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pourrois rapporter un autre exemple, que je trouve dans une Lettre que que m'a écrit le 18. de Novembre 1700. le Curé de la Paroiffe de Saint Hubert, dont la vertu & la capacité vous font connues.

On affure encore qu'on a conftamment remarqué que tous ceux qui ont été taillés au Monaftere de S. Hubert s'approchent des hommes ou des animaux enragés fans aucun danger; ce qui n'arrive point aux autres. On dit aufi que ceux fur les fronts de qui on a mis un petit brin de la fainte Etole meurent tranquillement & fans convulfion, lorfqu'il leur arrive de mourir de la rage, contre laquelle ils ont cherché un préfervatif. Mais comment eft-on affure du premier fait?Par la renommée : (a) Mais la renommée, qui eft le titre de l'incertitude, pour me fervir des termes de Tertullien, n'a pas lieu lorfque des témoins oculaires dépofent le contraire. Je crains bien qu'on ne trouve point en tout cela cette fincérité & cette prudence qui donnent à un témoignage l'autorité la plus étendue. Ce feroit prendre une peine inuque de de marquer en détail tous les

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a) Apológ.cap.7.

moyens qu'on peut avoir pour en impofer aux famples & aux moins clair voyans: je parle à des gens inftruits. Quant à l'autre point, peut-être que ce n'eft point la rage, mais la fievre ordinaire, qui a fait mourir ceux qu'on dit être morts tranquillement. Je connois des Medecins habiles qui pentent qu'il faut attribuer la caufe de certe mort paisible à un épuifement de forces caufé par l'ardeur de la fievre.

Mais, pour revenir à mon sujet, les hommes croient ordinairemnet qu'il leur eft glorieux qu'un miracle fe foit opéré en leur faveur. C'eft pourquoi il y a une infinité de gens qui fe vantent fans raifon d'avoir été préfer vés de la rage par le moyen de la Neu vaine de S. Hubert; foit parcequ'il n'eft pas certain qu'ils aient été mordus par des animaux venimeux; foit parcequ'il ne paroît pas clairement que la nature n'a pas contribué à détourner la rage. Quoi qu'il en foit, puifqu'il n'arrive prefque jamais que des Théologiens, des Medecins & des perfonnes fages, défintéreffées & éclairées approfondiffent avec foin la vérité de ces guétifons prétendues mi

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raculeufes; c'eft avec peu de fonde ment que les Religieux du Monaftere des Ardennes fe glorifient des guérifons innombrables obtenues par l'interceffion de Saint Hubert, & par les pratiques de la Neuvaine, comme d'une grace finguliere de Dieu, & d'un miracle continuel que l'état préfent de l'Eglife ne comporte pas, & que l'Eglife naiffante n'a point vû. Du moins qu'ils produifent des procèsverbaux de ces guérifons, tels que les Evêques ont coutume d'en dépofer dans leurs Greffes pour autorifer les miracles,& pour en tranfmettre la mémoire à la postérité. Cependant nous nous abftiendrons d'adopter les miracles prônés par les Religieux de Saint Hubert. Je dis prônés, paffezmoi cette expreffion, dont je me fuis fervi, parceque, felon le Concile de Trente, (a) il ne faut admettre que les miracles.... avérés & approuvés

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l'Evêque, après qu'il a confulté des Théologiens & d'autres perfonnes recommandables par leur piété. Enfin on attribuera ces fortes de guérifons ou à un miracle particulier, ou à la nature & au fecours de la Medecine. Il faut

Seff. 25. Decreto de Invocat. San&orum..

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opter l'un de ces deux fentimens; il n'y a point de milieu. Si elles font opérées par la nature & par la Medecine, ce feroit aux Medecins à en juger mais ils fe moquent des pratiques de la Neuvaine, & les traitent de frivoles & de ridicules. Comment alors diroit-on que ces guérifons font miraculeufes? Certes, fi cela eft, les pratiques de la Neuvaine, du moins la plupart, font vaines, car Dieu n'attache point à l'Eglife, par de pareilles obfervances, les miracles de fa toute-puiffance; & il ne permettroit pas que ce qu'il feroit pour manifester la gloire & les vertus de Saint Hubert fût tellement obfcurci, que durant tant de fiecles, & après un mûr examen fouvent répété, les plus habiles des Théologiens & des Medecins Catholiques le niaffent, & écriviffent même que la fuperftition y a beauCoup de part. Or les Docteurs de

Paris ont certainement donné une décifion contraire à la vôtre fur cette matiere, ainfi que le rapporte M. de Sainte Beuve au Tome 2.de fes Cas de confcience, No. 193. Qui oferoit donc foutenir que Dieu fait les mira cles journaliers du répi, que le der

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nier article de la Neuvaine permet de donner à un autre par ceux qui ont été taillés; & cela pour des impies, & par des impies qui fe glorifient à ce fujer? Ce ne feroit certes ni l'Ecrivain anonyme du onzieme fiecle, ni même les Religieux de Saint Hubert d'aujourd'hui: cependant ce répi furpaffe vifiblement les forces de la nature: comment done peut-on le défendre? En aucune maniere : aurrement une expérience égale prouveroit qu'il n'y a point de fuperftition dans plufieurs pratiques fufpectes à tous les Théologiens, ou plutôt condamnées unanimement, dont fe fervent avec fuccès les gens de la campagne pour guérir les maladies de leurs beftiaux. La foibleffe & le frivole de l'argument tiré des guérisons journalieres paroît, en ce qu'il y en a eu de femblables, fuppofé que ce foient des guérifons, lorfque parmi les pratiques de la Neuvaine on croyoit néceffaire la confeffion & la communion de neuf jours de fuite, fans qu'elle fût jamais omife par les impies; avant que les Religieux de Saint Hubert euffent remédié à un fi grand abus par une déclaration fo

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