LES FÉES. CONTES DES CONTES. PLUS BELLE QUE FÉE. CONT E. Ly avoit une fois I dans l'Europe un Roy, qui ayant eu déja quelques enfans d'une Princeffe qu'il avoit épousée, eut envie de voyager, & d'aller d'un bout à l'autre A de fon Royaume. Il s'arrê toit agreablement de Province en Province; & comme il fut dans un beau Châ teau, qui étoit à l'extremité de fes Etats, la Reine fa femme y accoucha, & donna la vie à une fille qui parut fi prodigieusement belle au moment de fa naiffance, que les Courtisans, foit pour sa beauté, ou par envie de faire leur Cour, la nommerent Plus Fée; l'avenir fit belle que Fée ; bien voir qu'elle meritoit un nom fi illuftre. A peine la Reine fut-elle relevée de 2 " couche, qu'il fallut qu'elle fuivît le Roy fon mari qui partit en diligence, pour aller défendre une Province éloignée que ses ennemis attaquoient. On laiffa la petite Plus belle que Fée avec la Gouvernante, & les Dames qui lui étoient neceffaires. Ôn l'éleva avec beaucoup de soin ; & comme son pere eut à foûtenir une longue & cruelle guerre, elle eut le loifir de croître & d'embellir. Sa beauté fe rendit fameuse par tous les Pays circonvoisins; on ne par 1 loit d'autre chofe; & à douze ans on l'eût plûtôt prise pour une Divinité, que pour une perfonne mortelle: un frère qu'elle avoit la vint voir pendant une Tréve, & fe lia avec elle d'une parfaite amitié. Cependant la renommée de fa beauté, & le nom qu'elle portoit irriterent tellement les Fées contre elle, qu'il n'y eut rien qu'elles ne penfaffent pour fe venger de l'orgueil de fon nom, & pour détruire une beauté qui leur causoit tant de jaloufic, |