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CHAP. VIII. née aux larmes & à la pénitence, c'eft de nous livrer pleinement à l'amour que nous devons à Dieu, non-feulement parce qu'un tel amour eft néceffairement accompagné d'une vive efpérance, & qu'une espérance d'un bonheur éternel eft déjà une réelle félicité mais parce que l'amour de Dieu, quand il remplit le cœur, le confole, le fixe, le tient dans une profonde paix. Lorfque je vous fe rai parfaitement uni, difoit faint Auguftin en parlant à Dieu, & que vous ferez l'unique objet de mon efprit & de mon cœur, je ferai délivré de tout ce qui peut troubler ma joie ; & ma vie fera pleinement vie, parce que Lib. 1o. Conf. Vous la remplirez pleinement. Cum inhafero tibi ex omni me, omnino nufquam erit dolor & labor, & viva erit vita mea, tota plena te. Mais maintenant, parce que vous élevez & foulagez l'ame à proportion de ce que vous la rempliffez, j'éprouve que je me fuis à charge à moi-même, à cause que je ne fuis pas plein de vous. Nunc autem, quoniam quem tu imples, fublevas eum: quoniam tui plenus non fum, oneri miki fum. De fauffes joies,

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qui méritent d'être pleurées, latitiae CHAP. VIII. flenda, s'oppofent à une falutaire trifteffe, qui doit être la matiere d'une folide joie, contendunt cum lætandis maroribus. Et au contraire une mauvaife trifteffe combat en moi une fainte joie, contendunt marores mei mali cum gaudiis bonis & fouvent j'ignore de quel côté eft la victoire: & ex qua parte stet victoria, nefcio.

2. Cette humble fincérité de faint Auguftin nous apprend que tout ce qui partage l'amour que nous devons à Dieu, ou qui diminuc fon regne, ou qui le met dans la néceffité de combattre contre l'amour des autres biens, est un obftacle à notre confolation & à notre bonheur: que c'eft en réuniffant tous nos defirs & toutes nos efpérances en Dieu feul, que nous pouvons être contens: que tout ce qui divife notre cœur, le déchire, le trouble, l'inquiete, le fépare de lui-même, lui ôte l'unité & la paix que toutes les portions que chaque objet nous enleve, ne l'affoibliffent pas feulement, mais l'affligent & le tourmentent : qu'il a befoin pour fon propre repos de raffem

CHAP. VIII. bler tous ces démembremens particuliers, qui font à fon égard autant de plaies, & de rejoindre toutes fes volontés éparfes & defunies, pour trouver dans Dieu & dans JESUSCHRIST fon Fils, par l'onction du faint Efprit, une vie, une fanté, une intégrité que la multitude & le partage lui ont fait perdre. Je ne trouve que vous, ô mon Dieu, qui êtes ma force & mon afyle, où je puiffe avec fureté & avec liberté recueillir tout ce que l'amour des créatures a diffipé, a prodigué, a enlevé à mon cœur & à moi-même. Il n'y a point de lieu fûr, ni d'autre centre où je puiffe raffembler mes biens, & réparer mes pertes. Il n'y a point d'autre moien pour me retrouver moi-même, & pour empêcher que je ne m'écoule & que je ne m'appauvriffe en fortant Z. 10. Conf. c. hors de moi: Neque invenio tutum locum anima mea, nifi in te, quo colligantur fparfa mea, nec à te quicquam recedat à me.

40. 22. 2.

3. O vous, qui êtes la force & la vie de mon ame, entrez dans elle, & uniffez-la parfaitement à vous. Vous en êtes l'unique maître : poffedez-la

من

feul. Vous en êtes la juftice : reglez- CHAP. VIIL,
la feul, & rendez-la digne de vous.
Virtus anima mea, intra in eam,
coapta tibi, ut habeas & poffideas fine
macula & ruga. Il n'y a pour moi que

cela de néceffaire. Tout le refte m'eft
ou indifférent, ou inutile, ou dange-
reux, ou même nuifible. Les crain-
tes, les efpérances, les plaifirs, les
afflictions dont le monde eft fi tou-
ché, font indignes de partager mon
cœur. Le monde ne connoit ni les vé-
ritables biens, ni les véritables maux.
Il faut pleurer fur fes vaines joies:
il faut être confolé de fes injuftes dé-
plaifirs. Je ne veux être féduit ni
par
ce qu'il aime, ni par ce qu'il efpere; &
je comprens que je ne fuis ni jufte,
ni heureux, qu'en vous aimant feul,
ou qu'en defirant fortement & con-
ftamment de n'aimer que vous: Hac L. 10. Conf.co
eft mea fpes: & in eafpe gaudeo, quan-
do fanè gaudeo. Cetera verò vita hujus
tantò minus flenda, quantò magis fleturs
& tantò magis flenda, quantò minus fie-

tur in eis.

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CHAP. VIII.

S. IX.

Tous ces fentimens dont on vient de parler, conviennent_encore. plus particulierement aux perfonnes qui fe font confacrées à

Dieu.

1. Si ces fentimens, qui devroient convenir à tous ceux qui connoiffent JESUS-CHRIST, & qui par lui connoiffent fon Pere, peuvent devenir particuliers pour certaines perfon nes, & leur être plus propres qu'à d'autres, c'eft fans doute pour ceux dont JESUS-CHRIST eft le partage, & qui lui ont dit en fe confacrant à fon fervice, & à celui de fon Eglife, qu'il étoit leur héritage, & qu'ils n'en prétendoient point d'autre: Dominus pars hereditatis mea, calicis mei. Ils ont renoncé pour lui à tous les foins & à toutes les efpérances du fiecle. Ils fe font affranchis du joug pefant qui accable les autres hommes, en fe dévouant à la virginité & à la continence. Ils ont confervé pour JE S U'S-CHRIST toute.

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