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dû fe multiplier dans la même proportion. Eft-ce par hazard qu'on a jusqu'à présent trouvé plus des unes que des autres? ou devons-nous croire que les camées faciles à être mutilés, n'étoient pas du goût des Egyptiens? Le temps pourra réfoudre ce problême.

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A la vûe de cette Planche, on conçoit aifément que ni le goût du deffein, ni aucune autre partie de l'art ne peuvent m'avoir engagé à faire graver ces trois figures de terre cuite; mais outre que la fragilité de leur matiére rend ces fortes de morceaux extrémement rares, les Sçavans conviennent que les monumens antiques, de quelque nature qu'ils foient, ne doivent jamais être négligés. Ceux que je rapporte ici font très-bien confervés, & les dois à M. de Lironcour, ci-devant Conful au Caire, qui me les envoya l'année derniére, avec d'autres morceaux qui fe trouveront dans ce Recueil.

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N. I.

LA Coëffure de ces deux enfans eft finguliére, & fe rencontre très rarement fur les monumens Egyptiens. Ils font affis auprès d'un vafe, dont ils femblent retirer quelque chofe pour le porter à la bouche. Il se peut faire qu'il n'y ait aucun rapport entre ces figures & la Religion des Egyptiens; mais peut-être auffi que l'ouvrier réunissant divers objets du culte établi dans fon pays, & faisant deux Divinités différentes d'Horus & d'Harpocrate, les a voulu représenter ici avec un vase rempli de l'eau du Nil. Il est vrai qu'Harpocrate porte ordinairement la main droite à la bouche: mais le P. Kirker en a fait graver un qui y met Oedip. Egypt. la main gauche ; & il lui donne le nom d'Horus, parce qu'il étoit perfuadé que cette Divinité ne devoit pas distinguée de celle d'Harpocrate.

être

Ce petit morceau a quatre pouces cinq lignes de hauteur,

D

tom, I. p. 153.

P. 366.

& trois pouces & demi de largeur. Il eft, ainfi que les deux morceaux fuivans, d'une parfaite confervation.

No. II.

JE ne doute point qu'on n'ait voulu représenter ici le bœuf Apis, avec le croiffant fur la tête. Il eft couvert d'une houffe, dont les plis font faciles à diftinguer; & il eft foûtenu dans les parties de devant par deux figures qui ont la tête rasée, & une longue robe, arrêtée par une ceinture. Les deux figures qui le foûtenoient par-derriére, De Ifid. & Ofirid. font cachées fans doute par la houffe de l'animal. Plutarque dit que tous les ans, vers le Solftice d'hyver, les Prêtres Egyptiens rappelloient par des cérémonies lugubres, le trifte état où Ifis fut réduite par la mort d'Ofiris. Une de ces cérémonies confiftoit à montrer pendant quatre jours au peuple le fimulacre d'un bœuf, fymbole d'Ofiris. Ce fimulacre étoit doré, & couvert d'une houffe de lin de couleur noire. Il faut joindre à ce récit un passage du Poëte Claudien, où il compare la marche de l'Empereur Honorius, revêtu du 4°. Confulat, & porté fur les épaules de quelques jeunes gens de la premiére qualité, à celle des Divinités Egyptiennes, lorfqu'on les tiroit de leurs Sanctuaires pour les expofer aux yeux du Public. Il dit entr'autres chofes, que dans cette pompe la statue d'Apis étoit portée fur une efpéce de brancard, par des Prêtres habillés de lin. Je pourrois citer d'autres paffages de Macrobe & d'Apulée, qui difent à-peu-près la même chofe; mais ceux que j'ai rapportés fuffifent pour expliquer le monument dont il eft question. On y voit la housse dont le boeuf étoit couvert, fuivant Plutarque. Les Prêtres y font caractérisés, foit par leurs têtes nues, foit par la robe dont parle Claudien ; & l'on y diftingue jusqu'aux bâtons du brancard qu'ils portent fur leurs épaules. Du refte, l'ouvrage eft très-peu terminé, & des plus mauvais. Il n'y a aucune proportion entre l'animal & ceux qui le

foûtiennent; mais on doit obferver que de pareils monumens n'étoient deftinés qu'à mettre la représentation des cérémonies Religieufes entre les mains de ceux qui n'étoient pas en état de faire une grande dépenfe, & dont on vouloit cependant entretenir la fuperftition. Celui-ci a cinq pouces cinq lignes de hauteur, & trois pouces fept lignes de largeur.

No. III.

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Diod. Sic. lib. 1 31.

ofirid. p. 10. Plut. de Ifid. &

Le tribunal où l'on rendoit la justice parmi les Egyptiens, Diod. Sic. lib. 1. n'étoit pas moins célébre par la fageffe des Magiftrats, p. 48. que l'Aréopage d'Athènes & le Sénat de Lacédémone. Il étoit compofé de trente Juges, fous un Préfident qu'ils choififfoient eux-mêmes, & à qui l'on donnoit le nom de Chef-Juge, ou de Chef de la Juftice. Il portoit au cou une chaîne d'or, à laquelle étoit fufpendue une pierre précieufe, qu'on appelloit la vérité; foit qu'effectivement elle en portât l'empreinte, foit qu'elle n'en fût que le fymbole. Ce Sénat étoit représenté fur un des murs du fuperbe monument ou tombeau qu'on avoit élevé à Thèbes en l'honneur du Roi Ofymandias. Les Juges y étoient fans mains, pour marquer qu'ils ne devoient pas être fenfibles à l'intérêt ; & pour inontrer que leur Chef ne devoit fe propofer dans fes jugemens, d'autre régle que la vérité, il regardoit fixement cette pierre qu'il avoit fur la poitrine. Je croirois affez que la petite figure de terre cuite dont il s'agit, pouvoit être celle du Chef des Juges. La chaîne qu'on lui a mife au cou, le foin que l'on a pris de marquer les bras & de cacher les mains, le peu de rapport qu'on y trouve avec les autres figures Egyptiennes, fuffifent, ce me femble, pour appuyer cette explication, & pour détruire, ou du moins affoiblir l'objection qu'on tireroit de ce que la direction des yeux n'eft point telle qu'elle devoit être ; car il n'eft donné qu'à un très-habile Artiste d'exprimer un pareil fentiment : & l'exécution de

Gilbert. Cuper. Harpocrat. Traject. ad Rhenum, 1687.

ce monument prouve que l'ouvrier, des mains duquel il
eft forti, étoit affez ignorant, pour avoir négligé un des
traits qui fervoient à caractériser le Chef de la Justice,
parce qu'il étoit au-deffus de fes forces. Après tout, ce
n'eft qu'une conjecture; & l'on feroit encore fort heureux
d'en proposer toûjours d'aussi vraisemblables, fur les points
les plus obfcurs de l'antiquité.

Cette figure eft en gaîne, d'une proportion très-courte,
& fa hauteur eft de quatre pouces fept lignes. Les trois
trous placés dans fa coëffure, me déterminent à croire
qu'elle étoit deftinée à être attachée contre une surface
platte, & pofée perpendiculairement.

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Ces deux figures d'Harpocrate, ou du Dieu du filence, exactement deffinées quant à l'attitude, mais confidérablement embellies dans les représentations qu'on en donne, offrent quelques variétés, quoique difpofées de la même façon. La premiére a le poing gauche fermé, la . tête couverte d'une coëffure très-jufte, & pofe fur une plinte fondue avec la figure. La feconde porte un bonnet, & la main gauche ouverte, comme si elle avoit autrefois tenu quelqu'attribut. L'une & l'autre avoient au-dessus de l'oreille droite un ornement recourbé, defcendant jusque fur l'épaule, ayant la forme d'une anfe, femblable à celui qu'on voit ordinairement fur ces fortes de figures; mais il n'en paroît plus que la racine fur la premiére, & il est à demi-rompu fur la feconde. Les Antiquaires ne fe font guère expliqués fur ce fymbole, & Cuper même n'en a rien dit dans un Ouvrage où il a rapporté tout ce que les Anciens nous apprennent fur Harpocrate. Ce filence m'a engagé à faire quelques recherches fur ce fujet, & je vais les expofer en peu de mots.

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Il faut obferver, 1°. que cet ornement fe voit également fur toutes les têtes d'Harpocrate: ce qui prouve qu'il eft indépendant de l'efpéce de la coëffure. On doit remarquer en fecond lieu, qu'il ne fe trouve que fur les figures d'Harpocrate & d'Horus, qui n'étoient qu'une feule & même Divinité; d'où il fuit qu'on peut le regarder comme un attribut qui leur étoit propre. J'avois d'abord pensé que cet attribut n'étoit autre chofe qu'un serpent mal formé & mal exécuté, attaché à l'oreille d'Horus, comme pour lui inspirer la prudence, dont cet animal est le symbole. Je m'étois fondé fur un monument rapporté dans le cabinet de Paul Petau, Pl. 22, repréfentant une Ifis, avec un ferpent qui s'approche de l'oreille droite du petit Horus couché fur les genoux de cette Déeffe; mais je me suis bientôt apperçû que celui qui a deffiné & gravé cette figure, avoit été trompé par une reffemblance qu'il a cru voir entre cet animal & l'ornement que j'examine, & qui se trouve conftamment le même, comme je l'ai déja dit, dans toutes les figures d'Harpocrate & d'Horus qui fe rencontrent dans les cabinets. Il s'en présente de mieux travaillées les unes que les autres, & dans celles qui ont été faites par de plus habiles Artistes l'ornement en queftion n'a jamais fait naître l'idée d'un ferpent. Accuferoit-on les Artistes Egyptiens de n'avoir pas fçû deffiner ce reptile, eux qui étoient dans l'habitude de le traiter, & qui l'ont répété mille fois dans l'écriture hiéroglyphique? & ne vaut-il pas mieux douter de la fidélité du deffinateur qu'a employé Petau? Les Planches de fon Livre nous montrent que c'étoit un Artifte dont les talens étoient fort médiocres. Pour moi je prétends que cette forte d'ornement est un floccon de cheveux, qu'on laissoit pendre au côté droit de la tête & au-deffus de l'oreille d'Horus & d'Harpocrate. Je fonde ma premiére preuve fur ce que l'ornement que j'explique eft fouvent formé comme une treffe de cheveux liés & entrelacés. On en verra un

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