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Ad Gentes 1. 6.

pro Diana colebatur ; Peffinuntios filicem pro Deûm matre, pro (1) Ardobe Marte Romanos haftam, puteum Samios pro Junone (1). Lorfque l'art de faire des Statues, dont on donne la gloire à Promethée, fut inventé, & que Dedale l'eut perfectionné on rejetta toutes ces Divinités informes, & dès-lors l'Idolâtrie commença à faire beaucoup de progrès: on porta même la superstition jusqu'à croire que les Divinités elles-mêmes venoient habiter dans les Statues qui les repréfentoient; & ce fentiment étoit reçu fi universellement, que le Philofophe Stilpon ayant entrepris de prouver que la Minerve de Phidias n'étoit pas un Dieu, fut deferé à l'Areopage, où il fut obligé, pour se justifier, de chercher une pitoyable défaite, & de dire qu'il avoit avancé que cette Statue n'étoit pas un Dieu, puifque c'étoit une Déeffe ; ce qui n'empêcha pas tou tefois qu'il ne fût banni.

Comme toute Religion demande néceffairement un culte, après avoir traité de l'origine & du progrès de l'Idolâtrie, & des Dieux qu'elle avoit introduits, il eft neceffaire de parler du culte qu'on rendoit à ces differentes Divinités; des Autels, des Temples, des Prêtres, des Sacrifices, des Victimes, des Inftrumens des Sacrifices, des Oracles, des Fê tes, &c. ce qui fera la matiere d'autant de Chapitres.

CHAPITRE V.

Des Temples des Payens, de leur Forme, de leur
Ancienneté, &c.

L

'ANTIQUITE' des Temples eft auffi inconteftable, que le temps auquel on a commencé d'en avoir, eft incer tain. Comme c'eft dans la Phenicie & dans l'Egypte que l'Idolâtrie a commencé peu de temps après le Deluge, il n'eft pas douteux que c'eft dans ces deux Pays qu'il faut chercher l'origine de tout ce qui concerne le culte des faux Dieux, & l'ufage des Temples qui a commencé chez eux. Herodote & Lucien le difent formellement des Egyptiens;

mais auffi il faut obferver en même temps, que le systeme
de cette fauffe Religion n'a pas été établi tout d'un coup,
& que les ceremonies ne l'ont été que peu-à-peu. D'abord
on n'honora les Dieux, que d'une maniere groffiere : de
fimples Autels de pierre brute ou de gazon, élevés au mi-
hieu de la campagne, étoient les feuls préparatifs des Sacri-
fices qu'on leur offroit. Les Chapelles, c'est-à-dire, des lieux
fermés, & enfin les Temples ne font venus que dans la
fuite; & on ne voit pas en effet, que les Egyptiens en euf-
fent du temps de Moyfe: il en auroit parlé, puifqu'il en a
eu fouvent occasion. Ainfi j'ofe décider que le Tabernacle
qu'il fit dans le defert, & qui étoit un Temple portatif, eft
le premier Temple qu'on connoiffe, & peut-être le modele
de tous les autres. Le Tabernacle avoit un lieu facré, Sancta
Sanctorum, qui répond aux lieux faints & cachées des Tem-
ples des Payens, & qu'ils nommoient Adyta. Ce Temple,
expofé à la vue des Nations voifines des lieux que par-
coururent les Ifraëlites pendant quarante ans, a pu donner
occafion à ces Peuples Idolâtres d'en conftruire de fembla-
bles, fans être portatifs ; du moins eft-il certain qu'ils en
avoient avant la conftruction du Temple de Jerufalem. Le
premier dont il eft fait mention dans l'Ecriture, est celui
de Dagon chez les Philiftins. Quoiqu'il en foit, la coutume
de bâtir des Temples en l'honneur des Dieux, venue d'E-
gypte, paffa chez les autres Peuples. Lucien (1) dis
que ce
fut de ce pays qu'elle fut portée chez les Affyriens, & par-là
il doit comprendre tous les Pays d'alentour, la Phenicie,
la Syrie, & d'autres encore. De l'Egypte & de la Phenicie,
elle paffa dans la Grece avec les Colonies, & de la Grece à
Rome; c'est le chemin des Fables & de l'Idolâtrie, comme
nous le difons tant de fois dans cet Ouvrage; & cette opinion eft
fondée fur Herodote, & fur tout ce que l'Antiquité a de plus
certain. On donne à Deucalion pour la Grece, & à Janus
pour l'Italie, la gloire d'y avoir bâti les premiers Temples;
d'autres affûrent que pour l'Italie, l'honneur en eft dû à
Faunus, d'où eft venu le nom de Fanum, qui parmi les La-
tins fignifie un Temple; mais toutes ces recherches font
auffi frivoles qu'incertaines. Ce qu'il y a de plus affûré, c'est

(1) de Den Syria.

:

qu'à de petites Chapelles, élevées la plupart par de fimples particuliers, & au milieu des champs, fuccederent bientôt des bâtimens reguliers, & enfin des Chefs-d'oeuvres d'Architecture. On peut voir dans Herodote, & dans d'autres Auteurs, quelle étoit la magnificence du Temple de Vulcain en Egypte, que tant de Rois eurent bien de la peine à achever c'étoit une grande gloire fi dans un long regne un Prince avoit pû en conftruire un portique. Vous verrez dans Paufanias la defcription du Temple de Jupiter Olym(1) in Elia. pien (1), que je donnerai à la fin de ce Chapitre, avec celle des autres Temples que je nomme ici. Celui de Delphes, auffi celebre par fes Oracles que par les préfens immenfes dont il étoit rempli, merite d'être connu. Celui de la Diane d'Ephefe, ce chef-d'œuvre de l'art, & fi renom(2) Erostrate. mé qu'un infensé (2) crut fe rendre immortel en le brûlant, étoit auffi riche que magnifique. Le Pantheon, ouvrage de la magnificence d'Agrippa, gendre d'Augufte, fubfifte encore, & eft dédié à tous les Saints, comme il l'étoit auparavant à tous les Dieux. Enfin celui de Belus, ou plûtôt cette grande & magnifique Tour, compofée de fept étages, dont le plus élevé renfermoit la Statue de ce Dieu, avec les autres chofes dont parle Herodote, comme il étoit le plus ancien de tous ceux dont je viens de parler, il étoit auffi le plus fingulier & le plus magnifique.

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Voila les Temples les plus fuperbes des Payens, dont l'Hiftoire nous ait confervé la memoire. Les autres, moins celebres, font en fi grand nombre, qu'il faudroit des Volumes pour les décrire, & la chofe feroit fort inutile: on croit qu'il y en avoit plus de mille, grands ou petits, dans la seule ville de Rome. Les Antiquaires ont fait deffiner le plan & l'élevation de quelqus-uns de ces Temples, fur-tout le P. de Montfaucon (3), que l'on peut confulter.

Comme les Latins expriment le mot de Temple de plufieurs manieres, Templum, Fanum, Ædes, Sacrarium, Delubrum, &c. les Grammairiens & les Commentateurs ont cherché l'étymologie de chacune de ces dénominations ; mais tout bien examiné, il paroît que ces noms fignifioient des lieux confacrés aux Dieux, differens entre eux plus par la

y

Verrine.

grandeur que par la forme ; quoique de très-bons Auteurs ayent mis quelquefois d'autres differences. Il paroît que dans les premiers temps, Fanum fignifioit la place deftinée à un Temple, & que le même mot fut employé dans la fuite, pour marquer un petit Temple, de même que le mot Sacrarium. Ciceron en effet (1), employe deux fois ces deux mots, (1) Dans fa pour decrire un petit Temple que Cerès avoit à Catane en quatrième Sicile. Cet Orateur employe ailleurs le mot de Sacrarium, pour les Chapelles particulieres que chacun avoit dans fa maison; mais ces Chapelles étoient plus fouvent exprimées par le mot Lararium. Ædes, fi nous en croyons Varron, dont le témoignage eft rapporté par Aulu-Gelle, marquoit que le Temple étoit établi par les Augures; d'où il conclut que tout ce qu'on appelloit Ædes, n'étoit pas un Temple; mais cette diftinction eft fans fondement, car les Auteurs fe fervent également des deux expreffions, pour les bâtimens confacrés aux Dieux. Il n'en eft pas de même du mot Delubrum, qui fignifioit proprement, felon Afconius, un Temple confacré à plusieurs Divinités, & dans lequel il y avoit plufieurs Chapelles, comme le Pantheon étoit un Temple confacré à tous les Dieux. Le mot Templum, ne marquoit pas même toujours un bâtiment, puifque les Augures l'employoient pour les enceintes fermées de paliffades ou de toiles, qu'ils formoient avec le bâton Augural, pour tirer les Augures.

Les Temples des Anciens étoient partagés en plufieurs parties qu'il eft bon de diftinguer, pour entendre les defcriptions qu'ils en font. La premiere étoit le Vestibule, où étoit la Pifcine, dans laquelle les Prêtres, Æditui, puifoient l'eau luftrale pour expier ceux qui vouloient entrer dans les Temples; la Nef, s ; & le lieu Saint, appellé penetrale, facrarium, adytum, dans lequel il n'étoit pas permis aux particuliers d'entrer; & enfin l'artiere-Temple indus; mais tous n'avoient pas cette partie. Les Temples avoient fouvent des Portiques, & toujours des marches pour y monter. Il y en avoit auffi avec des galeries autour; ces galeries étoient formées d'un rang de colonnes, pofées à un certain espace du mur, couvertes de grandes pierres : ces Temples étoient

nommés Peripteres, c'eft-à-dire, ailes; & Dipteres, quand la galerie avoit deux rangs de colonnes; Proftyles, lorsque les colomnes formoient le Portique fans galerie; & enfin Hypethres, quand ils avoient en dehors deux rangs de colonnes, & autant en dedans, tout le milieu étant découvert, à peu près comme nos Cloîtres. Vitruve remarque encore d'autres particularités, qu'on peut voir dans son Ouvrage.

L'interieur des Temples étoit fouvent très-orné, car outre les Statues des Dieux, qui étoient quelquefois d'or, d'yvoire, d'ébene, ou de quelque autre matiere précieuse, & celles des grands hommes qui y étoient quelquefois en grand nombre (a), il étoit ordinaire d'y voir des peintures, des dorures, & d'autres embelliffemens, parmi lefquels il ne faut pas oublier les offrandes, ou les Ex voto; c'eft-à-dire, des Proües de Vaiffeau, lorfqu'on croyoit avoir été garanti du naufrage par le fecours de quelque Dieu; des Tableaux, Tabellas , pour la guérifon d'une maladie; les Armes prifes fur les ennemis, les Drapeaux, des Trepieds, & les Boucliers votifs, tels que font les deux qui fe trouvent dans le Cabinet des Medailles du Roi, & dont l'hiftoire eft dans le neuviéme Volume des Memoires de l'Académie des Belles-Lettres (b). Il y avoit fur-tout dans le Temple de Delphes, & dans plufieurs Temples de Rome, des richeffes immenfes de ce genre. Outre ces fortes d'ornemens, on ne manquoit gueres au jour de Fêtes de parer les Temples de branches de laurier, d'olivier, & de lierre.

Lorfqu'on vouloit bâtir un Temple, les Harufpices étoient employés à choisir le lieu, & le temps auquel on devoit en commencer la conftruction. Ce lieu étoit purifié avec grand (1) Voyez foin; on l'environnoit même de rubans & de couronnes (1). Tacite Hift. L. Les Veftales accompagnées de jeunes garçons & de jeunes filles, lavoient cet efpace avec de l'eau pure & nette, & le Pontife l'expioit par un Sacrifice folemnel. Enfuite il touchoit la pierre qui devoit fervir la premiere à former le fondement, & qui étoit liée d'un ruban; & le peuple animé d'un grand

(a) Voyez la defcription des Templos les plus celebres, à la fin de ce Chapitre. (b) Voyez le Traité de Donariis, par Thomafinus.

zele,

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