le secret dont ils avoient été les témoins , fût enfermé avec eux; mais 1941. la barque de la suite des Ambassadeurs, avoit échappé aux Impériaux ; elle avoit gagné le rivage, & ceux qui la montoient s'étoient enfoncés dans un bois, d'où ils ne fortirent qu'à l'entrée de la nuit ; pour regagner, comme ils purent, le Piémont. Ces gens ainsi sauvés du danger, pouvoient bien attester que leurs maîtres, avoient été attaqués par deux barques pleines d'hommes armés, & qu'on les avoit poursuivis eux-mêmes, fait qui rapproché des avis que Langei avoit reçus d'avance, annonçoit une expédition ordonnée par le Gouvernement Autrichien., & non un brigandage particulier ; d'ailleurs, on ne sçavoit ni qui étoient ces gens armés, ni ce qu'étoient devenus & les Ambassadeurs & les bateliers. Mais Langei par le talent qu'il avoit d'être informé de tout, ne tarda pas à décou , vrir ce qui restoit à sçavoir. Il trouva le moyen de gagner le domestique du Château de Pavie ; ce domesti1941. que lima sourdement les grilles du cachot où étoient les bateliers , & les mit en liberté ; Langei les fit tous venir à Turin. Il sçut par eux que les assassins étoient des Cavaliers de la garnison de Pavie ; il fçut leur nombre , leurs noms, leur pays ; il sçut qu'avant l'exécution ils étoient restés trois jours & trois nuits dans leurs barques , que pendant ce Mém. de du temps on leur portoit à manger Bellay, l. 9. d'une hôtellerie prochaine , qu'ils avoient des chevaux qui les attendoient au port de Lestrelle ; il sçut jusqu'aux moindres circonstances des lieux & des temps ; il eut enfin la preuve complette que ce meurtre avoit été exécuté par les foins & par les ordres du Marquis du Guast, qui avoit écrit lettres sur lettres au Chef de l'entreprise ( fans compter tous les allées & venues, tous les entretiens secrets ), & qui avoit promis & payé aux assassins le prix de leur crime. Tant que dura cette information, Langei diflimula prudemment, 2 il témoigna au Marquis du Gualt la plus forte persuasion de son in- 1541 nocence , il lui porta ses plaintes, il lui demanda vengeance. Pendant qu'il lui dépêchoit de Termes (1) pour l'amuser par cette fausse commission & pour détourner fes regards de l'information qui se faisoit , du Guaft donnoit de fon côté au Comte de Landriano la commission hypocrite d'aller tromper Langei par un faux étonnement & de faux regrets sur l'attentat qu'on prétendoit avoir été commis contre les Ambaffadeurs, » Du Guast, selon » Landriano , ne pouvoit revenir » de la surprise que lui avoie causée » une lettre de la femme de Fre» gose, qui lui apprenoit que son » mari avoit été affaliné ; il sçavoit » que les Ambassadeurs avoient passé » à Casal , & il n'avoit pas douté qu'ils ne fussent arrivés à Venise, » il donneroit sa vie pour que cela (a) P. de la Barthe de Termes, Gentilhomme ordinaire du Duc d'Orléans , & Capitaine de deux cent Chevaux - légers. Il fut fait Maréchal de: France sous le regne suivant." » fût ainsi. Quelle horrible avan I541. » ture ! à quelles étranges idées lier , que cet attentat eût été com- Il poussa ce jeu de fausseté juf- ceux qui seroient suspects de ce Mém. de du 1541 Langei répondit à tous ces men à songes comme l'exigeoient les conjonctures, c'est-à-dire , par des équivoques polies , & cependant il con tinuoit les informations dont nous avons dit le résultat. Au bout de quelque-temps Lan, driano dit à Langei que le Marquis du Guast étoit à la veille de découvrir la cause du meurtre des Ambassadeurs, qu'on lui en avoit indiqué deux, qu'il ne s'agissoit plus que de sçavoir qu'elle étoit la vraie. L'une étoit une querelle qu'on difoit que Fregose avoit eue avec le Duc d'Urbin ; l'autre rejettoit l'atz tentat fur les Genois & sur Doria, ennemis de Fregose. Langei bien sûr que ni l'une ni l'autre cause n'étoit la véritable , engagea bien du Guast à chercher laquelle des deux l'étoit. Du Guast persuadé qu'il trompoit Langei , voulut aulli tromper le Roi ; il envoya le même Landriano lui rendre compte de tous les mouvemens qu'il ne cessoit , disoit-il, de le donner pour découvrir les |