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Quoiqu'elle n'ait guéres plus d'une lieue dans fa plus grande largeur, elle eft longue d'environ feize milles de l'Eft-Nord-Eft au Oueft-SudOuest. La nature l'a fortifiée par une chaîne continuelle de rochers qui s'étendent fort loin dans la Mer; & du côté de l'Eft où cette chaîne eft moins forte, les Habitans y ont ajoûté des Forts, des Batteries, des Parapets & des lignes, Toutes les Bermudes forment ensemble la figure d'un croiffant, & malgré leur multitude elles font contenues dans l'efpace d'environ fix ou fept lieues.

Nous eûmes affez de peine à trouver le moyen d'aborder au Port de Saint Georges. Il n'y a que deux endroits par lesquels il puiffe recevoir les Vaiffeaux; & les rochers, dont une partie eft cachée fous l'eau jufqu'à la furface, en rendent l'accès fi difficile, que fans un bon Pilote, il est prefqu'impoffible de trouver le Canal. Mais les plus grands Vaiffeaux entrent fans peine par la véritable route. La difficulté de l'accés, & la certitude du naufrage pour ceux qui s'approchent fans précaution, a fait

donner par les Efpagnols le nom d'Ifles du Diable aux Bermudes. Après beaucoup d'observations nous entrâmes heureusement dans le Port. Il eft défendu par fix ou fept Forts, où l'on ne compte pas moins de foixante-dix pieces de canon. La Ville de SaintGeorges eft fituée au fonds. Les noms des Forts font King's-Castle, Charles-Fort, Pembrook-Fort, CavendisFort, Davyes-Fort, Warwick-Fort, & Sandy's-Fort.

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Quoique la dépendance des Ifles Bermudes ne foit pas fort gênante,elles ont un Gouverneur nommé par l'Angleterre. Nous ne lui communiquâmes point le projet de notre pêche qui nous auroit obligé peut-être à quelque nouveau Traité; mais feignant d'être partis de la Jamaïque pour nous rendre à la Caroline, nous lui demandâmes feulement la permiffion de profiter, pour › pour fatisfaire notre curio-fité, du vent qui nous avoit jettés dans fon Ifle. Il y joignit toutes fortes d'honnêtetés & de careffes. La Ville eft compofée d'environ mille maifons, affez bien bâties. Elle eft ornée d'une très-belle Eglife, & d'une Bibliothé

que publique, dont elle a l'obligation au Chevalier Thomas - Bray, le Patron des Sciences en Amérique. On y voit auffi une fort belle falle

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pour les Affemblées publiques. Outre la Ville de Saint-Georges qui eft le centre de fon Canton, il y a dans l'Ifle huit autres Habitations, qui portent le nom de Tribus. Leurs noms font, Hamifton-Tribe, Smith'sTribe, Devonshire-Tribe, PembrookTribe, Paget's-Tribe, Warwick-Tribe, Southampton-Tribe, & Sandy'sTribe. Devonshire au Nord, & Sou, thampton au Sud, font des Paroiffes qui ont chacune leur Eglife, avec une Bibliothéque. Il n'y a point de Paroiffes dans aucune des petites Ifles, & tous leurs Habitans font rangés fous quelqu'une des huit Tribus de l'ifle de Saint-Georges. Dans le quartier de Southampton,eft un petit Port de même nom. On en trouve quelques autres autour de l'Ifle, comme celui du Great Soud, celui d'Harrington dans la Tribu d'Hamilton, & celui de Paget dans la Tribu qui porte ce nom.

Le climat, dans les Bermudes, eft un des plus fains & des plus agréables

du monde ; &, fi l'on excepte les défordres qu'y caufent quelquefois les ouragans, rien n'égale la beauté & la férenité qui pare continuellement la face du Ciel. On n'y connoît point d'autre faifon que le Printemps; & quoique les arbres y perdent leurs feuilles, il leur en renaît de nouvelles pendant que les autres tombent. Les oifeaux s'y accouplent dans tous les mois de l'année, & tout le Païs eft fans ceffe rempli de grains, de fleurs, & de fruits délicieux. A la vérité le tonnerre y cause souvent des caufe fouvent des ravages extraordinaires, jufqu'à fendre les rochers les plus durs & les plus épais. Ces fortes d'orages ne manquent point de revenir au commencement des nouvelles Lunes, & l'on obferve que lorsqu'il paroît un cercle autour de la Lune, la tempête eft toujours terrible. Les vents du Nord dominent auffi dans l'Ile vers les mois qui répondent à notre hyver. La pluie n'y eft pas fréquente, mais elle n'y eft jamais moderée; & l'obfcurité qu'elle répand dans l'air, à quelque chofe d'effraïant. On y voit rarement de la neige. Le terroir eft de differentes couleurs dans tou

tes les Ifles, & par une conféquence affez ordinaire, il y eft de différente nature. Le brun eft le meilleur. Celui qui eft blanchâtre, & qui tire fur le fable, n'eft guéres inférieur; mais le rouge, qui reffemble à l'argile, est abfolument mauvais, Deux ou trois pieds au-deffous de la premiere couche, ou trouve une matiére folide que les Habitans appellent le roc, mais avec peu de raifon; car il n'eft pas plus dur que la marle, & les pores en font auffi larges que ceux de la pierre de ponce. Ces pores contiennent beaucoup d'eau, & malgré les raifons qui lui font donner le nom de roc, les racines des arbres y pénétrent, & n'en reçoivent pas moins leur nourriture. On trouve communément de l'argile au-deffous. La plus dure de cette espèce de roc eft toujours fous les terres rouges. Elle reçoit un peu d'eau ; & fa forme est par couches, comme celle des ardoifes dans leur carriere.

Il n'y a prefque point d'eau fraîche dans les Bermudes. Celle dont les Habitans font ufage vient de ces rocs, au travers defquels elle fe diftille; mais

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