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1542.

'de fe retirer. Ce fut là le plus grand exploit des François devant Perpignan, mais il ne fervit qu'à Mém. de du la gloire particuliere de Briffac. Le Bellay, 1. 9. Dauphin, qui en fut témoin, publia & envia noblement la valeur 'de Briffac; il devoit être jaloux 'dans plus d'un genre de ce brave & galant Chevalier; ce fut lui que la Ducheffe de Valentinois préféra, dit-on, en fecret à fon Maître, & que la jaloufie habile de Henri combla d'honneurs militaires pour l'éloigner des faveurs de l'a- Sleidan,

mour.

Cependant la faifon avançoit, l'hyver approchoit, les torrens commençoient à tomber des montagnes, le camp alloit, pour ainfi dire, fe trouver enfermé entre deux mers. Le Roi ordonna au Dauphin de lever le fiege; il étoit temps, les torrens & les rivieres s'étoient tellement enflées que l'arriere-garde en fouffrit confidérablement; des corps entiers tant de Cavalerie que d'Infanterie, pafferent à la nage, il y eut plufieurs foldats noyés ;

Commentar 1. 14.

1542.

cependant les Efpagnols qui vou→ lurent troubler la retraite des François, ne purent les entamer & furent repouflés avec quelque perte, mais la délivrance de Perpignan fit le plus grand honneur au Duc d'Albe, (1) qui l'avoit défendu.

Le mécontentement qu'eut le Roi du mauvais fuccès du fiége de Perpignan & de l'affront que fon fils venoit de recevoir prefque fous fes yeux, éclata par la difgrace de Montpefat (2), à laquelle ne contribuerent pas peu les plaintes du Roi & de la Reine de Navarre qui ne pouvoient lui pardonner de Pavoir emporté fur eux pour l'expédition de Rouffillon; cependant quelque défectueux que pût être le plan propofé par Montpefat, il paroît qu'on auroit pú en tirer parti fi l'exécution eût été plus prompte & plus exacte. Mais la Cour veut

(1) Ferdinand Alvarès de Tolede, Duc d'Albe. (2) Cette difgrace ne dura pas long-temps. Montpefat fut fait Maréchal de France le 13 Mars 1544, à la place du Maréchal d'Aubigny.

'des fuccès & punit le malheur, elle
exige du moins que l'auteur d'un
fyftême nouveau, › par
par conféquent
combattu, prévoie des défauts dans
l'exécution, & qu'il affure le fuccès
malgré ces défauts prévus.

Si les armes Françoifes acquirent peu d'honneur à leur Roi dans cette expédition du Rouffillon, fa généreufe équité lui acquit une gloire plus précieuse & plus perfonnelle que celle des armes dans l'occafion que voici. Les Italiens du parti François avoient enlevé un grand nombre de femmes Efpagnoles dans l'espérance d'en tirer rançon, c'étoit un procédé de Corfaires, contraire à la décence & à l'honnêteté que les Nations Chrétiennes font convenues de conferver en s'entre-détruisant. Les Espagnols en firent de juftesplaintes; les Italiens leur rappelle-, rent les cruautés exercées par les Efpagnols au fac de Rome, où ceuxci non-contens de tirer rançon des femmes, leur avoient encore arraché les enfans à la mammelle, pour les faire racheter à leurs parens ;

E vj

1542

Paul Jov. hiftor. fui temporis.

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ce n'étoit donc qu'une répréfaille; 1542. mais elle étoit atroce, & le Roi ne Dupleix. pouvoit la permettre. Il s'exécuta lui-même. Les Espagnols ne racheterent point leur femmes les Italiens ne perdirent point leur proie, le Roi paya à ceux-ci les rançons qu'ils defiroient, & renvoya les femmes Espagnoles à leurs maris & à leurs parens. C'est ainfi que les Rois devroient toujours réparer à leurs dépens les crimes & les torts qu'ils caufent en ordonnant la guerre, mais l'action de François I. n'en mérite pas moins d'être admirée.

Avec un nouveau nouveau fyftême de guerre on avoit eu auffi un nouveau fyftême d'alliance fur lequel nous nous arrêterons peu, parce qu'il ne produifit rien. Deux Etats féparés l'un de l'autre par une grande Puiffance doivent naturellement s'allier, parce qu'ils ont l'intérêt commun de s'unir contre elle, & qu'ils n'ont point d'intérêt particulier de fe nuire l'un à l'autre. On avoit déjà compris que les Etats du Nord pourroient avoir une grande

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influence fur les affaires de l'Alle-
magne, fi la France s'allioit avec
eux. C'eft ce qui avoit donné lieu
à l'alliance avec le Dannemarck en
[1518 (1). Ce ne fut plus avec un
tyran tel que Chriftiern qu'on s'al-
lia en 1542, ce fut avec le vain-
queur heureux de ce monftre. Guf-
tave Vafa échappé des fers de Chrif-
tiern, errant, profcrit, caché au
fond des forêts de la Dalécarlie,
déguisé en paysan, changea les
payfans eux-mêmes en foldats &
en héros; il brisa le joug des Da-
nois, il délivra la Suéde fa patrie
qui par reconnoiffance l'éleva fur
le trône, autrefois occupé par fes
peres, ufurpé depuis par la tyran-
nie & fouillé par les crimes des.
Christiern. Guftave ayant établi le
Luthéranisme dans fes Etats & dé-
pouillé le Clergé qu'il eût fuffi de.
réprimer, la France le jugea propre
à devenir le défenfeur du parti Pro-
testant d'Allemagne & de la Ligue

1542,

(1) Voir le chap. s. de la premiere partie,

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