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ch. 76.

Gent. 1. 4.

» les opprimoit, ayant été enlevées par Xerxes, Seleucus les rendit dans la fuite; & lorfque le Vaiffeau qui les portoit arriva à » Rhodes,les chefs de la ville les vinrent prier d'accepter l'hof

pitalité, & les placerent fur l'oreiller: Rhodii quoque eas urbi fuæ appulfas, cum in hofpitium publicè invitassent', facris etiam pulvinaribus collocaverunt. Et Suetone met ces oreillers, que les Latins nommoient pulvinaria, & les Grecs xxivas, au nombre des chofes qui n'étoient employées que pour les Dieux, (1) In Caf. lorfque parlant de Cefar, il dit (1), fede ampliora humano faftigio decerni fibi paffus eft... Templa, aras, fimulachra juxta Deos, Pulvinar, Flamen, Lupercos, &c. Il fouffrit même qu'on lui décernât des honneurs au-deffus de ceux qu'on rend aux hommes, des temples, des autels, des ftatues auprès de celles des (2) Adv. Dieux, l'oreiller, un Prêtre, des Luperces, &c. Arnobe (2) dit de même en parlant aux Payens de quelques-uns de leurs Dieux. Il faut bien, dit-il, que vous les ayez reconnus pour tels, puifque vous leur confacrez des Temples, des oreillers, &c. Jacques Spon, dans fon voyage de la Grece, dit qu'on voyoit encore à Athenes le Lectifterne d'Ifis & de Serapis. C'étoit un petit lit de marbre de deux pieds de long, fur un de hauteur, fur lequel ces deux Divinités étoient reprefentées affifes. Ce fçavant Voyageur dit qu'on en trouvoit d'autres femblables dans la même ville, comme auffi à Salamine, & encore ailleurs. Nous apprenons par cette Relation la vraie forme des Lectifternes & des couffins. C'étoient de petits lits ou de marbre, ou de pierre, ou de bois, fur lefquels on plaçoit les ftatues des Dieux en l'honneur defquels on prepa roit un feftin.

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Après ce que nous venons de dire, il est évident que le Lectifterne étoit également en ufage dans la Grece & dans 'Italie. Ajoutons que les jours deftinés à cette fête, étoient des plus folemnels, pendant lefquels il n'étoit pas permis d'envoyer perfonne au fupplice, & qu'on donnoit même la liberté aux coupables. C'étoit le premier Magiftrat, ou le fouverain Pontife qui les indiquoit, & l'objet étoit d'appaiser les Dieux, ou de leur demander quelques graces. Finiffons en difant que la table du feftin, & les lits où devoient repofer les Dieux étoient ornés de rameaux, de fleurs & d'herbes odoriferantes

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odoriferantes. En voilà affez fur ce fujet; difons un mot des Evocations.

Il y en avoit de trois fortes; les premieres étoient des ope- Evocations. rations magiques qu'on employoit pour évoquer l'ame des morts; & j'en parlerai dans l'Article de la Magie. Les fecondes, dont il fera ici question, étoient employées ordinairement, pendant le fiege de quelque ville, qu'on ne croyoit pas pouvoir, ni même devoir prendre, fans avoir invoqué les Dieux, fous la protection defquels elle étoit. Macrobe (1) nous a confervé une formule d'Evocation, qui met- (1) Sat. 3. tra les Lecteurs au fait, mieux que tout ce qu'on pourroit dire fur ce fujet. » Si c'eft un Dieu, fi c'eft une Déeffe fous la garde de laquelle eft la ville & le peuple de Carthage, je « vous prie, je vous conjure, & je vous demande en grace, grands Dieux, qui avez pris cette ville & ce peuple fous vo» tre protection, d'abandonner ce peuple & cette ville, de quitter toutes ces demeures, Temples, lieux facrés; de » les délaiffer, de leur infpirer la crainte, la terreur & » l'oubli, & de vous retirer à Rome chez notre peuple : que » nos demeures, nos Temples, nos chofes facrées, & notre ville vous foient agréables. Faites-nous entendre que vous » êtes mon Protecteur, celui du Peuple Romain, & de mes Soldats. Si vous le faites, je m'engage à fonder des Temples & des Jeux.

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Enfin, la troifiéme forte d'Evocation, étoit celle qui étoit employée pour évoquer les Dieux. Pour entendre ce que je vais dire à ce fujet, il faut fçavoir que la Theologie payenne enfeignoit que les Dieux préfidoient particulierement fur quelques lieux, & que fouvent il y avoit plufieurs de ces lieux qui étoient fous la protection du même Dieu; & comme il ne pouvoit être partout en même-temps, il étoit neceffaire d'ufer de la ceremonie de l'évocation, quand on croyoit avoir befoin de fa préfence. On avoit pour cela des Hymnes propres à cette operation, qu'on appelloit Aerizo, comme font la plupart de ceux qu'on attribue à Orphée, & ceux du Poëte Proclus. Ces Hymnes étoient compofés pour l'ordinaire de deux parties. La premiere étoit employée à louer les Dieux, & à parler des lieux differens qui étoient Tome I.

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liv. 3.ch. 112.

113. & 114.

fous leur protection. La feconde contenoit la priere par laquelle on s'efforçoit de les attirer, & de les faire venir dans les lieux où leur présence étoit neceffaire. Lorfqu'on croyoit que le Dieu Patron étoit arrivé, on célebroit des fêtes qui étoient nommées, inuia. Telles étoient quelques-unes de celles des Argiens en l'honneur de Junon, & de celles des habitans de Delos & de Milet, pour Apollon.

Lorfque le danger qui avoit fait appeller les Dieux, étoit paffé, on leur permettoit de s'en aller ailleurs, & on avoit encore d'autres Hymnes pour celebrer leur départ. Jules Scaliger, que l'on (1) Poët. peut confulter fur ce fujet (1) obferve que ces Hymnes qu'on nommoit àμToì, & dans lesquels excelloit fur-tout Bacchyllide, Poëte lyrique, étoient plus longs que ceux qu'on employoit pour faire venir les Dieux, afin de retarder autant qu'on pouvoit leur éloignement. Car quand nous defirons, dit-il, nous voulons que ce qui eft l'objet de nos fouhaits, arrive promptement, & que ce foit le plus tard qu'il eft poffible, que nous en foyons privés.

mens.

par

(2) Macrob. la Sat. L. 3. c. 9.

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Aux Evocations je dois joindre les Devouemens, que les Les Devoue- Romains appelloient Devotio. Il y en avoit de' particuliers, comme ceux des deux Decius, & de Marcus Curtius, qui fe devouerent pour le falut des Romains; & de publics, faits le Dictateur ou le Conful, à la tête des armées. En voici formule, confervée par le même Macrobe (2). « Dis le pere, (Pluton) Jupiter, Manes, ou de quelque nom qu'on puifle vous appeller, je vous prie de remplir cette Ville de Carthage, & l'armée dont je veux parler, de crainte & de terreur : Faites que ceux qui portent les armes con» tre nos Legions & contre notre armée, foient mis en dé» route; que ceux qui habitent leurs villes, & leurs campagnes, avec leurs habitans de tout âge, vous foient devoués felon les loix, fuivant lefquelles les plus grands ennemis » vous font devoués. Je les devoue par l'autorité de ma charge, pour le Peuple Romain, pour notre Armée, & pour »nos Legions, afin que vous conferviez & les Commandans, & ceux qui fervent fous leurs ordres.

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L'Antiquité ne nous a pas confervé la formule des Devouemens particuliers, mais il eft sûr qu'il y en avoit une ; &

lorfque Decius fe devoua, il avertit, comme je l'ai dit dans une autre occafion, le Pontife Valere de prononcer la formule du Devouement : Deorum ope, dit-il Valeri, opus eft ; agedum, præi verba quibus me pro Legibus devoveam.

Lorfque la Loi devouoit quelqu'un à la mort, il étoit permis de le tuer. Il y en avoit une de Romulus qui étoit conçue en ces termes: Si Patronus Clienti fraudem faxit, facer efto. Si quelque Patron fait tort à fon Client, qu'il foit devoué. C'étoit à Pluton, ou Dis, & aux autres Divinités infernales, que les criminels étoient devoués.

Je ne dirai rien ici des Supplications & des Voeux faits par des particuliers: on voit bien que le détail en feroit infini, & nous apprendroit feulement que les Dieux ayant toujours été regardés par les Payens comme les auteurs de tous les biens & de tous les maux, on ne manquoit pas de leur demander ces biens, & la délivrance des maux; que dans le danger ou dans les maladies, on leur faifoit des voeux pour en être délivré, & pour obtenir le recouvrement de la fanté; qu'enfin on mettoit dans les Temples, en reconnoiffance, les membres de la guérifon defquels on croyoit leur être redevables. Les Antiquaires en ont confervé un grand nombre comme on peut le voir dans leurs Ouvrages. Parmi ces voeux,il y en avoit qui portoient des caracteres de differens Dieux, comme celui qu'on nomme la main d'Enée, fur laquelle il y a Votum Cecropis, & qui a été expliqué dans un petit Ouvrage de Thomafini. Quelquefois c'étoit une fimple main, un bras, une jambe, un œil fans aucun fymbole. Ce qu'on trouve de plus fingulier parmi ces vœux, eft une Table de cuivre fur laquelle il eft fait mention de toutes les guerifons operées par l'interceffion d'Efculape.

CHAPITRE X V.

Des Céremonies Religieufes pratiquées à la fondation des Villes.

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'A dit il y a un moment que les évocations fe faifoient lorfqu'une Ville étoit affiegée, pour invoquer les Dieux, Tous la protection defquels elle étoit ; & comme ces mêmes Dieux en devenoient les Patrons au temps de la fondation de chaque Ville, il eft neceffaire de dire un mot des céremonies qui fe pratiquoient en cette occafion. Feftus nous apprend que les Etruriens avoient des Livres qui contenoient les ceremonies ufitées à la fondation des Villes, des Autels, des Temples, des Murailles & des Portes ; & Plutarque dit que Romulus voulant jetter les fondemens de la ville de Rome, fit venir d'Etrurie des hommes qui lui apprirent de point en point toutes les céremonies qu'il devoit obferver. Selon Denys d'Halicarnaffe, on commençoit par offrir un facrifice, après lequel on allumoit des feux près des tentes, & ceux qui devoient avoir quelque fonction dans la conftruction de la Ville, fautoient pardeffus ces feux, pour se purifier. Enfuite on creufoit une foffe, dans laquelle on jettoit les premices de toutes les chofes qui fervoient à la nourriture de l'homme, & une poignée de terre du pays d'où étoient venus chacun de ceux qui affiftoient à la ceremonie.

On confultoit en même-temps les Dieux, pour fçavoir fi l'entreprise leur feroit agréable, & s'ils approuvoient le jour qu'on avoit pris pour la commencer. Enfuite on traçoit l'enceinte par une traînée de terre blanche, qu'on appelloit Terre pure; & faute de cette efpece de craie, on fe fervoit de farine, comme fit Alexandre, au rapport de Strabon, lorsqu'il jetta les fondemens d'Alexandrie. Cette premiere operation achevée, on ouvroit un fillon auffi profond qu'il étoit poffible, avec une charrue d'airain, & on attachoit à cette charrue un taureau blanc, & une géniffe blanche. Tout l'efpace que la charrue avoit ouvert étoit reputé faint. Pendant qu'on formoit

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