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qui le mena à Rome, où il profita beaucoup. Il partageoit fon tems entre la Peinture, la Poëfie & la Mufique; & fes Satyres ont été imprimées & réimprimées plus d'une fois. Ses Comédies mêmes furent très à la mode, & malgré cette variété d'occupation, il ne laiffa pas de faire beaucoup d'ouvrages de Peinture; le Grand Duc & le Prince fon fils l'employerent beaucoup. Ce Maître a plus excellé dans le Payfage que dans les fujets d'hiftoire. Ses tableaux font ornés de belles figures de foldats & d'animaux très bien peints. Les batailles, les marines & les caprices pictorefques étoient fort de fon goût; fon feuiller eft extrêmement leger & fpirituel; mais fes figures font un peu gigantefques. Il peignoit extrêmement vite; fouvent il commençoit & finiffoit un tableau de Chevalet dans le même jour. Il fe fervoit lui-même de modele, au moyen d'un grand miroir qu'il avoit dans fon attellier. Il excelloit dans les caricatures extrêmement généreux, il travailloit plus pour la gloire que pour l'in térêt. Il mourut à Rome en 1673.

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més que fes tableaux; on ne peut rien voir de plus léger, ni de plus fpirituel que touche de ce Maître; fon feuiller eft formé par de feuls traits allongés fans être fermés ni arrondis, comme le font ordinairement ceux des autres Payfagistes. On peut dire que fes deffeins font très-chauds, & ont beaucoup de couleur: comme ils font griffonnés, on les a fouvent copiés, & la feule franchife de la main les fait distinguer.

Ses Eleves font, Auguste Rofa fon fils, Bartholomeo Torregiani, Jean Grifolfi de Milan, & Pietre Montanini. Les principaux ouvrages de Salvator Rofa font en Italie. Le Roi de France poffede de lui une bataille avec un fond d'Archite&ture, & la Pithoniffe.

LUC JORDANS naquit à Naples eu 1632, & fut mis dès le bas âge chez Ribera, où il fit de fi grands progrès, que dès l'âge de fept ans on vit de lui des chofes furprenantes. Il quitta enfuite Naples fecrettement pour voir les ouvrages de Venife & de Rome, & s'attacha d'abord à la maniere de Pietre de Cortonne, & fe propofa enfin Paul Veronele pour

Ses deffeins font auffi efti- modele."

Son pere qui vendoit fes deffeins fort chers, le conduifoit dans les différentes Villes où Luc deffinoit les beaux morceaux qu'il y trou voit. Le pere preffoit vivement le fils, & ne lui donnoit point de relâche: comme il lui répétoit fouvent ces mots, Luca fa prefto; le nom en eft refté au fils. Luc fe fit une maniere qui tenoit de tous les Maîtres, & fa réputation s'établit très promptement; comme il travailloit fort vite, il acheva en deux ans les dix voûtes de l'Efcurial & l'efcalier. Il avoit la mémoire fi heu reufe, que fans avoir les tableaux des grands Maîtres devant lui, il en imitoit la maniere à s'y méprendre. Il eft rare de trouver un Peintre qui ait fait autant d'ouvrages que lui; auffi fes travaux qui lui avoient procuré beaucoup d'honneur, le rendirent très - riche, & fa famille a toujours bien figuré depuis fa mort, qui arriva à Naples en 1705. La grande pratique de Luc Jordans lui faifoit faire les contours de fes deffeins au pinceau, fans être pré paré par aucun crayon, & il foutenoit les contours par un fort lavis à l'encre de la Chine, relevé de blanc;

c'est un faire étonnant : dans ceux-là, comme dans ceux qu'il a faits à la plume lavés au biftre, on reconnoît toujours un grand Maître.

Ses principaux ouvrages font à Naples & en Efpagne. On voit au Palais Royal les Vendeurschaffés du Temple, & la Pifcine; les figures de ces deux tableaux font de grandeur naturelle & font en très-grand nombre.

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CANGIAGE ou CAMBIASI (Lucas) vint au monde à Moneglia, dans les Etats de Genes, en 1527. Son pere Peintre lui donna les premiers principes, & fit tant de progrès, qu'à l'âge de dix-fept ans, il peignit à fraifque la façade d'une maifon, d'une maniere à mériter l'approbation & les applaudiffemens des plus habiles Peintres Florentins. Sa réputation s'accrut fi fort, que toutes les Eglifes, tous les Palais de Genes s'emprefferent de lui donner de l'occupation. Il s'étoit formé une fi grande pratique, qu'il peignoit fouvent fans faire de deffein fes fraisques s'exécutoient fans cartons & pour aller même plus vite, il peignoit quelquefois des deux mains en même tems.

Cangiage excelloit dans les racourcis; il étoit affez correct & très-fécond; heureux s'il eût poffédé les graces, la légereté, un beau choix & le vrai de la nature. Il mourut à l'Escurial en_1585.

Le Tintoret difoit que les deffeins du Cangiage étoient capables de gâter un jeune-homme, peu avancé dans l'art, mais qu'un praticien pouvoit en tirer beaucoup d'utilité. La plus grande partie des tableaux du Cangiage, font à Genes. On voit entr'autres morceaux de lui au Palais Royal, une Judith en pied avec fa fuivante.

CASTIGLIONE (Benoit) connu fous le nom du Benedette, nâquit à Genes en 1616. Il s'appliqua d'abord aux Belles-Lettres; mais fon amour pour la Peinture, prit le deffus. Il fe mit fous Gio Baptifta Pagi, Eleve du Cangiage; mais il le quitta pour Gio Andrea de Ferrari, chez lequel il travailla long-tems. Benedette profita enfuite du féjour de Vandick à Genes. Il fe forma une grande maniere, & réuffit très-bien dans les fujets d'histoire; le portrait & le payfage étoient encore de fon reffort; mais fon in

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clination naturelle le portoit à faire des paftorales, des marchés & des animaux : il s'eft diftingué plus particulierement dans ce dernier genre.

Benedette parcourut prefque toutes les Villes d'Italie, & y laissa des morceaux : qui foutinrent fa réputation.: Le Duc de Mantoue fe l'at-: tacha particulierement, & fon Palais fe trouve embelli de tous côtés des ouvrages de ce Maître, qui y termina fa vie en 1670.

Son deffein est élégant, fa touche eft fçavante, & fon pinceau très-vigoureux. Son intelligence du clairobfcur étoit fi grande, que quelques-uns de fes tableaux frappent & faififfent fortement le fpectateur.

Ses deffeins font piquans, pleins de feu, & font prefque l'effet des tableaux: it les colorioit fouvent à l'hui le, fur du gros papier.

Genes poffede la plûpart de fes ouvrages. Le Roi a de lui une Nativité de JefusChrift, Notre-Seigneur qui chaffe les Marchands du Temple, & deux paysages. On voit au Palais Royal le portrait d'une femme ayant une coeffure bizarre, ornée de plumes blanches.

BACICI (Jean-Baptifte)

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né à Genes en 1639, étudia d'abord dans l'attelier de Borgonzone, & fut enfuite à Rome à l'âge de quatorze ans, avec l'Envoyé de la République, qui le garda dans fon Palais jufqu'à ce qu'il l'eût mis chez un Peintre François; il le quitta, pour travailler chez un Marchand de tableaux qui étoit Genois: le Bernin & Mario di Fiori ayant vû fes ouvrages, le produifirent dans différentes maisons, où il fit des portraits admirables. Il donna enfuite dans l'Hiftoire, pour laquelle il avoit beaucoup de talens. Ses coups d'effais à l'âge de 20 ans, lui firent une fi grande réputation, que le Prince Pamphile le préféra à tous les autres Artistes , pour peindre les quatre angles de la coupole de Sainte Agnès. Alexandre VII. lui fit le même honneur, en le préférant pour la coupole du Jefus, fur Ciro Ferri, Carlo Maratti & le Brandi. Il fut cinq ans à peindre cette grande machine, qui fait aujourd'hui l'admiration de tout le monde.

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lier étonné fe retira, & ne revint pas reprendre le portrait au bout d'un tems le Bacici s'avifa de peindre des barreaux deffus le portrait, écrivit deffus que la perfonne étoit en prifon pour dettes, & l'expofa dans le lieu le plus apparent de fon attelier. L'oncle du Cavalier, homme conftitué en dignité, en fut averti, & fut compter la fomme en retirant le portrait.

Le Bacici travailloit extrêmement vite; il peignit en deux mois la voûte de l'Eglife 'des Peres de Santi Apoftoli; mais cette diligence fut nuifible à fa fanté & à fa réputation. Il avoit alors foixante-fept ans. Il travailla peu dans la fuite, & mourut le 2 Avril 1709.

Ce Peintre étoit d'une vivacité qui tenoit de l'emportement, très - fpirituel dans fa touche, infatigable dans le travail, bon colorifte, entendant bien les racourcis. Ses figures ont tant de force, qu'elles femblent fortir du plafond; mais elles font quelquefois un peu incorrectes, lourdes, & fes draperies font maniérées.

Les deffeins du Bacici font chauds & d'une belle touche, la tournure des fi

Un Cavalier lui ayant fait faire fon portrait fans convenir de prix, le Peintre, après l'avoir fini, lui en de manda cent écus; le Caya-gures eft charmante, & le

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feu qui s'y montre, fait paffer fur l'incorrection & le peu de détail. Ses draperies font lourdes, boudinées; aucune extrémité n'eft formée mais l'efprit, la grande ordonnance & la belle intelligence des lumieres, fe trouvent dans tous les deffeins de ce Maître.

Il a plus travaillé à Rome qu'ailleurs. Le Roi a de ce Peintre une prédication de Saint Jean, & M. le Duc d'Orleans un petit portrait ovale d'un jeune - homme jouant du luth, & un gros bonnet à l'Allemande fur la tête.

· ECOLE ALLEMANDE. Le caractere de cette Ecole eft une repréfentation fidelle de la nature, telle qu'elle fe préfente, fans choix de ce qu'elle a de parfait, & même avec ses défauts. Elle a cela de commun avec les Ecoles Flamandes & Hollandoises; mais elle n'a pas ce fini précieux & ce naturel charmant, ce caractere de vérité, cette expreffion & cette élégance, qu'on trouve dans les ouvrages des Maîtres des Pays-Bas. Les principaux fujets des uns & des autres Peintres de ces Ecoles, font les fêtes champêtres, les tabagies &

autres fujets bas de ce gen1 re: il en eft cependant qui ont très-bien réuffi dans les fujets nobles de l'Hiftoire.

ALBERT DURER, né à Nuremberg en 1470, jetta les premiers fondemens de l'Ecole Allemande. Il avoit un genie vafte qui embrasfoit tous les arts; il a même écrit fur la perfpective, la géométrie, les fortifications & les proportions du corps humain.

Ses premiers ouvrages de Peinture furent recherchés des Souverains, & lui acquirent beaucoup de biens & d'honneurs. Buon Maṛtino lui enfeigna la Gravûre, & fes eftampes le rendirent auffi célebre que fes tableaux,

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Sans aucun modele de Peinture, il ne dut sa maniere qu'à lui-même : son imagination eft vive, fes compofitions grandes, genie facile,beaucoup d'exécution, un beau pinceau, un fini précieux. Sa grande correction n'empêche pas de remarquer la roideur de fon deffein; fon choix n'eft pas dans le beau de la nature, fes expreflions demanderoient plus de nobleffe & de grace. Il a bien écrit fur la perfpective, & l'a trop négligée : il ignoroit fans

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