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XIX.

de Novi

ces.

dres chofes, un livre, une tablette, un ftilet. Ceux qui fe prefentoient pour entrer dans le Monaftere, n'étoient reçus qu'après de grandes Reception épreuves. Premierement, pendant quatre ou cinq jours, on laiffoit le poftulant frapper à la c. 58. porte, & on lui faifoit des difficultez, jusques à le maltraiter. S'il perfiftoit, on le mettoit pour quelques jours dans le logement des hôtes, puis dans celui des novices; & on lui donnoit un ancien pour examiner fa vocation, lui propofant combien le chemin du ciel eft rude. Au bout de deux mois on lui lifoit la regle: puis fix mois après, & une troifiéme fois au bout de quatre mois. Après un an de perfeverance, on le recevoit. La profeffion fe faifoit dans l'oratoire devant toute la communauté, & il ne promettoit autre chofe que la ftabilité, la converfion de fes mœurs, & l'obéiffance. Il en faifoit fa cedule écrite de fa main, & la mettoit fur l'autel. S'il avoit quelque bien, il le donnoit aux pauvres, ou au Monaftere, par un acte folemnel. Alors on le revêtoit de l'habit du Monastere, & on gardoit le fien pour le lui rendre, fi par malheur il fortoit. Les peres pouvoient offrir leurs enfans en bas âge, pour être reçus dans le Monaftere. Ils faifoient pour eux la pro- .59 meffe, qu'ils enveloppoient de la palle ou nappe Liturg. de l'autel, avec leur offrande, & la main de l'en- Gall. lib. 1. fant. Ils ne pouvoient lui rien donner mais 5.n. 10. feulement au Monaftere, pour lui ôter tout fu- 6.61 jet de tentation. Si un Moine étranger demandoit l'hofpitalité, on le gardoit tant qu'il vouloit. On recevoit fes avis, & fi l'on étoit édifié de fa conduite, on le prioit de demeurer dans le Monaftere. Mais on ne recevoit point un Moine d'un Monaftere connu, fans le confentement de l'Abbé. On gardoit dans le Monaftere c. 63 le rang de la reception; & les plus jeunes ren

V. Mabill

doient honneur aux anciens, les appellant Nonnes, c'eft-à-dire, Peres, fe levant devant eux, & leur demandant la benediction.

c. 69. Il n'étoit pas permis aux freres de fe défenc. 70. dre l'un l'autre, ni de fe frapper, ou s'excom6.23. munier, de leur autorité privée. Si quelqu'un

manquoit à la regle, ou defobéiffoit aux fuperieurs, les anciens l'avertiffoient en fecret, juf.30. ques à deux fois. S'il ne fe corrigeoit on le re6.43.45.46. prenoit publiquement: puis on l'excommunioit, 6. 24. fi on jugeoit qu'il comprît la grandeur de cette peine: s'il étoit trop dur, on ufoit de punition corporelle, c'est-à-dire, de jeûnes ou de coups de fouet; & on traitoit de même à proportion les enfans. Les moindres fautes étoient châtiées : mais plus legerement, quand le coupable s'en accufoit le premier.

La regle appelle excommunication, toute feparation de la communauté, plus ou moins grande, à proportion des fautes. Comme de ne point entonner de Pfeaume ou d'Antienne, & ne point lire de leçon à l'office : de manger seul après les autres, d'être exclus tout ensemble de t.25. la table & de l'oratoire : de ne parler à perfon1.Cor. v 5. ne, d'être feparé de tous, même dans le trac. 27. vail. Saint Benoît applique à cette entiere separation, les paroles de l'Apôtre, qui dit, que l'excommunie eft livré à fatan : ce qui fait croire qu'il parle d'une veritable cenfure ecclefiaftique: mais il veut que l'Abbé prenne un foin particu6. 28. lier de l'excommunié. Que fi quelqu'un ne profitoit point des corrections, même corporelles: après avoir effaié tous les moiens de le corriger, on le chaffoit enfin du monaftere, de peur qu'il 6.29. ne corrompît les autres. Que s'il vouloit revenir promettant de s'amender, on le recevoit jufqu'à trois fois. Telle eft la regle de faint Benoît : qui pretend n'y mettre rien de rude ni de

Prelog.c.

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difficile, & ne la traite que d'un petit commencement, bien éloigné de la perfection qui eft décrite dans les conferences de Caffien, les vies des Peres & la regle de faint Bafile. J'ai rapporté celle-ci affez au long, parce qu'elle a été trouvée fi fage, que dans la fuite des tems elle a été reçue par tous les Moines d'Occident.

X X.

Abbé.

Greg. 1.

Dans le même tems, mais dans une autre partie d'Italie, nommée alors la province Vale- S Equice rie, aujourd'hui l'Abruzze ulterieure, vivoit faint Equice, Pere de plufieurs Monafteres. Etant dial. c. 4. fatigue dans fa jeuneffe de rudes tentations de la chair, il s'appliqua à l'oraison avec plus d'affiduité. La nuit un Ange lui apparut, en prefence duquel il lui fembla qu'on retranchoit la fource de ce mal; & depuis ce tems, il ne fentit plus aucune tentation femblable. Ainfi appuié du fecours de Dieu, outre les hommes qu'il gouvernoit déja, il commença à conduire des filles avertiffant toutefois fes difciples de ne fe pas fier à fon exemple. Outre le foin de fes Monafteres, il s'appliquoit encore à l'instruction des peuples: allant dans les villes, dans les bourgades, & les maifons particulieres. Ses habits étoient fi pauvres, & fon exterieur fi méprifable, qu'à moins de le connoître on ne lui auroit pas rendu fon falut. Il montoit le plus méchant cheval du Monaftere, qui n'avoit pour bride qu'un licou, & que dés peaux de Mouton pour felle. Il portoit fur lui, dans des facs les livres facrez, & les expliquoit par tout où il arrivoit.

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:

Felix homme noble de la province de Nurfie, lui dit un jour Comment ofez-vous prêcher fans avoir d'ordre facré, ni de permiffion de l'Evêque de Rome, fous qui vous vivez? Saint Equice lui répondit: Je m'en difois autant à moi-même mais une nuit un jeune homme très-beau m'a apparu, & m'a appliqué une lan

cette

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cette fur la langue, en difant : J'ai mis mes paroles en ta bouche: va prêcher. Depuis ce jourlà, je ne puis m'empêcher de parler de Dieu. Le bruit de fes prédications étant venu jufques à Rome, les Clercs de l'Eglife Romaine dirent au Pape Qui eft cet homme ruftique, qui fe donne l'autorité de prêcher, & s'attribue vos fonctions, tout ignorant qu'il eft? Il faut l'envoier prendre, afin qu'il connoiffe la vigueur de la difcipline. Le Pape y confentit, & envoia Julien, alors défenfeur de l'Eglife Romaine, & depuis Evêque de Sabine lui ordonnant toutefois, d'amener le ferviteur de Dieu avec beaucoup d'honneur.

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Julien alla promptement au Monaftere, où il trouva les Moines occupez à tranfcrire des livres. Il leur demanda où étoit l'Abbé. Il eft, dirent-ils, dans ce valon, qui fauche du foin. Julien avoit un valet infolent, qu'il envoia pour lui amener l'Abbé. Il entra promptement dans le pré, & regardant tous les faucheurs, il demanda qui étoit Equice. Mais quand on le lui eut montré, quoiqu'il ne le vit que de loin, il commença à trembler: enforte qu'il pouvoit à peine fe foutenir. Il embraffa les genoux du faint Abbé, & lui dit, que fon maître étoit venu le trouver. Saint Equice lui dit: Prenez du foin pour vos chevaux : je vous fuis, quand j'aurai achevé le peu d'ouvrage qui refte. Julien étonné de ce que fon valet tardoit, le fut encore plus quand il le vit revenir chargé de foin. Je ne t'ai pas envoié querir du foin, lui dit-il : mais m'amener un homme. Le voici qui vient, dit le valet. En effet faint Equice arriva aiant des botines garnies de cloux, & portant fa faux fur fon cou. Julien le méprifa & fe preparoit lui parler rudement: mais quand il le vit proche, il fut faifi d'un tel tremblement, qu'à peineni put-il parler pour

s'ac

s'acquiter de fa commiffion. Il courut lui emAN. 529 braffer les genoux, fe recommanda à ses prieres, & lui dit, que le Pape defiroit le voir.

Saint Equice rendit graces à Dieu, qui le vifitoit par le fouverain Pontife; & aiant appellé fes freres, il commanda de preparer les chevaux & preffa fortement Julien de partir à l'instant. Il eft impoffible, dit Julien, je fuis trop las pour partir aujourd'hui. Saint Equice lui dit : Vous m'affligez, mon fils; car fi nous ne partons aujourd'hui, nous ne partirons point. En effet, le lendemain au point du jour arriva un courier en diligence avec une lettre à Julien, portant ordre de ne point tirer le ferviteur de Dieu de fon Monaftere. Et comme Julien demanda la caufe de ce changement : il apprit, que le Pape avoit été fort épouvanté en une vilion, pour avoir voulu faire amener l'homme de Dieu. Saint Equice retint Julien quelque tems, pour exercer envers lui la charité; & le força à recevoir le falaire de fon voiage. On croit que Saint Alta SS. Equice mourut vers l'an 540. & fon tombeau Ben. to.. fervit de refuge aux Moines pendant les incur- p. 658. fions des Lombards.

Mort de Felix III.

Le Pape Felix III. mourut le douziéme d'O- XXI. &tobre 529. après trois ans & deux mois de Pontificat. Il bâtit à Rome dans la rue facrée Boniface l'Eglife de faint Cofme & faint Damien, & re- II. Pape. bâtit celle de faint Saturnin, qui avoit été brû- Lib.Pontif. lée. Il fit deux ordinations au mois de Fevrier & de Mars, & ordonna cinquante-cinq Prêtres, quatre Diacres & vingt-neuf Evêques. On élut en fa place Boniface II. Romain de naiffance, fils de Sigifvult, par confequent de race de Goths. En même tems un autre parti élut un nommé Diofcore, qui fut ordonné dans la Bafilique de Conftantin, & Boniface dans celle de Jule, le quinziéme d'Octobre. Mais le fchifme ne dura qu'en

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