec douleur, eft fur le penchant » de fa perte. »

LXXII.
Treizième

Bâle.

On célébra la treizième feffion le vendredi onzième de Septembre, à laquelle fept cardinaux fe trouvèrent, avec un grand nombre d'évêques, tous en habits pontificaux. Leter- feflion du me de foixante jours, donné au pape Eugene, étant près concile de d'expirer, les promoteurs demandèrent qu'on le déclarât Labbe, conc. contumax ; & comme on étoit prêt de procéder abfolument to XII. P. à fa condamnation, les évêques de Spalatro & de Cervia $15. comparurent dans l'affemblée de la part du pape, & proteftèrent que le terme n'étoit pas encore expiré : mais le cardinal Julien leur répondit qu'ils étoient mal informés, & leur demanda au nom du concile, s'ils avoient le confentement du pape Eugene pour la célébration & continuation du concile; mais comme ils n'avoient qu'une bulle de Tome XV. D

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