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fuis le Dieu d'Abraham votre pére. Ne CH. XIX, craignez point: car je fuis avec vous. Je vous benirai, & je multiplierai votre race à caufe d'Abraham mon ferviteur. Ifaac éleva en ce lieu-là un autel, où il invoqua le nom du Seigneur. Il y dreffa fes tentes, & fes gens y creuférent un puits,

Alors Abimélech accompagné d'Ochozath fon favori, & de Phicol Général de fon armée, vint rendre vifite à Ifaac en ce même lieu. Et Ifaac leur dit: Pourquoi venez-vous voir un homme que vous haïffez, & que vous avez chaílé d'avec vous ? Ils lui répondirent: Nous avons vû que le Seigneur est avec vous c'est pourquoi nous avons réfolu de faire entre nous une alliance, avec ferment que vous ne nous ferez aucun tort; comme nous n'avons touché à rien qui fût à vous, & que nous ne vous avons fait que du bien, vous ayant laiffé aller en paix, comblé des bénédictions du Seigneur. Ifaac leur donna un repas; & après qu'ils eurent mangé & bû, ils fe levérent du matin, & l'alliance fyt jurée de part & d'autre. Ifaac les reconduifit, & ils s'en retournérent en paix.

CH. XIX.

ECLAIRCISSEMENTS ET REFLEXIONS.

[Je ferai avec vous, & je vous benirai &c. parce qu'Abraham a obei à ma voix, & gardé mes commandements.] La foi & l'obéiffance d'Abraham font-fi précieuses aux yeux du Seigreur, qu'il veut que les bénédictions que fa miféricorde répandra fur le fils, foient regardées comme le fruit des mérites du pére. Mais en parlant ainfi à Ifaac, il lui apprend que le moyen de rendre efficaces pour lui les promeffes faites à fon pére, eft d'imiter fes vertus. Genele to. 3. Car les promeffes de Dieu s'accompliffent certainement : mais ce n'est pas toujours à l'égard des perfonnes qu'elles ont paru regarder. Le fecret de Dieu ne fe manifefte que par la fidélité & la perfévérance des Elûs."

2. Cor. 9. 6.

V. 10.

[Ifaac fema dans ce pays là, & il recueillit cette année-là cent pour un.] Ifaac qui ne poffé, doit aucun fonds, loua le champ qu'il enfemença; ou il fe fervit de quelque terre vacante & fans maître. Il y fema, & il recuillit cent pour un le Seigneur le bénit. En lifant ces paroles, fouvenons-nous de celle de S. Paul. Celui qui féme avec épargne, recueillera peu : & celui qui féme avec abondance, rocueillera avec abondance.... Dieu donc qui donne la femence à celui qui fémè, vous donnera le pain dont vous avez besoin pour vivre: il multipliera ce que vous aurez femé, & fera croître de plus en plus les fruits de votre juftice. La femence qu'Ifaac jetta dans un champ, eft une excellente image de l'aumône. Le champ n'étoit pas à lui: il ne l'avoit qu'à titre d'emprunt. Il y fema peu & reçut infiniment davantage. Sans les pauvres

nous n'aurions pas où femer. Ils nous fournif
fent un champ où nous mettons des
rendent cent pour un. Sans eux
toujours pauvres, parce que nous

grains qui CH. XIX nous ferions ferions tou

jours ftériles. Nous penfons qu'ils ont befoin Genese to. 3. de nous mais dans la vérité c'eft nous-mêmes qui avons befoin d'eux. C'eft celui qui féme, & non le champ, à qui le grain eft néceffaire; comme c'eft pour celui qui a femé, & non pour le champ, que le grain eft multiplié. Or Dieu en infpirant la volonté de donner & de répandre, prépare l'abondance à celui qui ofe fe fier à fa fidélité. Il donne le premier de quoi femer car la bonne volonté vient de lui. Et il ne le fait que pour pouvoir avec juftice récompenfer fa propre miféricorde. Il multipiera ce que vous aurez femé, & fera croître de plus en plus les fruits de votre juftice.

[Les Philistins remplirent de terre tous les puits que les ferviteurs d' Abraham avoient autrefois creufez.] C'étoit afin que la difette d'eau obligeât Ifaac de s'éloigner de leur pays. La profpérité des faints en cette vie ne dure pas longtemps. Ils fuccomberoient, s'ils n'étoient pas quelquefois confolez mais ils feroient plus dangereufement tentez ou de négligence, ou d'orgueil, fi leur paix duroit trop long-temps. La protection de Dieu avoit été fi fenfible fur Ifaac, que les Rois appréhendoient les fuites de fon élévation & de fa grandeur. Les faints feront toujours fans comparaifon plus en fureté dans l'obfcurité, que dans l'éclat ; & mieux deffendus par la pauvreté que par les richeffes.

[Ifaac s'étant retiré alla camper dans la vallée de Gérare, où il fit creuser des puits d'eau vive. Mais les pafleurs de Gérare fulcitérent des querelles aux fiens..... 1l partit de là &c.]

Ibid.

1. Pier.2.23.

Ifaac maltraité injuftement, ne réfifte point,. CH. XIX, & ne fait aucune plainte. Il cède à l'injustice en s'éloignant. On lui contefte des puits, qu'il a creufez avec beaucoup de travail. Il les abandonne, plutôt que de les deffendre au péril de perdre la charité & la paix du cœur. Ainfi il Mat. 11. 29. eft tout ensemble la figure & le diiciple de celui qui eft doux & humble de cœur ; qui n'a ja- · mais répondu aux injures dont on le chargeoit par d'autres injures; ni fait aucune menace à le maltraitoient ; & qui fait à fes difciples ce commandement : Je vous dis de ne point vous deffendre contre celui qui vous maltraite. Au contraire,fi quelqu'un vous frappe à la joue droite, présentez-lui encore l'autre : & fi quelqu'un vous fait un procès pour vous enlever votre robbe, abandonnez-lui encore votre manteau.

Mat. 5. 39.

ceux qui

[Abimélech accompagné de.... Phicol &c.] Genese to. 3. On doute s'ils font les mêmes que ceux qui firent alliance avec Abraham. Il n'y a aucun inconvénient à le fuppofer. Car la vie des hommes de ce temps-là étoit à peu près de la même étendue que celle des Patriarches, Abraham, Ifaac & Jacob; & il n'y a rien de fort extraordinaire qu'un Prince beaucoup plus jeune qu'Abraham, qui avoit quatrevingt-dix-neuf ans quand il entra dans fes Etats, lui ait furvécu de quelques années.

Ce Prince vient rendre vifite à Ifaac, & lui demande fon amitié. Voilà le fruit de la parience. Si Ifaac, puiffant comme il étoit, avoit voulu employer la force, il fe feroit peut-être maintenu dans la poffeffion des puits qu'on lui conteftoit: mais il auroit fait d'Abimélech un ennemi. Sa douceur au contraire le gagna. If eut honte enfin du peu de cas qu'il avoit fait d'une fi grande vertu. fl comprit que Dieu

étoit avec Ifaac; & que rien ne pouvoit lui être ni plus avantageux, ni plus honorable que l'amitié d'un tel homme : & il ne craignit point d'avilir fa dignité, en allant le trouver en perfonne pour lui propofer une alliance. Que de querelles, de divifions, de procès on étouffe, que de chagrins on s'épargne, quand on fçait fouffrir! & qu'on eft abondamment récompenfé de la violence qu'on fe fait, par la paix dont on jouit au dedans, & fouvent au dehors.

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CHAPITRE XX.

Jacob beni par Ifaac. Plaintes inutiles d'Efau. Son reffentiment contre Jacol. Ribecca en prévient les fuites. Gen. 27.

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An du M.

SA A C étant devenu vieux, fes yeux s'obfcurcirent de telle forte, qu'il ne pouvoit plus voir. Se croyant alors piès 2245 de fa fin, il appella Efau fon fils aîné, & lui dit: Mon fils, me voilà, comme vous voyez fort âgé & j'ignore le jour de ma mort. Prenez vos armes, & allez-vous en à la chaffe. Lorsque vous aurez pris quelque chofe, vous me l'apprêterez comme vous fçavez que je l'aimé, afin que j'en mange, & que je vous beniffe avant que de mourir. Rébecca entendît ces paroles; & dès' qu'Efau fut forti, elle les rapporta à Jacob: après quoi elle lui dit: Mon fils,

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