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tion à tout cela, autrement l'Etalon, s'il n'eft bien nourri, & foigné, comme on a dit, il demeurera à moitié de fa carriere, il trompera les Jumens, ou ne donnera que des Poulains d'une chétive race.

Du temps de faire couvrir les Jumens, & combien de temps elles portent

leurs Poulains.

E temps de faire couvrir les Jumens doit être different felon les divers climats qu'on habite, parce qu'il faut toujours faire en forte que les Poulains naiffent dans la faifon où les herbes font plus abondantes; car les Jumens dans les Haras des Provinces doivent toûjours paître l'herbe, afin qu'elles coûtent moins à entretenir.

De maniere donc que dans les pays Septentrionaux il faut faire couvrir les Cavales au commencement de juin, afin que les Poulains viennent en May lorfque les pâturages font gras, ce qui contribue entierement à l'abondance du lait que ces meres doivent avoir pour bien élever leurs petits. Dans les pays plus chauds, on peut mener les Cavales à l'Etalon au mois d'Avril ou de Mars même, parce que comme le foleil a plus de force en ces contrées, les herbes auffi y croiffent plûtôt, & l'on fe doit regler pour ce temps fur celuy que les Cavales portent leurs Poulains. La commune opinion veut qu'elles portent onze mois, & autant de jours qu'elles ont d'années; c'est à dire, que fi elles ont cinq ou fix ans, elles porteront onze mois & cinq ou fix jours.

Comment nourrir les Jumens poulinieres, & du foin qu'on en doit prendre quand elles font pleines.

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Ous avons déja dit qu'il falloit mieux nourrir les Jumens poulinieres dans les pâturages qu'à l'Ecurie, dautant qu'elles faifoient moins de dépenfe ; & que dans les endroits l'on établit de grands Haras, le profit n'en feroit pas fi grand, fi l'on vouloit faire autrement. Le pâturage eft bon aux Jumens depuis le commencement du mois dé May jufqu'à la fin d'Octobre, auquel temps il les faut renfermer à l'Ecurie, parce que les herbes alors n'ont plus de force, elles ne contiennent plus qu'un fuc qui caufe plus de crudité que de fubftance.

Il feroit à propos que la plupart des Laboureurs de campagne & autres particuliers qui ont des Cavales qu'ils deftinent pour leur donner des Poulains, les ménageaffent mieux qu'ils ne font, qu'ils ne les fiffent pas tant travailler au harnois, principalement quand elles font pleines, parce que fouvent on voit de ces Cavales ne donner que des avortons de Poulains, & qui ne font jamais capables de rendre aucun fervice qui vaille en parler.

M. le Duc

Un homme des plus diftinguez par fon rang en Angleterre, & qui a écrit tres fçavamment fur les Chevaux,, dit qu'il arrive quelquefois que de Newles Cavalles tuent leurs Poulains par accident, foit pour s'être emba-,, Castle, raffées à l'Ecurie dans leurs longes, foit pour avoir fait quelque effort, d'ailleurs (ce qui peut arriver tous les jours, lorfqu'elles font employées,,

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au charroy) foit enfin par la difficulté qu'elles ont de pouliner. A l'égard du tirage auquel on les employe, & pour éviter l'avortement, il n'y a qu'à les y ménager, & ne les y point furcharger, ne point les battre, comme il y en a qui font, lorfque ces animaux ne font pas ce que ces conducteurs demandent d'eux, ou plutôt que ces Jumens ne font pas ce qu'elles ne fçavent ce qu'on demande d'elles, y ayant des Charretiers fi brutaux & fi prompts, que plus chevaux que les bêtes qu'ils mennent, ils courent deffus & les frappent à tort & à travers.

Des foins qu'on doit prendre quand la Cavale veut pouliner.

Co Omme on fcait à peu près le temps qu'une Cavale doit pouliner par celuy auquel elle a été couverte, on ne fçauroit alors, dit le même, Auteur, trop prendre de précaution pour empêcher qu'il ne luy arrive aucun inconvenient, c'est pourquoy, puifqu'on peut fçavoir le jour qu'elle doit donner fon poulain, il faut faire tenir un homme prés d'elle pour » l'aider en cas de befoin. Il remarquera si c'est manque de force qu'elle » ne peut mettre fon poulain dehors; pour lors il luy ferrera les nari» nes la Jument qui fera un effort pour avoir fon 'haleine poulinera. » dans le moment, ou bien on prendra du vin boüilli avec du fenouil » & de l'huile, on luy en verfera dans les nafeaux, & cela l'aidera à faire » fon Poulain.

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Mais fi par malheur il étoit mort dans le ventre de la mere, on fait en forte qu'elle rende le Poulain en l'état qu'il eft, afin de conferver la "Cavale, & pour cela on fe fert du remede qui fuit.

"

Prenez quatre livres de lait de Jument ou d'Aneffe, ou au défaut, » du lait de Chévre, trois livres d'eau de leffive, deux livres d'huile d'o» lives, une livre de jus d'oignons blancs, faites ticdir le tout & le faites » avaller à la Jument à deux diverfes reprises, une heure ou deux d'in»tervale entre l'une & l'autre.

» Si ce remede n'eft pas affez fort, il faudra qu'un homme adroit se »frotte le bras droit avec de l'huile, qu'il l'introduife dans la nature de » la Jument, & qu'il tâche de tirer le Poulain entier ou par morceaux; » s'il ne peut l'avoir ainfi, il faudra lier le Poulain par le cou avec une » corde, & l'arracher le moins mal qu'il fera poffible.

"

Le travail d'une Jument eft laborieux & difficile quand il eft accompagné de quelque fymptôme violent, & particulierement lorfque la Cavale eft plus long-temps en travail qu'elle ne doit naturellement ; fi elle manque de force, elle eft en danger d'en mourir : les douleurs l'affoibliffent; & fi l'on remarque qu'elle fue dans fon travail, c'eft mauvais figne. Quelquefois, dit le méme Auteur dont on a parlé, les Poulains vien» nent les pieds les premiers, c'eft un travail contre nature, il les faut repouffer d'abord, & tâcher avec la main de faire fortir la tête, ou » du moins les narrines, afin d'aider à la Jument à fe délivrer plus promp

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»tement.

De

De l'Avortement des Cavales.

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Es Cavales font d'ailleurs fujettes à avorter, & cet avortement n'eft qu'une expulfion contre nature du Poulain hors de la matrice depuis la conformation jufqu'au terme ordinaire que ces Cavales doivent pouli

; les caufes de cet avortement font la violence qu'on leur fait au travail, & les grands efforts qu'elles y prennent : la matrice pour lors irritée & bleffée par la corruption qu'elle contient détermine une plus grande quantité d'efprits animaux à y venir, qui y caufent des contractions, & l'expulfion du Poulain. Les trop grands fardeaux dont fouvent on furcharge les Jumens au charroy leur caufent l'avortement ; il y a encore d'autres caufes internes qui produifent ce mauvais effet, comme par exemple lorfqu'il leur arrive des tranchées trop rudes caufees par l'ufage de quelques herbes faciles à fermenter, ou qu'il leur furvient quelque toux violente, ou enfin lorfque les Cavales font mal nourries, & que par ce défaut l'aliment requis manque au Poulain qu'elles portent.

Il feroit à fouhaiter que dans les Cavales on pût prévoir l'avortement, ainfi que dans les femmes, par les fignes qui le précédent, on n'en ver-. roit pas tant perir dans ces fâcheux momens, parce qu'on tâcheroit d'y apporter du remede.

L'avortement elt toûjours plus dangereux pour les Cavales que le travail ordinaire; parce qu'il s'y fait une ruption violente des vaiffeaux & des ligamens qui tiennent le Poulain attaché à la matrice, & le peril de l'avortement eit d'autant plus grand que le Poulain eft gros & la mere foible & débile.

faires.

Une Cavale qui a avorté, fi elle n'en meurt pas, il luy refte toûjours quelque chofe de dérangé dans le corps qui la rend maigre long-temps, languiffante, & hors d'état de rendre dans la fuite de bons fervices. Il faut prendre garde, dit encore l'Auteur cité cy-deffus, lors qu'on « Obfervafait couvrir des Cavales en main ou autrement, que l'Etalon & la « Cavale mangent tout de même; c'est à dire, que fi l'Etalon cft au foin « l'Etalon & la «tions necef & à l'avoine, ce qu'on appelle être au fec, il faut que la Cavale vive a de même, ou elle ne retiendra pas fitôt, & que s'il mange de l'herbe, « la Cavale en doit auffi manger. La raison de cela c'eft qu'il faut que « les corpufcules qui émanent de ces differens alimens n'aïent point affez de rapport l'une à l'autre, de maniere que fe froiffant l'un l'autre dans leurs mouvemens, ils fe détruifent quelquefois entierement fans pouvoir s'affocier, ce qui fait que les efprits feminaux de ces deux animaux ne produifent rien, ou donnent plus rarement des Poulains.

ll eft conftant que les Cavales retiennent beaucoup mieux quand elles font en chaleur, cette action qu'elles marquent anime le Cheval, rend fa femence bien plus fpiritueufe, & par ce moyen bien plus en état de vivifier l'oeuf auquel elle a du rapport, & qui eft comme niché dans Fovaire de la Jument.

Il faut avant que de faire couvrir la Jument la placer dans un endroit où elle foit vûë du Cheval & d'où elle puiffe auffi tout d'un coup le dé

Mm

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couvrir; on les tiendra tous deux quelque temps ainfi en haleine, & c'est le fecret de faire infailliblement concevoir auffi-tôt la Jument; on prétend qu'on met une Cavale en chaleur de cette maniere.

Comment mettre une Cavale en chaleur afin qu'elle retienne.

ON luy donne un picotin de chenevi foir & matin durant huit jours

avant que de la mener au Cheval ; fi la Jument refuse de manger cette graine, on la mêle avec du fon ou de l'avoine, ou bien on la fait jeuner pour que la faim luy faffe trouver le chenevi de fon gout. Si l'Etalon en peut manger, la formation du fœtus ne s'en fera que plus

rement.

Qu'on fache pour maxime qu'il ne faut jamais faire couvrir une Cavale pendant qu'elle nourrit fon Poulain; deux inconveniens en résultent; le premier, qu'elle eft affez chargée de nourrir fon Poulain, fans s'alterer encore davantage, & fournir de la fubftance pour en nourrir un autre dans fon corps; & le fecond, qu'il eft dangereux que le fang qui doit contribuer à la formation du lait ne foit diverti d'ailleurs ou corrompu par des caufes interieures, ce qui rend le lait mauvais & tres-pernicieux, même pour le Poulain qui le fucce, outre que la Cavale fe ruine en peu de temps lorfque cela luy arrive.

Encore un coup ce n'est pas un ménage de faire porter tous les ans un Poulain à une Cavale; il y a plus à perdre qu'à gagner: s'il y en a ceperdant, qui malgré cet avis veuillent fe fatisfaire là deffus, du moins qu'ils ne faffent couvrir leurs Cavales que huit jours aprés qu'elles auront pouliné, afin qu'elles ayent le temps de fe bien purger; mais qu'on fe fouvienne toûjours que ce n'eft pas la bonne maxime.

C'est par les moyens qu'on vient de décrire, que dans les pays où il y a de grands Haras, qu'on fe fournit de bons chevaux, non feulement pour monter & pour Etalons, mais encore pour tirer, & qu'on ne manque point de Poulains pour en perpetuer la race; outre que l'un & l'autre trouverront dans le fuc des herbes des rapports de convenance avec la tiffure de leurs fibres, ce qui fait qu'ils en croîtront plus beaux, que l'air qu'ils y refpirent leur étant naturel, les rendra plus fains & plus gaillards, & que le climat où ils feront nez n'aura rien qui repugne à leur nature.

De ce qu'il convient faire quand le Poulain eft nouvellement né.

LE Poulain n'eft pas plutôt né qu'on le laiffe enfermé dans une Etable
auprés de fa mere durant fept ou huit jours, afin qu'il fe fortifie pour
fans qu'il
la mieux fuivre aprés au pâturage: il la tete là tant qu'il veut,
foit befoin que perfonne luy aide, fa mere au contraire femble l'y attirer
par fes petits henniffemens; & fi ce Poulain ne la fuivoit pas, la Cavale
fouvent ne feroit que lever la tête, que hennir, & oubliroit même une
ce qui la maigriroit, & luy
bonne partie du jour à manger & à boire, ce qui la
feroit avoir peu de lait.

Comment traiter les Cavales aprés qu'elles ont pouliné.

Durant les huit jours dont on a parlé, la Cavale qui aura nouvelle

ment pouliné, fera nourrie de bon foin & de bonne avoine, afin qu'elle répare les forces qu'elle a perdues dans fon travail ; fi l'on a du fain foin foit en herbe, foit fec, on luy en donnera, cet aliment luy eft tres-propre pour avoir du lait; il faut neanmoins obferver de luy en donner moderément, car fi elle en mangeoit trop, elle pourroit s'en trouver

mal.

Il faut pendant ce temps abreuver la Cavale d'eau blanchie avec de la farine, & mêler parmi un peu de fel, cela ôte la crudité de l'eau, & fait revenir l'apétit que la Cavale pourroit avoir perdu dans le mal qu'elle a fouffert; on fe donnera bien garde de manier le Poulain les deux premiers mois, parce qu'il feroit dangereux, étant encore fort tendre, qu'on ne luy blefsât le dos.

Dans les Haras bien reglez, on a une loge affez fpatieufe pour contenir les Cavales dans les pâturages; & dans lesquelles on les enferme pour les garantir du grand foleil qui les incommode, & des autres injures du temps; car il n'y a point d'animaux auquel le froid foit plus contraire qu'aux Chevaux ; il ne faut pas auffi-s'étonner fi dans la campagne on voit tous les jours déperir tant de chevaux qu'on met à l'herbe, & qu'on y laiffe expofez à tout ce que l'air a de plus infuportable pendant les faifons qu'ils font aux pâtures.

Voicy un autre avis qu'il eft encore bon de fuivre, & qui confifte à avoir bonne provifion de foin pour nourrir les Cavales à l'Ecurie.

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Du temps de fevrer les Poulains, & de leur nourriture après qu'ils font fevrez

Es fentimens font partagez fur le temps de fevrer les Poulains d'avec leur mere; les uns veulent qu'on les laiffe teter jufqu'à ce qu'ils ayent un an ou deux, d'autres difent qu'on doit le faire à dix-huit mois, & les fevrer au commencement de l'hyver, lorfqu'il commence à faire froid. c'est à dire, environ à la faint Martin.

Mais la maxime la plus fuivie en France eft de fevrer les Poulains à un an, & par confequent de les laiffer teter jufqu'aux herbes; le lait les fortifie pendant l'hyver, & les nourrit mieux que tout autre aliment. Cette maniere d'agir à leur égard fait qu'ils peuvent rendre fervice au harnois dés l'âge de trois ou quatre ans ; il faut à la verité les y ménager, fi l'on veut qu'ils y deviennent beaux, & qu'ils y résistent longtemps.

Quand les Poulains font à l'Ecurie pendant l'hyver, il faut avoir foin de la tenir bien nette, & de ne leur y point laiffer manquer de litiere: il faut les laiffer détachez, & leur toucher le moins qu'on peut, quand ils font encore fi tendres; car on pourroit les bleffer, & les empêcher par là de prendre une belle croiffance.

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