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alloient à Rome en droiture, & devoient y arriver avant lui, les chargea d'une lettre pour l'égli fe Romaine où aprés l'avoir faluée avec de grands éloges, il commence ainfi : J'ai obtenu ce que je demandois à Dieu; de voir vos visages dignes de lui, comme je l'en priois inftamment. Car étant lié pour J. C. j'efpere de vous embraffer: fi c'eft fa volonté, que j'aye le bonheur de perfeverer jufques à la fin. Le commencement eft bien difpofé: pourveu que je reçoive la grace & que rien ne m'empêche d'obtenir mon partage. Je crains que votre charité ne me nuife. Car il vous eft aifé de faire ce que vous voulez; & il m'est difficile d'arriver à Dieu fi vous m'épargnez.. Je ne veux pas avoir pour vous une complaifance humaine mais plaire à Dieu, comme vous lui. plaifez. Car je n'aurai jamais une fi belle occafion. d'arriver à Dieu; ni vous, fi vous demeurez en repos, jamais vous n'aurez l'honneur d'une œuvre meilleure. Si vous ne parlez point de moi, j'iray à Dieu : fi vous m'aimez felon la chair, je retournerai à la course. Vous ne pouvez me procurer un plus grand bien, que d'être immolé à Dieu, tandis que l'autel eft encore prêt. On voit par-là combien S. Ignace craignoit que les chrétiens deRome par leur crédit, ne le délivraffent du supplice. Il continue:

Vous n'avez jamais été envieux de personne :: vous avez inftruit les autres. Je veux que les préceptes que vous avez donnez, demeurent fermes

Seulement demandez pour moi de la force, au dedans & au dehors: afin que je ne dife pas feulement, mais que je veüille : que l'on ne me nomme pas feulement chrétien, mais que l'on me trouve tel. Et enfuite: J'écris aux églifes, & leur mande à toutes , que je meurs volontairement pour Dieu, fi vous ne m'en empêchez. Je vous conjure, ne m'aimez pas à contre-temps. tre-temps. Souffrez que je fois la pâture des bêtes, qui me feront jouir de Dieu. Je fuis le froment de Dieu, & je ferai moulu par les dents des bêtes, pour devenir un pain tout pur de J. C. Flatez plûtôt les bêtes, afin qu'elles foient mon tombeau, & qu'elles ne laiffent rien de mon corps de peur qu'aprés ma mort je ne fois à charge à quelqu'un. Je serai vrai difciple de J. C. quand le monde ne verra pas même mon corps. Priez le Seigneur pour moi, afin que par ces inftrumens je devienne une victime. Je ne vous ordonne pas comme Pierre & Paul : c'étoient des apôtres, je suis un condamné. Ils étoient libres, je fuis encore efclave:: mais fi je fouffre, je ferai affranchi de J. C. & je ressusciterai libre par lui. Dés à prefent j'apprens dans mes chaînes à ne rien defirer de temporel

ou de vain.

Depuis la Syrie jufques à Rome, je combat contre les bêtes par mer & par terre, le jour & la nuit: étant lié avec dix léopards; c'est-à-dire une escoüade de foldats qui deviennent plus méchans, même quand on leur fait du bien.

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Y y iij,

Mais leurs mauvais traitemens m'inftruisent de 1. Cor. IV. 4. plus en plus, & je ne fuis pas juftifié pour cela, Dieu veuille que je jouiffe des bêtes qui me font préparées. Je fouhaite de les trouver bien prêtes, & je les flaterai, afin qu'elles me devorent promtement : & qu'il ne m'arrive pas comme à quelques-uns qu'elles n'ont ofé toucher. Si elles ne vouloient pas, je les forcerai. Pardonnez-moi, je connois ce qui m'eft utile. Maintenant je commence à être difciple. Aucune creature, ni visible, ni invisible, ne m'empêchera d'arriver à J. C. Le feu, la croix, les troupes de bêtes, la separation de mes os, la divifion de mes membres, la deftruction de tout mon corps, les pires tourmens du démon puiffent venir contre moi pourveû feulement que je joüiffe de J. C.

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Les plaifirs du monde, ni les royaumes de ce fiécle ne me ferviroient de rien. Il vaut mieux que je meure pour J.C.que de regner fur toute la terre, Et enfuite: Le prince de ce monde veut m'enlever, & corrompre ma volonté attachée à Dieu. Que perfonne d'entre vous ne prenne fon parti. Prenez plutôt le mien,c'est-à-dire celui de Dieu.Gardezvous de parler de J. C. en aimant le monde. Que l'envie n'habite point chez vous. Quand je vous prierois d'autre chofe, étant present ne le faites pas: croyez plûtôt ce que je vous écris. Je vous écris vivant & amoureux de la mort. Mon amour eft crucifié. Je n'ai point un feu materiel, mais une eau vive, qui parle en moi, & me dit inté

rieurement: Allons au Pere. Je ne fuis fenfible, ni à la nourriture corruptible, ni aux plaifirs de cette vie. Je defire le pain de Dieu, le pain celef

te,

le pain de vie : qui eft la chair de J. C. le Fils de Dieu, qui à la fin est né du sang de David & d'Abraham. Je defire le breuvage de Dieu : fon fang qui eft la charité incorruptible, & la vie fans fin.

Il dit encore: Souvenez-vous en vos prieres de l'église de Syrie, qui a Dieu pour pasteur à ma place. J. C. feul la gouvernera, & votre charité. Pour moi j'ai honte que l'on dife que j'en fuis: je n'en fuis pas digne : je fuis le dernier d'entr'eux, & un avorton. Mais par la mifericorde de Dieu je fuis quelque chofe, fi je puis arriver à lui. Mon efprit vous falue, & la charité des églifes qui m'ont receu au nom de J. C. non comme un paffant.. Car celles qui ne font pas venues me voir en effet, ont fourni aux frais, chaque ville pour fa part Je vous écris ceci de Smyrne, par des Ephefiens nos bienheureux freres. Le cher frere Crocus est auprés de moi avec plufieurs autres. Quant à ceux qui font allez devant moi de Syrie à Rome, pour la gloire de Dieu, je croi que vous les connoiffez. Vous leur ferez favoir que je fuis proche. Carils font tous dignes de Dieu & de vous. Vous devez les foulager en toutes choses. Je vous ai écrit ceci le neuvième des Calendes de Septembre, c'est à dire le vingt-quatrième d'Août. Je vous falüe, vous souhaitant jusques à la fin la patience de J. C.

1.X.

ladelphiens.

Ainfi finit l'épître aux Romains, la plus fameufe de toutes celles de S. Ignace.

De Smyrne il fut conduit à Troade, où l'évêque Epitre aux Phi de Philadelphie en Afie le vint trouver. Il écrivit delà à cette églife, à celle de Smyrne, & à S. Polycarpe dans l'épître aux Phyladelphiens. Dés la falutation il recommande l'union avec l'évêque, les prêtres & les diacres, puis il ajoute. J'ai connu que votre évêque a receu le miniftere public, non de lui-même, ni par les hommes, ni avec vaine gloire: mais dans la charité de Dieu le Pere & du Seigneur J. C. J'ai été furpris de fa douceur. Son filence eft plus puiffant que les vains difcours des autres. Car il est reglé par les commandemens de Dieu, comme une lire par fes cordes. C'eft pourquoi je le felicite de fa volonté attachée à Dieu, vertueufe & parfaite: de fon immobilité, de fon éloignement de la colere, par la douceur du Dieu vivant. S. Ignace les exhorte enfuite à fuir les divifions & les mauvaises doctrines, & ajoute: ce n'eft pas que j'aye trouvé de la division entre vous: mais quelque diftinction. Car tous ceux qui font à Dieu & à J. C. font avec l'évêque: & tous ceux qui fe repentiront & viendront à l'unité de l'églife feront auffi à Dieu, pour vivre felon J. C. Ne vous trompez pas, mes freres. Si quelqu'un fuit l'auteur d'un schifme, il n'aura point de part au royaume de Dieu: fi quelqu'un fuit une doctrine étrangere, il ne s'accorde point avec la paffion de J. C. Prenez

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donc

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