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prendre des pilotes qui connuffent ce mouillage.

Le Roi fe rendit au Havre de Grace pour voir l'embarquement qui fe fit le 6 Juillet. (1) Plufieurs femmes de la Cour l'avoient accompagné pour jouir de ce fpectacle, rare & nouveau alors. Le Roi leur avoit fait préparer un feftin magnifique fur le plus beau de fes vaiffeaux, nommé le Carraquon (2), gros bâtiment de huit cent tonneaux, qui portoit cent pieces de groffe artillerie & qui n'en étoit pas moins bon voilier. Un Auteur du temps dit qu'il étoit dans la flotte comme une citadelle qui défendoit les autres vaiffeaux & qu'il n'avoit à craindre que les rochers & le

1545.

(1) On juge bien que toute la flotte n'étoit pas au Havre. D'autres vaifleaux partoient de Honfleur, de Harfleur, de Dieppe & d'autres ports de Normandie, le rendez-vous général étoit devàno P'Ifle de wight.

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(2) Henri VIII. qu'une jaloufie invincible portoit à imiter toujours malgré lui François I, fit auffi conftruire un pareil vaiffeau & lui donna auffi le nom de Carraquen; mais fa mauvaise construction le rendit inutile.

1545.

Id. ibid.

n. II.

feu. Le feu y prit par la négligence des cuifiniers, il fut impoffible de l'éteindre. Tout l'argent deftiné à l'entretien de la flotte & au payement des troupes étoit fur ce vaiffeau. Les galères n'eurent que le temps de s'en approcher pour en tirer cet argent. Le feu qui gagnoit l'artillerie les obligea de forcer de rames pour prendre le large, fans quoi elles euffent été coulées à fond par l'explosion terrible de cette artillerie embrafée. Ceux des foldats & des matelots qui profiterent du moment où les galères s'avancerent pour fe jetter dedans, furent fauvés les autres périrent dans les eaux ou dans les flammes. On avoit pourvû à la sûreté du Roi, des femmes de fa Cour & de toute leur fuite.

La flotte Françoife (1) arriva

(1) L'état de la Marine en France a beaucoup varié. Il ne paroît pas qu'avant François I. on fe fût propofé férieufement de la rendre perpetuelle, du moins ce projet n'a point été fuivi. Ce furent toujours les ennemis de la France qui la forcerent d'avoir une Marine, comme les Cat

le 18 Juillet devant l'Ifle de Wight,

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thaginois y avoient forcé les Romains. Sous la race Mérovingienne Théodebert, fils de Thierri I, remporte une victoire navale fur Cochiliac, Roi des Danois, & Gontran, Roi de Bourgogne, eft battu par Leuvigilde vers les côtes de Galice; on trouve auffi fous cette même race une expédition maritime de Charles Martel contre les Frifons.

Sous Charlemagne où aucune partie d'une bonne adminiftration n'eft négligée, la Marine eft floriflante Ce grand Prince avoit pleuré en voyant d'une Ville maritime du Languedoc les navires des pirates Normands infefter la Méditerranée & menacer les côtes de la France. Sa vigilance fufpendit les maux que fa prévoyance redoutoit; il avoit des vaiffeaux armés à l'embouchure de toutes les rivieres & dans tous les endroits expofés à des defcentes. Pour fubjuguer les Abares & pouffer fes conquêtes jufqu'aux extrêmités du Danube, il vouloit joindre l'Océan avec la Mer noire par un canal de communication entre le Rhin & le Danube. Les fucceffeurs de Charlemagne firent comme ceux d'Alexandre, ils diviferent & détruifirent tout ce que Charlemagne avoit réuni & formé.

Les premiers Rois de la troifieme race n'eurent point de Marine, parce qu'ils n'avoient prefque point de ports, les grandes Provinces maritimes étant pour la plupart fous la domination des grands vaffaux. Un de ces grands vaffaux étoit le Roi d'Angleterre, qui poffédant en France la Normandie, le Poitou, la Guyenne, étoit obligé d'entretenir des flottes pour la communication. Les avantages que la Marine lui procuroit, aver tirent Philippe Augufte d'en avoir une, il fit de grands efforts qui ne furent point heureux. 11 parvint à équipper une flotte de dix-fept cent voiles (mais quelles voiles ! } le Comte de Flan Ny

1545.

•1545.

l'armée navale d'Angleterre étoit

dres en prit trois cent, en fit échouer cent, blo qua le refte avec la flotte Angloife dans le port de Dam & obligea le Roi de brûler lui-même tous les vaiffeaux, de peur que les ennemis ne s'en rendiffent maîtres. Philippe arma encore une autre flotte pour fecourir fon fils affiégé alors dans Londres, cette flotte fut encore battue.

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Le regne de S. Louis eft une époque brillante pour la Marine Françoife, fes flottes couvrent toutes les mers, tantôt elles défendent les côtes du Poitou contre Henri III, Roi d'Angleterre tantôt elles vont conquérir le Royaume de Naples pour le Comte d'Anjou; tantôt elles tranfportent le Roi fur les côtes d'Afrique dans un appareil formidable. Joinville dir qu'au départ de Cypre pour la conquête de Damiette, la flotte étoit de dix-huit cent vaifleaux tant grands que petits. L'armement d'Aigues-Mortes fut plus confidérable

encore.

Sous prefque tous les Rois fuivans jufqu'au Rof Jean, la gloire de la Marine Françoife fe fou tient & fe fait redouter des Anglois. Sous Philippe-le-Bel, Jean de Harcourt & Matthieu de Montmorenci prennent & faccagent Douvres ; Philippe de Valois pille & brûle Soutampton, fa flotte eft défaite par les Anglois à la bataille de l'Eclufe, mais une autre flotte remporte une grande victoire fur les Flamands devant Ziriczée en Zelande (l'an 1304), & une autre flotte encore défait les Anglois près de l'lfle de Guernefey.

Le Roi Jean qui perdit tout, perdit la Marine, Charles le Sage qui répara tout, la rétablit, Ses Généraux remporterent une grande victoire fur les Anglois devant la Rochelle, (en 1372) l'Amiral Jean de Vienne pilla l'Ifle de wight & désola les côtes de l'Angleterre le long de la Manche

en 1377:

raffemblée à Portsmouth, elle n'étoit

Charles VI. prépara contre l'Angleterre une flotte qui auroit pu, dit un Hiftorien, faire un pont depuis Calais jufqu'à Douvres, elle étoit de douze cent quatre-vingt fept voiles, mais les conjonctures rendirent ce grand armement infruc

tueux.

Le regne de Charles VII. offre peu d'exploits maritimes, on voit feulement en 1451. le Comte de Dunois inveftir Bayonne du côté de la mer, & Pierre de Brézé, Comte de Maulevrier, Sénéchal de Normandie, porter en 1457 au malheureux Henri VI & à la courageufe Marguerite d'Anjou un fecours de quatre mille foldats.

Louis XI. occupé de petites intrigues & de grandes violences, négligea entiérement la Marine. Elle fembla renaître fous Charles VIII. à la faveur des guerres de Naples, mais elle eut alors peu d'éclat, elle en eut encore moins fous Louis XII. Ce Roi avoit pourtant quelques galères dans la Méditerranée, & ce furent ces galéres, qui fous la conduite de Prégent de Bidoux, pafferent pour la premiere fois le détroit de Gibraltar.

François I. obligé de combattre des Puiffances maritimes, telles que l'Efpagne & l'Angleterre, & de faire de fréquens tranfports de troupes en Italie, augmenta fa Marine, c'eft-à-dire qu'il aug menta le nombre de fes galères dans la Méditer ranée, la République de Gênes, tant qu'elle fut fa fujette, y joignit les fiennes, & les talens d'André Doria qui les commandoit, donnoient de l'éclat à tout; mais la Marine étoit affez négligée fur l'Océan, Seulement quelques Armateurs cou roient les mers & pillant les tréfors que les vaif feaux de Charles Quint alloient chercher avec beaucoup de peines au fond de l'Amérique, ils profitoient ainfi des découvertes que faifoient alors les Portugais & les Efpagnols dans le nouveaus monde & auxquelles les François n'eurent aucun

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