par la douceur de fa domination, plufieurs peuples s'étant volontairement foumis à fon empire. C'eft cette équité & cet amour pour la juftice, qui le firent mettre au nombre des Juges d'enfer. Rhadamanthe avant que de mourir, partagea fes Etats entre les deux fils, & donna le gouvernement des villes à fes principaux Officiers. J'ai dit que tous les Anciens ne convenoient pas que Rha damanthe fût frere de Minos, il y en a quelques-uns en effet qui prétendent qu'il n'avoit été que fon Secretaire, fondés apparemment fur ce que ce Prince, au rapport de Platon, s'en étoit fervi pour rediger le Code de fes Loix. Strabon même nous fait entendre que Rhadamanthe, fur le modele duquel Minos s'étoit reglé, avoit vécu long-temps avant lui; qu'il avoit donné des Loix à l'Ifle de Crete, & y avoit bâti plufieurs villes. Ceft peut être celui dont parle Paufanias (1) qui au rapport du Poëte Cyneton, étoit fils de Vulcain, petit(2) Voyez fon fils de Talus, & arriere-petit-fils de Cerès. Loerquer (2) croit petit Livre in- auffi que le Prince de ce nom qui regna en Lycie, n'étoit pas frere de Minos, & il blâme Diodore & Platon de l'avoir fait fortir de l'Ile de Crete. Ce même Auteur reconnoît un second Rhadamanthe, frere de Minos II. Légiflateur comme le premier ; tout cela prouve qu'il y a eu plu fieurs perfonnes de ce nom. (1) In Arc. Ion. fon Sarpedon. Hiftoire de Sarpedon obligé de fortir de l'Ile de Crete, après que frere, à qui il difputoit la couronne, l'eut vaincu, fe retira d'abord dans la Carie, où il bâtit la ville de Milet (a), & après y avoir fait quelque féjour, il pénétra plus avant dans l'Asie, & arriva enfin au pays des Myliades, qui prit peu de temps après le nom de Lycie, d'un Prince nommé Lycus, fils de Pandion & frere d'Egée, qui s'y retira, & y fut reçu par Sarpedon qui venoit d'y fonder un petit Royaume, où il regna paisiblement le refte de fes jours. Après fa mort Evandre fon fils monta fur le trône, au rapport de Dio'dore; mais il ne faut pas confondre ce Sarpedon avec le petit fils de Bellerophon qui vivoir auffi dans le même pays (a) Diodore, I. 5. Herodote, 1. 1. Paul, in Atticis. Stephanus, &c. environ 100. ans après, & qui felon Homere, Iliade l. 6. conduifit au fiége de Troye ceux des Lyciens qui habitoient aux environs du Xanthe (1) " (1) Voyez Après la mort de Minos premier, fon fils Lycafte lui fuc- l'hiftoire de ceda; mais fon regne n'a rien de remarquable. Il n'en eft pas Bellerophon. de même de celui de Minos fecond son fils, dont je vais parler. re, Ce Prince étant monté fur le trône, fe rendit redoutable à fes voisins, fit plufieurs conquêtes dans les Ifles voisines & devint enfin le maître de la mer. Thucydide, ApollodoDiodore de Sicile, & les autres Anciens parlent des progrès que faifoit fa Flotte, la plus nombreuse qu'on eût vûe avant lui; & il auroit joui de la réputation de l'un des plus grands Princes de fon temps, fans la malheureuse avanture que je vais raconter. Elle troubla tout le repos de sa vie, & fa donna lieu aux Grecs de le déchirer par mille calomnies. La célébration des Panathenées attirant à Athenes toute la Nobleffe des environs (a), Minos voulut y envoyer fon fils Androgée, & ce jeune Prince combattit dans ces Jeux avec tant d'adreffe & de bonheur, qu'il y remporta tous les prix; ce qui lui attira l'eftime de tout le peuple, & l'amitié des fils de Pallas frere d'Egée. Le commerce de ce jeune Prince avec les Pallantides devint suspect au Roi d'Athenes: comme il n'avoit point encore fait reconnoître Thefée, & qu'il n'avoit point d'autres enfans, il craignit qu'avec le fecours de Minos ils ne fe miffent en état de le détrôner; ainfi ayant appris qu'Androgée alloit à Thebes, il le fit affaffiner au bourg d'Enée, fur les confins de l'Attique. Minos n'eut pas plûtôt appris cette trifte nouvelle, qu'il résolut de venger la mort de fon fils. Apollodore remarque (b) qu'il étoit (a) Diodore, I. 4. Apollod. I. 3. Plu- noiffoit pas fa Divinité. Ce Taureau tarque, in Thefeo, & Servius fur le fixié-ayant ravagé l'Ile de Crete, traversa la me Liv. de l'Eneide. mer, alla en Grece, & ayant rencontré Androgée en fon chemin, lui ôta la vie; mais il y a apparence qu'on ne fit courir ce bruit, que pour mettre à couvert la réputation d'Egée, qui avoit violé tous les droits de l'hospitalité. (6) Apollodore, liv. 3. raconte autrement la mort d'Androgée : il dit que ce Prince fut tué par le Taureau de Marathon, que Neptune avoit envoyé dans FIle de Crete, pour punir Minos de ce qu'étant maître de la mer, il ne recon La Flotte de Minos s'étant bientôt trouvée en état de partir, ce Prince fondit fur l'Attique avant qu'on eût eu le temps de fe preparer à le recevoir : Nifa, qu'Ovide par anticipation nomme Megare, fentit le premier effort de fes armes. Cette ville voisine d'Athenes, avoit pris fon nom de Nifus,frere d'E(1) Liv. 3. gée: voici felon Apollodore (1) & Strabon, comment elle étoit échue à la branche cadette de la maison Royale d'Athenes. Pandion, qu'une faction avoit chaffé de fon Royaume, s'y étoit retiré, & avoit épousé la fille de Pylos qui y regnoit. Il en eut quatre fils; Egée, qui alla regner à Athenes; Nifus, qui fucceda à fon grand-pere & donna fon nom à la ville; Pallas & Lycus, qui dans la fuite voulurent difputer la couronne à Egée. Hiftoire de fus. Cette ville auroit long-temps arrêté l'ennemi, fans la perSylla & de Ni- fidie de Sylla, fille de Nifus, qui trahit fon pere. Les Poëtes difent (2) que le fort de ce Prince dépendoit d'un poil rouge qu'il portoit fur fa tête (a), & que Sylla amoureufe de Minos, lui coupa pour le porter à son Amant (b). On ajoute que ce Prince deteftant cette trahifon, partit fans vouloir lui parler, & que Sylla s'étant jettée de désespoir dans la mer, les Dieux la changerent en Alouette; c'eft-à-dire, car cette avanture eft véritable, au rapport de Paufanias, que cette Princeffe eut correfpondance avec Minos pendant le fiége; qu'elle lui donna avis des réfolutions les plus fecretes du confeil; & qu'enfin elle l'introduifit dans la ville avec les clefs qu'elle prit pendant que fon pere dormoit, & dont apparemment Ovide a voulu parler fous le fymbole de ce poil fatal. Sa métamorphofe en Alouette, ainfi que celle de fon pere (2) Ovid. alors dans l'Ifle de Paros, où il offroit un facrifice aux Gra cés, & qu'il jetta de dépit la couronne qu'il avoit fur la tête, & que depuis ce temps-là il ne porta plus de couronne dans les facrifices de ces Déeffes. Met. 1. 8. (a) Paufanias, in Atticis, dit que les Crinis inhærebat magni fiducia regni: • en Aigle de mer, ne font que des ornemens poètiques, fondés toutefois fur deux équivoques liées avec cet événement, l'une Grecque, & l'autre Hebraique; car comme l'infinue affez clairement Ovide, le nom de Ciris, vient du Greсxapaν, #ondre': Ciris,& à tonfo eft hoc nomen adepta capillo; & celui de Nifus, de l'Hebreu Neiz, qui fignifie un Epervier, oiseau qui reffemble fort à l'Aigle de mer: Tunc pendebat in auras Et modò factus avis fulvis Halyætus in alis. Si nous en croyons Apollodore (1), Minos fit jetter luimême Sylla dans la mer, ou felon Zenodote, il la fit pen- (1) Liv. 35. dre au mât de fon vaiffeau. M. Huet, pour foutenir le parallele entre Moyfe & Minos, croit que cette avanture eft la même que celle que rapporte Jofeph au fujet de Tarbis, qui offrit à Moyfe de lui livrer la ville qu'il affiégeoit dans Ethiopie, s'il vouloit l'époufer: mais on renverferoit toute l'histoire, fi à la moindre apparence on vouloit confondre des événemens fort differens. Toute celle de Minos eft vraie, malgré les Fables dont on la chargée, & elle eft attestée par toute l'Antiquité. J'ai dit qu'Ovide avoit donné à la ville de Nifa le nom de Megare, qu'elle ne prit qu'après la mort de Nifus: c'eft Paufanias qui nous l'apprend (2), en difant que pendant que Mi (2) In Attic nos faifoit le fiége de cette ville, Megareus étoit venu d'Onchefte pour la fecourir, & qu'aprés la mort de Nifus & la retraite de Minos, il en avoit rétabli les murailles, & lui avoit donné le nom de Megare. On montroit encore dans cette ville, au rapport du même Auteur, le foyer facré des Dieux Prodromées; c'eft-à-dire, de ceux qu'on invoquoit avant que de jetter les fondemens de quelqu'édifice que ce fût, aufquels Megareus avoit offert des facrifices, pour fe les rendre favorables. Je fçais que le même Auteur rapporte une autre tradition, par laquelle on apprenoit que ce ne fut pas Megareus lui-même qui rebâtit cette ville, puifqu'il avoit été tué pendant le fiége, mais fon gendre Alcathoüs, qui la fit appeller Mégare. Ainfi il eft toujours vrai de dire qu'elle ne Comme l'Antiquité ne nous a prefque appris aucun fait fans у avoir mêlé la fiction, on publia qu'Apollon avoit aidé Alcathoüs à rebâtir les murailles de Nifa; c'est-à-dire, que l'ouvrage parut fi beau, qu'il falloit qu'un Dieu en eût été l'Architecte. Quelque célebre que fût cette expédition (1) Plutar- de Minos, les Megaréens, au rapport de Paufanias (1) n'en que, Diodore, convenoient pas, & affectoient de dire qu'ils n'en avoient jaApollodore. mais oui parler. 1. 4. Après la prife de Nifa, Minos alla mettre le fiége devant la ville d'Athenes, & il la trouva dans la derniere défolation. (2) Apollod. Le ciel s'étoit déja déclaré pour lui (2) : une chaleur extraordinaire & une grande fechereffe avoient défolé toute la Grece. L'Oracle confulté avoit répondu qu'il falloit pour appaifer les Dieux, qu'Eacus devint l'interceffeur de fa Patrie, & les prieres de ce Prince avoient déja commencé à les fléchir; mais la ville d'Athenes & toute l'Attique n'en avoient pas été foulagées. Envain les Atheniens fe reffouvenant d'un ancien Oracle, qui leur apprenoit qu'ils feroient un jour délivrés d'une grande ftérilité pour le facrifice de quelques étrangeres, avoient immolé auprès du tombeau du Cyclope Cerafte, les filles d'Hyacinthe Lacedemonien qui s'étoit depuis peu venu établir à Athenes; la défolation ne ceffoit point ; & la ville fe trouvant plus preffée encore par la famine, que par les attaques de l'ennnemi, on envoya encore une fois à l'Oracle; & on apprit que les Dieux ne cefferoient de l'affliger, qu'après qu'on auroit donné une entiere fatisfaction au Roi de Crete. Les Atheniens lui envoyerent donc fur le champ des Ambaffadeurs en état de fuppliants (a), pour lui demander la paix ; & ce Prince la leur accorda, à condition que tous les neuf ans, felon Plutarque & Ovide, ou tous les fept ans, felon Diodore de Sicile & Apollodore, les Atheniens lui envoyeroient fept jeunes garçons & autant de filles. (4) C'est-à-dire, felon Plutarque, ayant fur la tête des couronnes de branches; & ayant à la main des rameaux environnés de petites bandelettes de laine blanche. Plutarchus in Thefeo. Cet P |