Imágenes de páginas
PDF
EPUB

qu'il pût dire pour déguiser ses intentions. Ensuite

AN. 1403. après qu'on eut ôté la garde devant le palais d'Avignon, les bourgeois qui lui avoient fait une fi cruelle guerre, vinrent le fupplier de leur rendre fes bonnes graces; ce qu'il leur accorda, en abolissant la memoire du paffé, à condition toutefois que les magistrats,auf- . quels il ne voulut plus fe fier, repareroient les brèches qu'on avoit faites au palais, dans lequel il mit une forte garnifon de foldats Arragonois.

XIV.

Il écrit au roi de

France pour lui

Benoît écrivit au roi de France pour lui notifier fa fortie. Il lui protefte qu'étant en liberté, il pourra plus. potifier fa fortie. sûrement & plus honorablement avec le fecours de Dieu, poursuivre la paix & l'union, comme il eft expedient pour le fervice de l'églife; que fi l'on tâche de détourner la nobleffe de la créance qu'elle doit avoir en ce qu'il promet, il la prie & l'exhorte de n'y point ajoûter foi, & qu'il ne tiendra jamais à lui qu'il n'acHift. univerf compliffe fa promeffe. Il écrivit auffi aux princes & à l'univerfité de Paris de belles lettres, dans lefquelles, après les avoir affuré de fon zele pour la paix de l'égli fe, il demandoit la reftitution de l'obéiffance qui lui étoit dûë, & qu'on renonçât à la fouftraction.

Parif. tom. IV.

X V.

Il fe reconcilie

qui l'avoient

abandonné.

[ocr errors]

Les cardinaux qui l'avoient abandonné,travaillerent avec les cardinaux auffi à fe réconcilier avec lui. Il fe fit un peu prier: mais après leur avoir fait beaucoup de reproches fur leur conduite paffée, & les avoir exhortez à être à l'avenir plus fideles, il leur pardonna, & révoqua la bulle de dégradation, qui les rendoit incapables d'élire un pape, quand l'occafion s'en prefenteroit, & qu'il avoit fulminée contre eux. Ils fe rendirent auprès de lui le vingt-neuviéme d'Avril, ils lui demanderent pardon à genoux, & Benoît les retint à dîner en figne de reconciliation: mais ce ne fut pas fans quelque crainte de

[ocr errors]

P

leur part; car n'aïant vû à table les places remplies que d'officiers de guerre, & toute la falle pleine de AN. gens- 1. 1403. d'armes, au lieu de prélats & autres officiers ecclefiaftiques qu'ils s'attendoient d'y trouver, ils s'imaginerent qu'on les alloit tous maffacrer. Cependant ils en furent quittes pour la peur, le pape aïant interêt de les ménager ; & n'étant occupé alors que de la sûreté de sa perfonne, pour laquelle il ne laiffoit pas de craindre, quoiqu'une forte garde l'accompagnât à l'églife, & l'environnât jufqu'à l'autel. Il paroît qu'il n'y eut que quatre cardinaux, qui étoient Gui de Maillezais, cardinal du titre de fainte Croix, appellé le cardinal de Poitiers, parce qu'il en fut évêque; Nicolas de Brancas, cardinal d'Albe; Amedée de Saluces, cardinal de faint Marc; Pierre, cardinal de faint Ange. Ces quatre avoient procuration de ceux qui étoient reftez à Avignon.

XVI. Traité du pape

naux.

D. Martene

1266.

tom. 2. p.

Après la réconciliation, le pape & fes cardinaux firent dans toutes les formes un traité, où furent com- avec les cardipris les bourgeois & les citoïens d'Avignon. Louis d'Avignon en fut le médiateur, & tout fe conclut en Anecd. prefence du cardinal de Pampelune, de Jacques du Prat, parent de l'empereur Robert, des ambaffadeurs du roi d'Arragon, & de ceux du duc d'Orleans. Les conditions du traité furent. 1. Que le pape accorderoit une entiere amniftie aux cardinaux & aux citoïens d'Avignon. 2. Que toutes chofes feroient rétablies comme elles étoient avant la fouftraction, 3. Que les cardinaux & les habitans de la même ville lui rendroient l'obédience. 4. Que les cardinaux emploïeroient tout leur crédit & tout leur pouvoir à lui faire rendre la même obedience en France. 5. Enfin, qu'alors il assembleroit un concile de toute fon obédience.

XVII.

Le pape envoïe

France.

Juven. des Vrfins

En même temps le pape envoïa en France les cardiAN. 1403. naux de Poitiers & de Saluces, qui étoient rentrez dans fon parti depuis plus de fix mois. Leur commiffion deux cardinaux en étoit de négocier la reftitution de l'obédience, à laquelle ils trouverent de grands obstacles; mais les conhift. de Charles teftations qui durerent affez long-temps finirent par les intrigues du duc d'Orleans, qui détermina Charles VI. à rendre à Benoît ce qu'il exigeoit de lui. Ces deux cardinaux furent admis à l'audience du roi le quinziéme de Mai dans l'hôtel de faint Pol. Les ducs de Berri, de Bourgogne & d'Orleans y furent presens, avec beauMoine de S. Denis Coup d'autres grands feigneurs. Le cardinal de Poitiers

VI. p. 153.

1.23.c.4.

porta le parole, & conclut à prier le roi de rendre l'obédience à Benoît : après quoi il fe retira avec fon colJegue, afin qu'on mit l'affaire en déliberation. Les fentimens furent fort partagez. Le duc d'Orleans qui opinoit pour la reftitution de l'obédience, avoit dans fon parti Pierre d'Ailly évêque de Cambrai, avec plufieurs autres docteurs, les univerfitez d'Orleans, de Montpellier & de Toulouse. Le parti oppofé comprenoit les ducs de Berri & de Bourgogne, une grande partie de l'univerfité de Paris, Simon de Cramaud, patriarche d'Alexandrie, Pierre de Thury, cardinal de fainte Sufanne. Mais le duc d'Orleans profitant de l'abfence des ducs de Berri & de Bourgogne, & des prélats oppofez à Benoît, fut fi bien tourner l'esprit du roi, déja fort affoibli par fes frequentes rechûtes, lui cita un fi grand nombre de perfonnes qui étoient d'avis qu'on rendît au pape l'obédience, & lui dit tant de chofes pour l'autorifer, que ce monarque promît avec ferment de reconnoître Benoît; & pour marquer qu'il le faisoit avec joïe, il entonna lui-même le Te Deum, que toute la compagnie acheva de chanter.

Charles VI.con

l'obedience à Be

64.

Les ducs de Berri & de Bourgogne n'eurent pas plû----tôt appris cette négociation, qu'ils allerent en faire des AN. 1403. reproches au roi. Mais il les appaifa, en leur faisant XVIII. voir que le pape avoit paru dans des fentimens fi rai- vient de reftituer fonnables, & qu'il avoit promis des chofes fi avanta- not. geufes à la France, qu'il y auroit de l'injuftice à lui re- Hift. univers. fufer plus long-temps l'obédience. Et le duc d'Orleans Parif. tom. V. p. fe fit fort de faire figner à Benoît qu'il accepteroit la voie de ceffion, en cas que fon concurrent cedât, ou mourût, ou fut dépofé; qu'il lui feroit révoquer toutes les proteftations faites contre la voie de ceffion; qu'il modereroit les charges qui font fur l'église de France; qu'il laifferoit les collations & promotions fai- Moine de S. Denis par les ordinaires pendant la fouftraction; qu'enfin il celebreroit un concile general de toute fon obédience, le plûtôt qu'il fe pourroit faire. Toutes ces promeffes étoient belles, mais la difficulté étoit de les accomplir, & Benoît promettoit toûjours tout ce qu'on vouloit, & ne tenoit rien. Cependant ces promeffes, toutes illufoires qu'elles füffent, gagnerent les ducs de Berri & de Bourgogne; l'univerfité de Paris fuivit leur exemple, à la reserve de la nation Normande, qui s'obftina long-temps à n'y vouloir point confentir, mais elle le réunit enfin à la Françoife & à la Picarde, car pour la nation Allemande, elle perfista dans la neutralité.

tes

Tous les avis étant à peu près réunis, le roi manda aux ducs de le venir trouver à l'hôtel de faint Pol. Ils y arriverent fur les onze heures, & le roi monta à cheval pour fe rendre à la cathedrale, suivi des ducs & d'un grand nombre d'évêques & d'abbez. La messe fut celebrée par le cardinal de Poitiers, & Pierre d'Ailly évêque de Cambrai fit un long difcours, après lequel

liv. 23. c. 4. n. 5•

1

XIX. Reftitution de

l'obédience à Benoît, publiée.

il publia de la part du roi la reftitution de l'obédience AN. 1403. à Benoît; déclara que les promeffes faites au duc d'Or

X X.

La Caftille recon

dience.

Moine de S. Denis 1.23.c.6.

II.

leans en faveur de la France, avoient porté le roi à lui rendre l'obédience, & il en fit la lecture. Le même jour trentiéme de Mai fut expediée la lettre patente, par laquelle le roi enjoignoit à tous fes fujets d'obéïr au pape Benoît. Et pour remettre entierement la paix & l'union dans l'univerfité de Paris, en réuniffant tous fes membres, on jugea à propos d'y faire rentrer les dominicains, d'abolir la memoire de toutes les anciennes difputes, de les remettre en poffeffion de tous leurs droits, & dans la pleine liberté d'exercer toutes leurs fonctions.

La Castille qui s'étoit souftraite de l'obédience de noit Benoît, & fe Benoît, à l'exemple des François, ne tarda pas à y foumet à fon obé- rentrer à leur imitation, & Benoît reprit d'abord tant d'autorité dans ce roïaume, qu'on fouffrît même qu'il donnât l'archevêché de Tolede, le plus riche de toute Mariana l. 19. c. la chrétienté, à son neveu Pierre de Lune, qui en fut mis fort paifiblement en poffeffion peu de jours après. La France n'eut pas lieu d'être contente de ce pape, qui n'obferva aucun des articles qu'il avoit promis au duc d'Orleans. Cependant ce prince qui croïoit qu'il agissoit de bonne foi, engagea le roi à lui envoïer une ambaffade folemnelle, compoféc de Philippe de Villette abbé de faint Denis, & de l'archidiacre d'Arras. Philippe avoit été pourvû de cette abbaïe en 1398. c'étoient les moines qui l'avoient élû avec la permiffion du roi, & Pierre d'Orgemont évêque de Paris l'avoit confirmé en la place du de l'obédience duquel on s'étoit fouftrait. Les plus favans canonistes avoient décidé que dans un cas femblable, l'évêque diocesain devoit confirmer l'élection. Benoît reçut affez bien

pape,

d'abord

« AnteriorContinuar »