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qualité de Poëte, fa gloire ne feroit point à l'épreuve de la critique; une verfification dure & négligée, peu de fentiment, point de pathé→ tique, aucun de ces grands mouvemens qui excitent les paffions, & annoncent le génie, des refforts plus dignes de Thalie que de Melpomene, feroient des défauts qui le rendroient inférieur à plufieurs de nos Poëtes Tragiques, qui n'ont pas cependant réuffi comme lui.

Malgré cela, il aura au deffus d'eux la gloire d'avoir rappellé parmi nous la Tragédie à sa véritable destination, en y retraçant, comme chez les Grecs, des événemens nationaux, & en offrant à fes compatriotes des Héros propres à les attendrir & à exciter leur émulation. Un zèle auffi noble, foutenu d'ailleurs par une grande. connoiffance de la méchanique du Théatre, fuffit pour lui faire pardonner les défauts de l'exécution ; & M. de Belloy a pu dire avec l'Auteur de l'Anti-Lucrece :

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Eloquio veci, re vincimus ipfâ.

Il n'eft pas inutile de remarquer que cet Auteur, dont le caractere fut toujours éloigné de la bassesse & des maneges qui menent à la fortune, auroit été, dans fa derniere maladie, privé des fecours qu'exigeoit fa fituation, fi la bienfaifance éclairée de notre jeune Monarque ne se

fût empreffée de prévenir fes befoins. Un Prince qui honore ainfi les Lettres, eft digne de tous leurs hommages.

Il vient de paroître une édition complette de fes Œuvres en 6 vol. in-8° où le trouvent plufieurs morceaux qui n'avoient pas encore vu le jour.

BELSUNCE DE CASTELMORON, [ HenriFrançois-Xavier DE ] Evêque de Marseille, né dans le Périgord en 1671, mort en 1755.

Ses: Ouvrages. hiftoriques, font remplis de recherches & d'érudition, & fes Ouvrages afcétiques refpirent une piété douce qui fait aimer la Religion, & porte le cœur, à en pratiquer les devoirs. Son ftyle eft fimple, naturel & dégagé d'ornemens..

Sa réputation dans les Lettres fait la moindre partie de fa gloire. On n'oubliera point que, dans le temps de la pefte de Marfeille, il n'abandonna jamais fon troupeau. On le vit alors courir de maison en maifon, pour exercer, à l'égard d'un peuple malheureux, tous les devoirs de fon miniftere & de la charité. La Philosophie a bien pu garder le filence fur un courage fi propre à honorer la Religion; elle ne pourra jamais en donner des exemples. L'égoïfme qu'elle prêche est l'anéantissement de toutes les vertus, & principalement de celles qui demandent du courage &... des facrifices.

BENOIT, Françoife-Albine DE LA MARTINIERE] née à Lyon en 17..

Une mauvaise Comédie, telle que le Triomphe de la Probité, & des Romans médiocres, comme Elizabeth, Céliane, &c. font des titres capables de faire figurer une femme avec avantage dans la Société, & non des droits aux honneurs de la Littérature.

BENSERADE, [ Ifaac DE ] de l'Académie Françoise, né à Lyons, petite ville de la haute Normandie, en 1612, mort à Paris en 1691.

Pour avoir eu, pendant fa vie, une réputation au deffus de fon mérite, ce Poëte eft aujourd'hui beaucoup moins eftimé qu'il ne vaut. La postérité devient toujours févere à l'égard des Auteurs, dont les contemporains ont été trop légérement enthousiaftes. On ne peut refufer à Benferade une facilité finguliere pour compofer des Vers fur toutes fortes de fujets. C'est lui qui a fait la plus grande partie des Chanfons, fur lefquelles le célebre Lambert a mis les airs les plus beaux & les plus touchans. On lit encore avec plaifir les vers qu'il fit pour les Ballets qu'on repréfentoit à la Cour de Louis XIV, avant qu'on connût l'Opéra, & dont la mufique & la danfe formoient toute l'économie, Les paroles qu'il avoit l'art d'adapter à ces fortes de diver

tiffemens, convenoient parfaitement au caractere des Dieux & des Déeffes qui y figuroient, en même temps qu'ils offroient une peinture délicate des mœurs, des inclinations, des qualités des Danfeurs qui repréfentoient ces Divinités.

Benferade mit en Rondeaux les Métamorpho→ fes d'Ovide. Ce travail ne lui fait honneur, que parce qu'il fut entrepris par ordre du Roi & pour l'usage de M. le Dauphin. Les ordres des Princes peuvent inspirer du zele, mais ne donnent pas les talens. Cet Ouvrage en eft la preuve. Rien ne fut négligé pour le décorer de tout le luxe typographique. Il fut imprimé au Louvre fur le plus beau papier, & orné de figures magnifiques. Tant de foins ne purent le garanrir de l'épigramme. Chapelle répondit à l'Auteur, qui lui en avoit envoyé un exemplaire, par un Rondeau qu'il finit ainfi :

De ces rondeaux un livre tout nouveau

A bien des gens n'a pas eu l'art de plaire ;
Mais quant à moi, je trouve tout fort beau
Papier, dorure, image, caractere,
Hormis les vers, qu'il falloit laiffer faire
A la Fontaine.

Ces Rondeaux eurent néanmoins pour Parti fans les perfonnes les plus diftinguées de la Cour, ce qui ne tournoit pas à la gloire de leur goût. Le Duc d'Enghien, fils du grand Condé, n'eut

pas le pouvoir de convertir Boileau, qui les méprifoit. Mais les vers en font clairs, difoit ce Prince à l'Auteur de l'Art poétique, ils font parfaitement rimés, & difent bien ce qu'ils veulent dire. » Monseigneur, lui répondit Boileau, il y » a quelque temps que je vis une Estampe qui représentoit un foldat qui fe laiffoit manger » par les poules, au bas de laquelle étoit ce distique :

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Le Soldat qui craint le danger,

Aux poules fe laisse manger.

» cela eft clair, cela eft bien rimé, cela dit ce » que cela veut dire, cela ne laiffe pas d'être le plus plat du monde, ajouta le Prévôt du >> Parnaffe «<,

BERARDIER DE BATAUT [ François-JoSeph ] Licentié en Théologie, Prieur - Commandataire de Notre-Dame de Serqueux, & ancien Profeffeur d'Eloquence dans l'Université de Paris, né à Paris en 1720.

Son Précis de l'Hiftoire univerfelle, plufieurs fois réimprimé, eft très-propre à fervir d'introduction à l'étude de l'Hiftoire, & à guider les pas de ceux qui veulent parcourir avec fruit cette vaste carriere, où la vérité se trouve si souvent confondue avec le menfonge & l'erreur. On y faifit fans effort, & pour ainfi dire d'un coup

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