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Cependant le pape fut averti que le roi d'Angle- AN. 1170,

pape

terre vouloit faire couronner Henri fon fils aîné
par l'archevêque d'Yorc, au préjudice de celui de
Cantorberi, auquel le facre des rois d'Angleterre
apartenoit fuivant l'ancienne coûtume. C'est pour-
quoi le pape écrivit à Roger archevêque d'Yorc, Iv. p. 42
& aux autres évêques d'Angleterre, pour leur dé-
fendre fous peine de dépofition de fe mêler de cette
ceremonic, tant que l'archevêque Thomas feroit
en exil. La lettre eft du vingt-fixiéme de Fé-
vrier. Le écrivit auffi à Thomas pour lui dé- 1v. ep. 43.
fendre de facrer le prince ou permettre à un autre
de le facrer, s'il ne prêtoit auparavant le ferment
que les rois avoient coûtume de prêter à l'églife de
Cantorberi, & s'il ne déchargeoit tout le monde
de l'observation de fes coûtumes & du ferment qu'il
avoit exigé en dernier lieu. Thomas avoit lui-mê-
me fait folliciter ces lettres en cour de Rome ; &
les aïant reçûës, il les adreffa à Robert évêque de
Vorcheftre fon fuffragant, lui enjoignant de les
montrer à l'archevêque d'Yorc, aux autres évêques,
& de leur défendre de la part du pape de facrer le v. ep.4.4.
prince. Thomas en écrivit auffi directement à tous
les évêques d'Angleterre & de Galles, & en parti-
culier à l'évêque de Vincheftre.

IV. ep. 45.

XVIII.

vila Bol. 21.

6.

Vers le même tems Thomas envoïa en Angleterre, pour confulter Godrie ermite fameux, qui S. Godric cumite. avoit le don de prophetic. C'étoit un homme Maii 16. p. 68. 6+ fimple & fans lettres, né de parens pauvres, & qui dans fa jeuneffe avoit fait quelque petit com merce par mer. Aïant renoncé au monde, il fit le

AN. 1170.

c. 6.

pelerinage de Rome, & celui de Jerufalem nuds pieds, puis étant revenu en fon païs, il se retira en un lieu folitaire nommé Finchale, près de Durham, où il cultivoit un petit champ dans les bois, & en tiroit de quoi fe nourrir & exercer l'hofpitalité. Les moines de la cathedrale de Durham connoiffant la pureté de fa vie, députerent un de leurs anciens pour l'inftruire & lui adminiftrer les faints mifteres à certains jours. Le demon l'attaqua par diverfes tentations, qu'il furmonta par fa foi & fon courage. Sa mortification étoit incroïable. Il porta cinquante ans durant une chemise de mailles fous fon cilice, & un habit de laine par deffus. Sa nourriture étoit du pain d'orge mêlé de cendres, & des herbes fauvages cuites & roulées par pelotons. Il ne parloit que trois fois la femaine & gardoit le filence pendant tout l'avent, & depuis la feptuagefime jusques à l'octave de Pâques : mais quand il parloit, c'étoit avec grande édification. Il passa ainfi foixante ans dans fon defert.

Un moine d'Oüeftmunster l'étant venu voir peu de tems après que Thomas eut été ordonné archevêque de Cantorberi, le faint homme lui demanda s'il étoit connu du nouveau prélat. Oüi, répondit-il, je le connois, & il me connoît : mais vous, mon pere, le connoiffez-vous? Godric répondit : Jc ne l'ai jamais vû des yeux du corps, mais fouvent de ceux de l'efprit, & fi je le voïois je le reconnoîtrois entre plufieurs autres. Le moine furpris de ce difcours n'ofoit l'interroger, & il ajoûta: Saluez-le de ma part, & lui dites, qu'il n'abandonne pas fon

deffein car il est agréable à Dieu. Il fouffrira de rudes traverses, on les chassera de son église, & il sera long-tems exilé en païs étrangers : mais après avoir achevé le tems de fa pénitence, il rentrera dans fon fiége avec plus d'honneur qu'il n'en fera forti. Le moine raporta ce difcours à l'archevêque, qui écrivit à Godric, le priant de demander à Dieu la remiffion de fes pechez. Dans les fix mois arriva fon differend avec le roi, & fon exil: pendant lequel il fit encore confulter l'homme de Dieu.

AN. 1170.

Cette derniere année, c'est-à-dire au mois de Mars 1170. l'archevêque fatigué de la longueur de fon exil, envoïa fecrettement à Godric, lui demander quelle feroit la fin de ses maux. L'envoïé fur près de huit jours fans pouvoir parler au faint ermite : qui enfin lui fit ouvrir fa porte & lui dit : Dites à vôtre maître qu'il ne fe trouble point: il rentrera bien-tôt dans les bonnes graces du roi : il fera rétabli avec honneur dans fon églife, & les Anglois en auront plus de joïe qu'ils n'ont été affligez de fon exil. Il eft vrai que cette fercnité feinte fera troublée par une injuftice, & une cruauté inouie : mais Godric ne fera plus en ce monde: dites-lui encore, & lui repetez que dans neuf mois ce qui le regarde fera entierement fini. Godric fit plufieurs autres prédictions que l'évenement verifia, & découvrit fouvent les penfécs fecrettes : il guerit des malades & fit plufieurs autres miracles. Enfin accablé de vieilleffe & d'infirmitez, il mourut le jeudi de l'octave de l'Afcenfion vingt-uniéme d'Avril 1170.

XIX.

Theorien avec les

Cang. glof. lat.

LXIX. n. 10.

Theoriani dial.

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G. I. 1624. p.

En Orient Norsesis étoit Catholique des Arme AN. 1170. niens, c'est-à-dire leur patriarche ou primat, comConference de me je l'ai déja marqué. Il écrivit à l'empereur MaArmeniens. nucl Comnene une lettre où il traitoit de quelques Cathol. Sup. I. points de foi & de discipline, sur lesquels les Armeniens n'étoient pas d'accord avec les Grecs, této. 1. Bibl. PP. moignant défirer s'en éclaircir ; & l'empereur lui envoïa un philofophe nommé Theorien, avec une lettre, où il difoit, que fi les Armeniens vouloient quitter leurs erreurs, il étoit prêt avec l'église catholique à les recevoir comme fes freres. Theorien arriva près du catholique Norfefis le quinziéme jour de Mai l'an du monde 6678. vingt-huitième du regne de l'empereur Manuel, indiction troifiéme, qui eft l'an de Jesus-Chrift 1170. Il falua le catholique de la part de l'empereur, lui marquant le défir qu'avoit ce prince de la réunion des Armeniens; à quoi Norfefis répondit par des remerરે

cimens.

nous

Le lendemain il manda Theorien, & lui dit; J'ai lû la lettre du très-pieux empereur, & j'ai vû le defir qu'il a lui & la fainte églife des Romains pour nôtre réunion. Aprenez-nous donc quelles font nos erreurs : & fi on nous les montre nous en corrigerons volontiers. Sous le nom des Romains, il faut ici toûjours entendre les Grecs. Theorien répondit: Je prie vôtre grande fainteté de m'écouter avec fa douceur naturelle, & de ne fe pas choquer de mes queftions. Convenons ensemble , que fi nous entendons quelque propofition qui ne nous

paroisse pas bonne, nous ne nous prefferons pas AN. 1167.
de la qualifier d'heretique : mais nous nous infor-
merons foigneufement du fens des paroles, & de
l'intention de celui qui les emploïe. Nous devons
auffi nous défier de la groffiereté de l'interpre-
qui non-feulement ignore la grammaire,
mais ne fait pas bien même le grec le plus com-
mun, afin qu'on ne nous impute pas ses fau-
tes. Le catholique convint de ces regles pour leur

te

conference.

Theorien lui demanda ensuite, fi la lettre qu'il avoit écrite à l'empereur contenoir fes veritables fentimens, & après qu'il eût dit qu'oüi, Theorien ajoûta: Quels conciles recevez-vous ? Norfefis répondit, celui de Nicée, celui de Conftantinople & celui d'Ephese où Neftorius fut dépofé. Theorien: De quels docteurs embraffez-vous les écrits & la doctrine? Norfefis. De faint Athanafe, de faint Gregoire le theologien, de saint Basile; de faint Gregoire de Nyffe, de faint Jean Chryfoftome, de faint Ephrem, de faint Cyrille d'Alexandrie & de plufieurs autres. Theorien: Commençons mainte-nant à lire vôtre lettre & en examinons le fens fraternellement, pour voir fi elle eft conforme à ces peres & à ces conciles.

On vint à l'endroit où il étoit écrit: Nous difons qu'il n'y a qu'une nature en Jefus-Christ, non par confufion comme Eutychés, ou par diminution comme Apollinaire, mais dans le fens orthodoxe de S. Cyrille d'Alexandrie: comme il a dit dans fon livre contre Neftorius, qu'il n'y a qu'une

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